Ala gloire de Jean Corentin CarrĂ© nĂ© au FaouĂ«t le 9 janvier 1900 engagĂ© au 41° rĂ©giment d'infanterie le 27 avril 1915 mort au combat aĂ©rien le 18 mars 1918. Jean-Corentin CarrĂ©, engagĂ© Ă 15 ans sous un faux Ă©tat-civil, est reprĂ©sentĂ© Ă l'Ă©poque oĂč il Ă©tait engagĂ© dans l'infanterie et partageait ainsi le sort de la majoritĂ© des soldats.quand une main se libĂšre du sol elle invente lâautre main et deux mains apprennent ensemble toutes les autres mains Philippe PaĂŻni 2007, p. 123 Les poĂšmes sont de merveilleux tests pour lâobservation de la langue. Pour deux raisons au moins la premiĂšre tient au fait que les poĂšmes mettent toutes les grammaires en crise et ne cessent dâinventer des maniĂšres de dire et dâĂ©crire qui obligent Ă observer la langue toujours en discours, toujours en se situant ; la seconde rĂ©sulte de la premiĂšre puisque le changement de point de vue sur la langue quâoblige Ă faire la lecture des poĂšmes entraĂźne du mĂȘme coup lâhabitude Ă observer toute la langue dans tous les discours autrement quâon ne le fait dâhabitude. Mais ces deux raisons demandent dâabord de changer de point de vue sur ce que font les poĂšmes et en particulier de cesser de leur faire jouer le rĂŽle de fou du roi, de bouffon du prince ou dâexception Ă la rĂšgle ce que fait la thĂ©orie de lâĂ©cart qui met nâimporte quel poĂšme dans lâĂ©cart Ă la norme quand nâimporte quel poĂšme ne fait que montrer du doigt quâil nây a que du discours et non de la langue et seulement des points de vue sur la langue et non des vĂ©ritĂ©s. On sait depuis toujours, Ă moins de mauvaise foi, que les poĂšmes sont Ă©crits avec le lexique et la syntaxe de tous les discours et inversement. Aucun lexique poĂ©tique si ce nâest, comme tout discours, un lexique qui peut faire systĂšme on dira alors comme pour tout auteur, voire pour tout locuteur le vocabulaire de Hugo⊠Aucune syntaxe poĂ©tique si ce nâest lĂ encore des inflexions, des tournures, des maniĂšres qui feront dire câest bien du Hugo comme on dit câest bien de mon voisin ! ». Certes, Hugo a plus fait pour le lexique et la syntaxe que mon voisin, mais il ne sâagit que dâune question dâĂ©chelle et non de changement de paradigme, de changement de langue donc, pas de langue poĂ©tique et de grammaire affĂ©rente ! Continuer la lecture de Observer la langue la grammaire des poĂšmes â Art du langage, la poĂ©sie avec tous ses poĂšmes comme autant dâĆuvres dâart, ne peut que rĂ©sonner avec les autres Ćuvres dâart parce que les unes comme les autres sont des activitĂ©s subjectives qui inventent des maniĂšres de vivre en mĂȘme temps que des maniĂšres de dire. Alors des unes aux autres, les passages sont incessants parce quâelles nâexistent quâen relation un tableau comme un poĂšme ne vivent quâen passant de bouche en bouche, quâen sâĂ©coutant â la rĂ©ciprocitĂ© Ă©tant ici toujours langagiĂšre ! Câest pourquoi tous les arts, quels quâils soient, y compris ceux non encore enregistrĂ©s dans les genres homologuĂ©s, peuvent appeler les poĂšmes. Câest pourquoi il ne faut pas hĂ©siter Ă brancher » les pratiques artistiques entre elles ou, plus prĂ©cisĂ©ment Ă laisser sâemmĂȘler les arts dans des pratiques qui effectuent des branchements » inĂ©dits voir, sur cette notion, Amselle, 2001. Aussi la voix en poĂ©sie peut se trouver dans les poĂšmes de la peinture, de la musique ou de toutes les activitĂ©s artistiques que lâhomme ne cesse de renouveler de la danse au masque, de la photographie aux installationsâŠ. Deux maniĂšres principales sâoffrent aux activitĂ©s poĂ©tiques en classe les pratiques artistiques les plus diverses viennent accompagner les poĂšmes ou les poĂšmes viennent accompagner ces mĂȘmes pratiques artistiques. Les va-et-vient pouvant dâailleurs se rejouer Ă lâinfini⊠Ces accompagnements trouveraient le plus souvent leurs concrĂ©tisations dans le cadre dâanthologies modestes et ambitieuses Ă la fois. Continuer la lecture de MĂȘler les arts â Souvenons-nous que, bien souvent, le vrai poĂšme est le livre tout entier dont lâauteur de lâanthologie lâa extrait. [âŠ] Ainsi, en nous proposant de rencontrer des poĂštes et en nous aidant Ă les lire, une anthologie est lĂ pour nous inciter Ă aller vers les poĂštes qui vivent parmi nous aujourdâhui, et Ă©crivent. Les poĂštes de notre temps, dans la langue qui est la nĂŽtre aujourdâhui, transforment en ce que seul un poĂšme peut dire, ce qui est le plus profond de nous-mĂȘmes, que parfois nous ne connaissons pas, que nous avons besoin de crier ou de taire, et le ciel, et quand lâĂ©clair de lâamour nous traverse. Ils partagent nos inquiĂ©tudes, notre dĂ©sarroi, nos espoirs, et par le langage, dans le langage, les transforment en beautĂ©. Et en confiance. Car Ă©crire, et lire, câest avoir confiance. Câest toujours transformer le prĂ©sent en avenir. Bernard Vargaftig, 1993, p. 2. Traditionnellement, la poĂ©sie est scolairement lisible sous la forme dâanthologies. Non seulement, les enseignants ne la connaissent le plus souvent que sous cette forme mais Ă©galement les Ă©lĂšves nây accĂšdent quâĂ travers elle. Quâest-ce quâune anthologie ? Ătymologiquement, une anthologie est un bouquet de fleurs, câest-Ă -dire un bel ensemble de beaux textes. Cette beautĂ© » double est Ă considĂ©rer plus prĂ©cisĂ©ment fragmentaire, lâanthologie nâen propose pas moins un ensemble unifiĂ© et la conception que nous avons des anthologies nâest pas forcĂ©ment la seule qui vaille et qui a valu dans lâhistoire des anthologies. En effet, lâanthologie Ă lâĂ©cole primaire est devenue un instrument pour lâenseignant qui y puise Ă sa guise Ă des fins trĂšs pragmatiques qui mettent le poĂšme sous le rĂ©gime dâune utilisation dĂ©contextualisĂ©e et donc en fin de compte ignorent lâanthologie elle-mĂȘme. Ferait exception la pratique de certains enseignants qui laissent leurs Ă©lĂšves choisir dans lâanthologie, rĂ©duite alors souvent Ă un fichier. Mais, historiquement, lâanthologie Ă lâĂ©cole a pu recouvrir dâautres usages. Petite bibliothĂšque choisie et portative constituant un vade-mecum culturel fondamental, elle servait dâabord Ă lâĂ©lĂšve qui sâappropriait ainsi les fondements dâune culture textuelle, en lâoccurrence poĂ©tique, dans le cadre dâun cursus scolaire qui avait dĂ©fini les Ă©lĂ©ments de cette culture. Nous retrouvons ici les caractĂ©ristiques dâun genre pratiquĂ© dĂšs lâAntiquitĂ© et qui fut au cĆur de lâenseignement de la littĂ©rature dans toutes les institutions scolaires depuis lors. Toutefois, on sait que les corpus de morceaux choisis qui visaient toujours un degrĂ© dâhomogĂ©nĂ©itĂ© assez fort Ă visĂ©e Ă©difiante que ce soit pour des raisons morales ou civiques, sont entrĂ©s en crise parce que ces mĂȘmes visĂ©es sont elles-mĂȘmes en crise. pensons Ă la continuitĂ© homogĂ©nĂ©isante de la langue, de la grammaire, de la religion, de la morale et de la nation⊠quâelle fut dâinspiration laĂŻque ou autre et dont on sait quâaujourdâhui elle est le plus souvent rompue, du moins toujours en dĂ©bat. Il faudrait cependant prĂ©ciser que continuitĂ© et homogĂ©nĂ©isation ne sont pas synonymes. En effet, la pensĂ©e du continu des activitĂ©s humaines que les sciences sociales et humaines » dĂ©coupent depuis lâEncyclopĂ©die en autant de disciplines » sĂ©parĂ©es, demande de penser la pluralitĂ©. Aussi, la crise du continuum homogĂ©nĂ©isant quâune certaine Ă©cole rĂ©publicaine » aurait pu instaurer nâest-elle quâapparente car, dans ce cadre discontinu dâune pensĂ©e des activitĂ©s humaines, enfantines en lâoccurrence, câest toujours Ă la fois Ă la sĂ©paration et Ă lâhomogĂ©nĂ©isation que nous avons Ă faire. LâidĂ©ologie du discontinu exige mĂȘme cette homogĂ©nĂ©isation des pratiques qui permet dâosciller de lâindividualisme au collectivisme selon les moments, les intĂ©rĂȘts et les enjeux⊠TrĂšs concrĂštement, les anthologies dâaujourdâhui mĂȘlent une bonne conscience alter-mondialiste et Ă©cologiste thĂ©matiques de la diffĂ©rence et des droits de la terre autant sinon plus que de lâhomme⊠et un hĂ©donisme enfantin thĂ©matique de lâenfant-roi voire du gĂ©nie langagier enfantin Ă travers le ludisme dĂ©bridĂ© des jeux de mots bien scolarisĂ©s. Inutile de donner ici des noms ou des titres mais chacun doit travailler sa lecture pour ne pas laisser faire trop facilement ces sĂ©parations homogĂ©nĂ©isantes câest-Ă -dire consensuelles et donc non-critiques, tout le contraire de lâactivitĂ© du poĂšme. Il semblerait donc, quâaux antiques anthologies qui sâimposaient naturellement, on ait fait place Ă des anthologies dans lesquelles les enseignants comme les Ă©lĂšves butinent Ă leur guise⊠Câest ce que les textes officiels rĂ©digĂ©s dans la foulĂ©e de la rĂ©novation de lâenseignement du français depuis les annĂ©es 70 nâont cessĂ© de proposer. Mais cette libertĂ© est fort trompeuse car les enseignants comme les Ă©lĂšves ne lisent plus les anthologies comme des livre. Ils y prĂ©lĂšvent des Ă©lĂ©ments qui, dĂ©contextualisĂ©s, perdent leur sens. Aussi faut-il quâils le retrouvent en nâen ayant plus les moyens. Car, si les anthologies sont des ouvrages dont les choix peuvent porter Ă critique, elles nâen restent pas moins des parcours de lecture qui nous sont proposĂ©s dans une Ă©criture quâil nâest pas possible dâignorer, sous peine de ne pas pouvoir justement en faire une lecture critique, une lecture libre donc. La libertĂ© nâest jamais donnĂ©e, toujours acquise⊠Regard sur une anthologie⊠Il faut ĂȘtre Ă©diteur en VendĂ©e et originaire de Bourgogne comme Louis Dubost pour rĂ©aliser une anthologie thĂ©matique sur lâescargot Dubost et Diguet, 1996. Il faut avoir créé une maison dâĂ©ditions avec un vers de RenĂ© Char, Le DĂ© bleu », devenue rĂ©cemment LâidĂ©e bleue » mais toujours sise Ă ChaillĂ©-sous-les-Ormeaux en VendĂ©e, pour reprendre au mĂȘme RenĂ© Char le titre dâune telle anthologie Fine pluie mouche lâescargot ». Il faut aimer les livres qui emmĂȘlent textes et images comme dans les plus beaux albums pour collectionner autant de petits fragments poĂ©tiques et de dessins suggestifs qui nous enroulent dans le temps lent de la lecture et nous emballent dans du papier kraft, sâil vous plaĂźt. Il faut suivre les mots qui font la sagesse des hommes et donc les poĂšmes-escargots qui font vivre grĂące Ă leur coquille ou Ă leur trace brillante dâun fragment de sagesse au dĂ©tour dâun mot, dâun vers ou dâune phrase ». Il faut aimer les poĂštes les inconnus que cachent des proverbes chinois ou africains, les mĂ©connus, les disparus, les inoubliables et tous les autres. Il faut ĂȘtre Ă©diteur et poĂšte. âŠvers dâautres anthologies Sâil faut du temps pour arriver Ă ce petit 48 pages, chacun peut sây essayer plus modestement car nul besoin dâĂȘtre Ă©diteur vendĂ©en dâorigine bourguignonne sâil sâessaie avec un autre animal, lĂ©gume, fruit ou Ă©lĂ©ment quelconque du monde qui perdra son anonymat puisquâil deviendra sien. Une anthologie pour agrandir le monde comme celle de Louis Dubost avec Isabelle Diguet qui font dâun escargot un monde en transhumance, un monde portĂ© par les poĂšmes, les dits et rĂ©citations de leurs lectures. Lâanthologie est toujours un projet paradoxal puisque dans un mĂȘme mouvement, elle proclame volontiers sa volontĂ© de faire lire moins et sâaffirme comme moyen de faire lire plus. Lire moins en rĂ©duisant une Ćuvre Ă un extrait suffisant, et lire plus en renvoyant Ă lâintĂ©gralitĂ© de lâĆuvre » Fraisse, 1997, p. 9. Cet aspect pragmatique qui rĂ©pond Ă la double injonction faite Ă tout lecteur, particuliĂšrement Ă lâĂ©cole, de tout lire et bien lire, est doublĂ© par un aspect programmatique puisque lâanthologie est nĂ©cessairement Ă©cartelĂ©e entre la dĂ©marche du bilan et celle du manifeste » Ibid., p. 190 lâanthologue est en charge du passĂ© autant que de lâavenir, avec les renversements quâon pourrait apercevoir entre ces deux termes puisque certaines anthologies rendent au passĂ© un bel avenir quand dâautres feraient le contraire. Et parfois les deux Ă la fois ! Il suffirait de citer la publication en 1948 de lâAnthologie nĂšgre et malgache de L. S. Senghor, prĂ©facĂ©e par Sartre, qui a paradoxalement annoncĂ© lâĂ©mergence aux yeux et aux oreilles du public occidental dâune littĂ©rature nĂšgre » montrant lâavenir dâun passĂ© et dâun prĂ©sent enfoui et rejetĂ©, et qui a pour longtemps fixĂ© ces poĂšmes dans lâambiguĂŻtĂ© dâune assignation racialiste et culturelle soumise au contexte politico-littĂ©raire de la mĂ©tropole »⊠Quoiquâil en soit, lâanthologie est lâĆuvre dâun auteur, qui plus est en tant que lecteur. Câest pourquoi elle a tout son prix pour nâimporte quel lecteur puisquâelle est une manifestation crĂ©atrice de la lecture et dâun rapport Ă la littĂ©rature » Fraisse, 1997, p. 102. Câest ce rapport quâil ne faudrait jamais perdre avec les anthologies elles nous ouvrent Ă un rapport de rapport. Aussi, contre toutes les instrumentalisations, la plus courante Ă©tant celle qui consiste Ă isoler, prĂ©lever le morceau choisi, poĂšme en lâoccurrence, hors de son contexte anthologique, il faudrait toujours, du moins le plus souvent possible, considĂ©rer lâanthologie comme anthologie, câest-Ă -dire comme une organisation mĂ©diatrice de la littĂ©rature avec un ordonnancement et une hiĂ©rarchisation reposant sur autant de sĂ©lections et de prĂ©lĂšvements que dâoublis et de rejets, avec un appareil critique et de prĂ©sentation. Autant dâopĂ©rations qui, non seulement, font la mĂ©moire et lâoubli de la littĂ©rature, mais Ă©galement, font sa réécriture. Câest Ă ce point que nos pratiques pĂ©dagogiques peuvent se transformer et si nous proposions Ă nos Ă©lĂšves de devenir anthologues, non seulement, parce que câest le meilleur moyen de sâobliger Ă lire des anthologies, mais surtout parce que câest le meilleur moyen de trouver sa voix en poĂ©sie, comme en littĂ©rature dâailleurs. Faire des anthologies câest tout simplement concrĂ©tiser lâhistoire de ses lectures en en rĂ©alisant la mĂ©moire et en en projetant lâavenir, les potentialitĂ©s. Faire des anthologies câest montrer concrĂštement, quasi matĂ©riellement, et certainement de la maniĂšre la plus vive, que les lectures sont toujours lâaventure dâun sujet en relation, dâune relation pleine de sujet. Il sâagira donc dâen faire, des anthologies, sous forme de livres mais Ă©galement de productions sonores et enfin de rĂ©alisations qui nâhĂ©sitent pas Ă brancher » les autres pratiques artistiques sur les poĂšmes et lâinverse. Regards sur dâautres anthologies Auparavant, il peut ĂȘtre tout Ă fait judicieux dâobserver rĂ©guliĂšrement les anthologies elles-mĂȘmes. Par exemple, de scruter presque ludiquement les sommaires, dâobserver de prĂšs les extraits et donc de construire progressivement une culture anthologique qui fasse de son lecteur un critique averti. Non pour reprocher telle ou telle erreur, relever tel ou tel oubli, discuter tel ou tel choix mais bien pour observer le point de vue que construit nâimporte quelle anthologie. Observons la table des poĂšmes » dâun trĂšs beau livre oĂč se mĂȘlent poĂšmes, photographies en noir et blanc et illustrations aux pastels. Si le titre fait jeu de mots, On nâaime guĂšre que la paix, il semble partir dâune double naturalisation dans laquelle les poĂšmes » sont embarquĂ©s. Naturalisation que confirme in fine la quatriĂšme de couverture qui fait office de commentaire pour cette anthologie. LâĆil des photographes de lâagence Magnum nous montre la guerre, les pastels de Nathalie Novi nous disent la couleur des jours paisibles et les mots des poĂštes nous crient que les armes ne doivent plus faire la loi sur la Terre. Un album constituĂ© de banniĂšres de papier pour que les enfants fĂȘtent la paix. Henry, 2003, quatriĂšme de couverture La naturalisation est double puisque lâĂ©nonciation du titre on » sembla universaliser un sujet quâon devine ĂȘtre lâenfant-lecteur de cette anthologie ; mais tous les enfants du monde doivent-ils naturellement se plier Ă un sentiment aussi consensuel. Dâautant plus que la seconde naturalisation est celle de la dichotomie guerre et paix qui empĂȘche de dissocier les guerres et les paix, qui absolutise lâun et lâautre terme quand on sait que des guerres justes peuvent ĂȘtre nĂ©cessaires et des paix injustes sont pires que des guerres quâelles nourrissent dâailleurs⊠Sans entrer plus avant dans cette thĂ©matisation qui est rĂ©duite Ă cette double naturalisation, on peut concevoir que les poĂšmes ne peuvent quâĂȘtre instrumentalisĂ©s. Les mots des poĂštes ⊠crient que les armes ne doivent plus faire la loi sur la terre » est une rĂ©duction des poĂšmes prĂ©sents Ă un slogan, ce que confirme la mĂ©taphore des banniĂšres de papier ». Or, les poĂšmes que rassemblent lâanthologie ne sont pas tous, loin de lĂ , sur le registre du cri et, de plus, beaucoup ne sont pas du tout des hymnes Ă la paix ». Prenons quelques exemples cĂ©lĂšbres qui contredisent cette thĂ©matisation-naturalisation. Le poĂšme il y a » dâApollinaire dont lâanthologie nous livre seulement quâun extrait alors mĂȘme que le livre fait preuve dâinventivitĂ© pour augmenter la dimension des pages en jouant des pliages. Pourquoi donc ne pas donner tout le poĂšme dâApollinaire qui ici perd sa force et perd justement sa force problĂ©matique oĂč lâamour et la guerre sâemmĂȘlent dans une redoutable rĂ©flexion et surtout un rythme totalement neuf ? Notons que les lignes dâApollinaire sont transformĂ©es en pseudo vers libres. Et Il y a » suit de prĂšs un poĂšme intitulĂ© Merveille de la guerre » ! Certes, il y a de lâantiphrase dans ce titre mais il fait litanie en lançant Que câest beau ces fusĂ©es qui illuminent la nuit »⊠car Apollinaire dans son Ă©criture-vie essaie de penser la fascination quâon sait, chez les enfants aussi, pour la guerre. Si le poĂšme de Robert Desnos, La voix », est un poĂšme particuliĂšrement fort â nous y reviendrons dans le chapitre suivant â il aurait Ă©tĂ© prĂ©fĂ©rable de donner le poĂšme Ce cĆur qui haĂŻssait la guerre » dont le premier vers est explicite et dont la fin situe prĂ©cisĂ©ment lâenjeu Ce cĆur qui haĂŻssait la guerre voilĂ quâil bat pour le combat et la bataille ! / [âŠ] RĂ©volte contre Hitler et mort Ă ses partisans ! / [âŠ] Car ces cĆurs qui haĂŻssaient la guerre battaient pour la libertĂ© au rythme mĂȘme des saisons et des marĂ©es, du jour et de la nuit » Desnos, 1999, p. 1246. Car ce que doit une anthologie Ă ses lecteurs, câest lâhistoricitĂ© des poĂšmes. Et dans cette anthologie, tout est presque effacĂ© les dates des poĂšmes voyez la bibliographie incomplĂšte de la table alors mĂȘme que les photographies sont lĂ©gendĂ©es par conflits et souvent datĂ©es â mais lĂ Ă©galement, lâinformation reste rudimentaire 1994 Rwanda â Tutsis fuyant les massacres ». En fin de compte, si cette anthologie avait confrontĂ© des poĂšmes contemporains aux conflits, on aurait cherchĂ© les Ă©chos rĂ©ciproques avec photographies et illustrations mais les poĂšmes vont de Victor Hugo Ă Jean-Pierre SimĂ©on et parsĂšment ce parcours poĂ©tique français » de quelques poĂšmes dâorigine Ă©trangĂšre allemand, turc, vietnamien, italien, sĂ©nĂ©galais, cubain, bosniaque, israĂ©lien et palestinien. Aussi lâanthologie demande toujours la critique. Elle demande toujours Ă son lecteur une lecture critique, câest-Ă -dire lâhistoricitĂ© de sa lecture, lâengagement que le poĂšme ouvre dans sa multiplicitĂ© interne voyez Apollinaire et ses poĂšmes de guerre et dâamour et externe que de poĂšmes de par le monde !⊠Il y a des anthologies indispensables. RĂ©unir seulement dix poĂštes pour un siĂšcle, câest certes peu mais suffisant pour bien connaĂźtre par la traduction des poĂšmes que des millions dâenfants russes, aujourdâhui encore, connaissent pas cĆur » quatriĂšme de couverture de Anthologie de la poĂ©sie russe pour enfants, 2000. PlacĂ©s sous la tutelle du grand poĂšte Ossip Mandelstam qui demandait de ne lire que des livres dâenfants⊠», cette anthologie est passionnante car elle est Ă la fois Ă©rudite lâintroduction mais aussi la prĂ©sence de poĂštes que peu connaissent en France mĂȘme parmi les spĂ©cialistes et immĂ©diatement lisible par tout un chacun. Les poĂšmes y sont vraiment des poĂšmes pour enfants sans aucune affĂ©terie ou dĂ©magogie, rĂ©sultant bien plutĂŽt de ce quâune autre grande poĂšte russe, Anna Akhmatova, disait de la littĂ©rature russe du XIXe siĂšcle dont se sont emparĂ©s les enfants et que lâon pourrait appliquer Ă ce XXe siĂšcle russe moment unique et magique grĂące auquel un pont fut jetĂ© entre la poĂ©sie et les enfants ». Suivre cette anthologie câest forcĂ©ment la lire comme un livre. Un livre dâhistoire dâabord mĂȘme si lâon ne sâintĂ©resse pas Ă lâhistoire russe, on peut suivre lentement mais avec une grande proximitĂ© une histoire du regard sur lâenfance ou peut-ĂȘtre mĂȘme du regard des enfants⊠et puis il y a dans cette anthologie une leçon de français Ă nulle autre pareille LEĂON DE FRANĂAIS Il y avait Dans la riviĂšre Un gros brochet Qui savait se taire En français. Les canards Si bavards, Les hochequeues Si curieux Lui demandaient Cher ami, cher brochet, Taisez-vous un peu En français. » Et le brochet Se taisait, Se taisait tout le temps En pur français. PoĂšme de Roman Sef, dans Anthologie de la poĂ©sie russe pour enfants, 2000, p 133 Fabriquer des livres Pour sâengager Ă lire des anthologies, il faut en Ă©crire. Mais, dira-t-on, la tĂąche est hors de portĂ©e des enfants, de nos Ă©lĂšves, de nos classes dĂ©jĂ si pauvres en poĂšmes⊠à moins de considĂ©rer lâanthologie dans ses rudiments qui en font les fondements et alors la taille ne sera plus quâune question dâhabitudes construites, dâapprentissages rĂ©guliers et dâactivitĂ©s adaptĂ©es au bon moment. Il suffit de sâhabituer dĂ©jĂ Ă consigner dans un carnet de lecture sur une seule page quelques fragments de chaque livre de poĂšmes lus en classe. Ces fragments choisis librement par chaque Ă©lĂšve et recopiĂ©s proprement, illustrĂ©s Ă lâoccasion et pourquoi pas titrĂ©s voire commentĂ©s, constituent de rapides et courtes anthologies qui, chemin faisant, feront une grosse et longue anthologie pour chaque Ă©lĂšve au bout dâune annĂ©e voire dâun cycle si lâon conserve le mĂȘme support ou lâadditionne dans une collection de cahiers, et pourquoi pas, de petits livrets rĂ©alisĂ©s Ă lâoccasion. ManiĂšre de poursuivre le cahier de poĂ©sies » en le transformant radicalement⊠sans en avoir lâair ! Au-delĂ , des projets anthologiques moins rivĂ©s aux lectures successives peuvent voir le jour Ă propos dâactivitĂ©s qui auraient pour origine dâautres domaines voire dâautres disciplines. Ce projet anthologique regroupant des fragments poĂ©tiques pris Ă des ouvrages les plus divers en privilĂ©giant toutefois les ouvrages littĂ©raires et les livres de poĂšmes demande quelques recommandations qui suivent les Ă©tapes dâun tel projet 1. La premiĂšre Ă©tape est celle de la collecte pendant laquelle tout fragment relevĂ© pour son intĂ©rĂȘt doit ĂȘtre toujours bien rĂ©fĂ©rencĂ© â que ce soit avec des post-it de couleur ou la photocopie ou mieux le copiage. Cette Ă©tape peut sâappuyer sur des moments de lecture libre pendant une quinzaine de jours. 2. La seconde Ă©tape est celle du montage et de la prĂ©sentation anthologique pendant laquelle un sommaire sâorganise, des critĂšres de classement et de prĂ©sentation se gĂ©nĂšrent et enfin une prĂ©sentation se trouve. Cette seconde Ă©tape demande deux ou trois sĂ©ances pour que le montage ait le temps de se discuter y compris personnellement car il peut-ĂȘtre bienvenu de rĂ©aliser des anthologies Ă plusieurs mĂȘme si lâanthologue doit, Ă un moment donnĂ©, se retrouver seul face Ă la tĂąche. Quoiquâil en soit, les critĂšres dâorganisation doivent apparaĂźtre dans le sommaire voire dans les titres et intertitres organisation chronologique ou thĂ©matique voire alphabĂ©tique ; enchaĂźnement par opposition, par proximitĂ©, etc. Ces anthologies ne doivent pas ĂȘtre dĂ©mesurĂ©es pour de jeunes Ă©lĂšves un petit quatre pages insĂ©rĂ© dans une couverture avec un sommaire peut dâabord suffire ; lâĂ©lĂšve qui dĂ©sirerait un huit pages est bien entendu libre⊠Quelques exemples de projets anthologiques Anthologie dâun poĂšte, dâun groupe poĂ©tique, dâune Ă©poque, dâun pays⊠Anthologie thĂ©matique arbre, branche, forĂȘt⊠; soleil, lune⊠Anthologie notionnelle type de vers, de strophes, de rimes, de prĂ©sentations sur la page⊠Fabriquer une anthologie avec une feuille A4 Couverture du livre dâEric Sautou, Un Oursin, le farfadet bleu », Ă©d. LâIdĂ©e bleue, 2004. Prendre une feuille A4 et la plier en 4 DĂ©couper en deux la feuille et obtenir un petit livre de 8 pages. RĂ©aliser la couverture auteur, titre, Ă©d. Commencer lâanthologie extraits du livre de Sautou rĂ©fĂ©rencĂ©s avec la pagination ; ne pas oublier une dĂ©dicace Ă©ventuelle sur le revers de la premiĂšre de couverture. Continuer lâanthologie. les deux pages centrales permettent des chevauchements. Finir lâanthologie sur la page 6 et rĂ©aliser un sommaire en page 7 ici, câest un index qui reprend la liste des arbres et plantes. RĂ©diger une quatriĂšme de couverture. RĂ©aliser des enregistrements Ce que la poĂ©sie impose Ă la littĂ©rature câest la voix. Ce que la poĂ©sie demande au langage câest dâentendre la voix. Ce qui implique bien entendu de considĂ©rer la voix physique, câest-Ă -dire du point de vue de lâacoustique mais Ă condition de faire de la voix autre chose quâune simple rĂ©alitĂ© biologique voire psychologique lâenjeu est encore plus important. ConsidĂ©rer la physique de la voix câest, en passant par lâacoustique, donner toute sa place Ă une physique du langage et donc ouvrir les voies dâune Ă©coute de la voix dans et par le langage, tout le langage et pas seulement son acoustique. Câest seulement Ă la condition que cet enjeu soit pleinement pris en compte et sans cesse redynamisĂ© que les pratiques sonores avec la poĂ©sie sâouvriront sur cette Ă©coute qui est certainement plus lâinvention dâun organe oreille intĂ©rieure ? et dâun sens Ă©coute interne ? que lâutilisation dâun sens entendre avec un organe lâoreille portĂ© Ă son maximum dâefficacitĂ©. Mais cela peut passer par son exercice qui nâest certainement pas assez pratiquĂ© si ce nâest lors des activitĂ©s musicales, ce qui nâest pas nĂ©gligeable mais qui est totalement insuffisant pour le langage. Au chapitre Argot qui pleure et argot qui rit » du livre septiĂšme, Lâargot » de la quatriĂšme partie du roman Les MisĂ©rables de Victor Hugo, on peut lire ceci Mirlababi surlababo Mirliton ribon ribette ; Surlababi mirlababo Mirliton ribon ribo Dans ce mĂȘme septiĂšme livre Victor Hugo Ă©crivait significativement Apprendre Ă lire, câest allumer du feu ; toute syllabe Ă©pelĂ©e Ă©tincelle. Câest ce quâon recherche ici que les syllabes Ă©pelĂ©es Ă©tincellent⊠pas forcĂ©ment toutes mais au moins quelques-unes parce quâelles vont alors rĂ©sonner de lâĂ©tincelle du poĂšme qui mettra le feu Ă toute la plaine, Ă tout le langage. Et on apprend dans le roman de Hugo que ce court refrain quatrain se chantait en Ă©gorgeant un homme dans une cave ou au coin dâun bois » ! Le narrateur hugolien prĂ©cisait auparavant ceci On retrouve au dix-huitiĂšme siĂšcle dans presque toutes les chansons des galĂšres, des bagnes et des chiourmes, une gaĂźtĂ© diabolique et Ă©nigmatique. On y entend ce refrain strident et sautant quâon aurait dit Ă©clairĂ© dâune lueur phosphorescente et qui semble jetĂ© dans la forĂȘt par un feu follet jouant du fifre [âŠ] Les dĂ©veloppements qui suivent sont de la plus haute importance quant Ă la congruence de lâĂ©thique et du politique le sens rĂ©volutionnaire est un sens moral » ; et le livre sur lâargot sâachĂšve sur la comparaison forgĂ©e Ă propos de notre comptine-refrain Faut-il continuer de lever les yeux vers le ciel ? le point lumineux quâon y distingue est-il de ceux qui sâĂ©teignent ? LâidĂ©al est effrayant Ă voir ainsi perdu dans les profondeurs, petit, isolĂ©, imperceptible, brillant, mais entourĂ© de toutes ces grandes menaces noires monstrueusement amoncelĂ©es autour de lui ; pourtant pas plus en danger quâune Ă©toile dans les gueules des nuages. La lecture Ă voix haute par le moyen de lâenregistrement serait cette Ă©toile dâutopie car, on le sait fort bien, la lecture Ă voix haute est difficile mais ce quâon espĂšre câest que dans les gueules des nuages » que sont forcĂ©ment les ratages, les bafouillages, les silences et les bruits de toute mise en voix dans la classe, sâapercevra le point lumineux » de la voix irremplaçable, celle quâon se doit dâentendre dans sa fragilitĂ© mĂȘme, dans ses essais. Lâargument premier de la nĂ©cessitĂ© dâune vocalisation des textes poĂ©tiques est celui qui ouvre la lecture Ă une appropriation par la voix haute. Il suffit de rappeler quâhistoriquement la voix haute a prĂ©cĂ©dĂ© la lecture silencieuse dâune part et, dâautre part, de souligner combien la vocalisation des textes constitue, pour le moins, une premiĂšre et dĂ©cisive appropriation. Non seulement, des pans entiers de la comprĂ©hension et de lâinterprĂ©tation peuvent et doivent passer par de telles activitĂ©s, mais lâoralisation est une incorporation qui permet que le texte porte son lecteur autant quâil le porte. En effet, un texte sâil fait Ćuvre et encore plus sâil fait poĂšme est un opĂ©rateur anthropologique qui transforme le lecteur voire transporte, au point de modifier indissociablement ses affects et ses pensĂ©es, son corps comme son langage, sa vie comme le monde. MĂȘme si ces changements paraissent minimes, lâessentiel est quâils soient rĂ©els ; quâils soient parfois mĂȘme imperceptibles prouverait quâils en sont dâautant plus probants car hors de tout contrĂŽle, hors de toute maĂźtrise. La chair de poule, le vertige, la sueur⊠ne se maĂźtrisent pas plus que les Ćuvres qui les font venir au corps. Sans parler de la mĂ©moire involontaire, du moins, de ce travail quâun poĂšme fait durablement Ă un corps dans son indissociabilitĂ© avec lâesprit voire avec lâĂąme⊠restons avec Hugo et les derniers mots des MisĂ©rables LIVRE NEUVIEME SUPRĂME OMBRE, SUPRĂME AURORE [âŠ] VI LâHERBE CACHE ET LA PLUIE EFFACE Il y a, au cimetiĂšre du PĂšre-Lachaise, [âŠ] une pierre. [âŠ] Cette pierre est toute nue. On nâa songĂ© en la taillant quâau nĂ©cessaire de la tombe, et lâon nâa pris dâautre soin que de faire cette pierre assez longue et assez Ă©troite pour couvrir un homme. On nây lit aucun nom. Seulement, voilĂ de cela bien des annĂ©es dĂ©jĂ , une main y a Ă©crit au crayon ces quatre vers qui sont devenus peu Ă peu illisibles sous la pluie et la poussiĂšre, et qui probablement sont aujourdâhui effacĂ©s Il dort. Quoique le sort fĂ»t pour lui bien Ă©trange. Il vivait. Il mourut quand il nâeut plus son ange ; La chose simplement dâelle-mĂȘme arriva. Comme la nuit se fait lorsque le jour sâen va. Le monumental fait place ici au movimental » aux inscriptions gravĂ©es dans le marbre, il est prĂ©fĂ©rĂ© la nuditĂ© dâune voix qui a retenu en quatre vers » toute une vie et bien plus toute une relation. Et encore bien plus tout un poĂšme qui porte tout lâunivers dans le plus banal Ă©vĂ©nement. Câest que dans cette voix les finales de vers en particulier sâentend non seulement le nom Valjean mais sâentend aussi son infinie rĂ©sonance. La vie, la voix, comme la nuit se fait ». Enregistrer sa voix rĂ©guliĂšrement, telle serait la premiĂšre activitĂ© qui viendrait comme Ă©prouver cette physique du langage que les rencontres avec les textes poĂ©tiques obligent Ă construire, Ă vivre. Deux solutions trĂšs simples le permettent dans toutes les classes aujourdâhui. Chacun sa bande-son⊠La premiĂšre solution est ancienne chaque Ă©lĂšve possĂšde une cassette sur laquelle il enregistre au magnĂ©tophone rĂ©guliĂšrement des fragments de textes lus ou rĂ©citĂ©s. La seconde solution est plus rĂ©cente chaque Ă©lĂšve ouvre un dossier personnel dâenregistrement avec un logiciel adaptĂ© sur lâordinateur de la classe, de son groupe⊠Tous Ă lâĂ©coute La contrainte dans chacun de ces cas, câest dâarchiver les enregistrements. Lâenjeu didactique qui repose sur cette pratique rĂ©guliĂšre dâenregistrements, consiste Ă organiser de temps en temps des moments dâĂ©coute critique soit individuels soit collectifs petit groupe ou classe entiĂšre. Dans le cahier poĂ©sie ou littĂ©rature, chaque Ă©lĂšve note ce quâil a Ă©coutĂ© et rĂ©dige un court commentaire. Lâenseignant peut fort bien prĂ©ciser les consignes dâĂ©coute et donc de prise de notes. Il peut Ă©galement organiser de courts dĂ©bats avant la prise de notes quand lâĂ©coute se fait en petit ou grand groupe. ⊠vers des anthologies sonores publiques Au-delĂ de cette activitĂ© rĂ©guliĂšre, dâautres modes dâenregistrement peuvent ĂȘtre rĂ©alisĂ©s afin dâeffectuer des montages de voix, de textes et/ou de sons comme autant dâanthologies sonores mises ensuite Ă la disposition de tous BCD, classe de correspondants, familles, site InternetâŠ. Il y a des poĂšmes de prĂ©dilection pour les enregistrements les comptines, en premier lieu, mais Ă©galement les poĂšmes dits illisibles Ă voix haute. On comprendra aisĂ©ment quâentre ces deux pĂŽles, tous les poĂšmes peuvent donner lieu Ă enregistrements, Ă anthologies sonores. 1. Des comptines Si tous les textes peuvent passer par la voix enregistrĂ©e, on peut aussi aller droit vers ceux qui obligent Ă trouver une voix quâon ne savait pas quâon avait⊠Les comptines sont souvent rĂ©servĂ©es aux Ă©lĂšves du cycle 1, en confier aux Ă©lĂšves des cycles 2 et 3 permettrait dâune part dâouvrir le rĂ©pertoire et dâautre part de saisir cette physique du langage qui est forcĂ©ment Ă lâĆuvre avec les comptines. Au niveau du collĂšge et dĂšs le cycle 3, lâintroduction des chansons » dans le corpus devrait problĂ©matiser ce qui perdure de la comptine Ă la chanson. Pensons, entre autres phĂ©nomĂšnes plus ou moins rĂ©cents, au rap et au slam voir Lecture jeune, n° 115. Il y a des traditions multiples quâil ne faudrait jamais perdre de vue et que des rĂ©fĂ©rences toujours vives aux plus vieilles chansons » de nos rĂ©pertoires devraient nourrir, et il y a Ă©galement dans une actualitĂ© quâil faudrait toujours saisir pour rester vigilant et Ă lâĂ©coute ce qui nâest que rĂ©pĂ©tition ou au contraire heureuse reprise, vraie rĂ©invention. VoilĂ une piste dâanthologies sonores qui ne peuvent se faire quâen tĂątonnant, en cherchant ce qui, dans les voix enregistrĂ©es, continue, rĂ©sonne, fait Ă©cho, renverse ou encore fait entendre Ă neuf. Ce poĂšme de Robert Desnos met la voix dans une ronde non seulement par ses rimes qui tournent mais Ă©galement par sa mĂ©trique 4x huit-syllabes puis 4x cinq-syllabes qui oblige Ă faire entendre ce dĂ©hanchement du pair Ă lâimpair avec une accĂ©lĂ©ration que renforcent les attaques finales qui imposent une sur-accentuation jusquâĂ presque prononcer lâenvoi ainsi Et salut tout lâmonde » La sardine Une sardine de Royan Nageait dans lâeau de la Gironde ; Le ciel est grand, la terre est ronde, Jâirai me baigner Ă Royan Avec la sardine, Avec la Gironde, Vive la marine ! Et salut au monde ! 2. Des textes impossibles Ă dire Si les comptines et autres textes de chansons » semblent faciles Ă dire et donc peuvent et doivent constituer le premier fonds des anthologies sonores, ne serait-ce que pour conserver en vie ce fonds immĂ©morial ou largement partagĂ©, dâautres textes devraient paradoxalement venir constituer un fonds propice aux anthologies sonores ceux qui semblent justement impossibles Ă dire ! Commençons par un exemple ! ĂŽrondElune,co mment flottronDe plus que roNdees-tu ; tou te &rOnde plus dor Ă©eque Rond issime ? E. E. Cummings, 2002, p. 68 Enregistrer ce texte dans une anthologie sur la lune, par exemple Ă cĂŽtĂ© de Moi, jâirai dans la lune » de RenĂ© de Obaldia 1969, câest chercher ce que fait un tel poĂšme autrement quâen rimant en fin de vers lune » avec fortune » ou quâen comptant six syllabes. Mais alors que fait un tel poĂšme quâon a peine Ă faire entendre ? Il nous force Ă augmenter lâĂ©coute, Ă chercher cette Ă©coute dans des dimensions inhabituelles. Et cela demande autant dâessais que de bredouillages, de dĂ©rapages, de bĂ©gaiements. Mais, de lâexclamation Ă lâinterrogation, des coupes incongrues de vers, de mots, de lettres aux incises entre parenthĂšses, peut sâentendre une voix qui nous fait voir une lune jamais vue dans le halo lunaire⊠Mais lâimpossible Ă dire câest certainement le silence et lâorientation premiĂšre que toutes les anthologies sonores rĂ©alisĂ©es Ă lâĂ©cole jusquâen troisiĂšme devraient concrĂ©tiser, câest bien celle de faire entendre les silences des poĂšmes qui rĂ©sonnent de tout ce quâils ne peuvent pas dire et quâils disent si fort Ă leur insu et Ă notre insu. Il ne sâagit pas alors dâenregistrer des silences comme on ferait en musique mais de laisser venir Ă force dâĂ©coute dans le travail de la voix enregistrĂ©e et des poĂšmes dits Ă voix haute, des uns aux autres, dans ces anthologies, de laisser venir le silence du poĂšme, câest-Ă -dire sa force insoupçonnĂ©e, son inconnu qui est aussi notre inconnu, lâinconnu de notre diction, de notre lecture. Prenons un exemple qui demande, grĂące aux enregistrements, autant de reprises que de tentatives LE CĂTĂ BLEU DU CIEL Les bancs sont prisonniers Des chaĂźnes dâor du mur Prisonniers des jardins oĂč le soleil se cache PrĂšs de la forĂȘt vierge De la prairie Ă©tale Du pont qui tourne Ă pic Dans lâangle le plus froid La boĂźte des nuages sâouvre Et tous les oiseaux blancs sâenvolent Ă la fois Tapis plus vert que lâeau plus doux que lâherbe Plus amer Ă la bouche et plus plaisant Ă lâĆil Les arbres Ă genoux se baignent Lâair est calme et plein de soleil La lumiĂšre sâabat Le jour perd ses pĂ©tales Plus haut câest tout dâun coup la nuit Les regards entendus Et le clignement des Ă©toiles Les signes Par-dessus les toits Pierre Reverdy, 1967, p. 275 Ce poĂšme de Pierre Reverdy semble ajouter statiquement des Ă©lĂ©ments de paysage alors quâau contraire câest un mouvement dâĂ©lĂ©vation de libĂ©ration ? qui progressivement met en branle tous les Ă©lĂ©ments dâune rĂȘverie certes mystĂ©rieuse mais active au plus haut point jusquâĂ se fondre au cosmos. Câest ce continu, au-delĂ du silence, quâil sâagit de rendre actif dans la respiration toute retenue dâune lecture. Celle-ci ne peut se contenter dâaccumuler des Ă©lĂ©ments informatifs mais doit chercher cette voix silencieuse qui la porte vers le cĂŽtĂ© bleu du ciel ». Aucune recette ni technique ne peut venir Ă bout dâune telle recherche. Elle demande le temps dâune Ă©coute la plus vive qui soit entendre dans la voix enregistrĂ©e ce qui trouve ce continu, ce qui fait entendre mĂȘme Ă peine ce cĂŽtĂ© bleu du ciel », voilĂ lâobjectif de telles anthologies sonores qui incluraient aussi des textes impossibles Ă dire⊠Continuer la lecture de Multiplier les anthologies â Il y a donc les sĂ©quences qui permettent de vivre avec des Ćuvres pour faire Ćuvre, des rituels qui construisent des habitudes dâĂ©coute et dâattention vers les poĂšmes et, enfin, des projets qui vont accroĂźtre le continu du poĂšme Ă la vie sous lâangle de la fĂȘte ou de la rencontre. Moments dâexception mais moments indispensables pour que les rituels et les sĂ©quences prennent sens, se ressourcent Ă des dynamiques oĂč la surprise et la jubilation, lâaventure et le hasard, lâattente et la coopĂ©ration jouent multiplement pour chacun. Nous avons surtout veillĂ© Ă faire rentrer les poĂšmes dans la classe, Ă ce que les Ă©lĂšves, tous les Ă©lĂšves, puissent avoir les moyens de grandir leur Ă©coute du poĂšme dans des activitĂ©s variĂ©es au cĆur de leur scolaritĂ©. Aussi, faudrait-il envisager le mouvement inverse pour que le continu de la vie sâentende dans les poĂšmes sortir les poĂšmes de la classe, du moins tester que les poĂšmes tiennent face Ă la vie, toute la vie, celle qui parfois ne peut rentrer dans la classe⊠Mais Ă©galement faudrait-il sortir de la classe pour rencontrer des personnes, poĂštes ou pas, qui disent vivre le poĂšme dans leur vie. Ces projets nâont pas pour ambition de produire » des rĂ©sultats qui devraient immĂ©diatement plaire Ă quelque institution culturelle encadrant de ses fonds des activitĂ©s contrĂŽlables ou Ă tel public avide de trouver la poĂ©sie sans travailler son Ă©coute du poĂšme et son attention au langage. Il ne sâagit pas non plus dây dĂ©velopper un plaisir » quâon nâaurait pas eu dans les rituels et les sĂ©quences pendant lesquels le travail » aurait Ă©tĂ© de rigueur, auquel cas ces activitĂ©s nâauraient pas pu engager les Ă©lĂšves dans une dynamique de subjectivation dans et par le langage, dans une dynamique qui en fait un sujet de ses apprentissages. Il sâagit bien de poursuivre en risquant une ouverture maximale le risque des rencontres, des lieux, des moments et des personnes auxquels on nâest pas habituĂ©. Sortir les poĂšmes de la classe Les maniĂšres de sortir » les poĂšmes de la classe sont multiples et chacun trouvera dans les circonstances qui sont celles de sa classe les modalitĂ©s concrĂštes voire les idĂ©es pertinentes qui feront que les poĂšmes, quand ils ont engagĂ© leurs lecteurs, ne peuvent que devenir des opĂ©rateurs de rencontres et de manifestations les plus diverses, en inventant mĂȘme de nouveaux modes de diffusion. Si tous les supports sont Ă explorer, ce sont souvent les poĂšmes eux-mĂȘmes et les lectures qui ont permis leur appropriation, qui exigeront tel ou tel support. Que les supports soient donc faits de papier ou de virtualitĂ©, ils ne sont que le prolongement dâun geste initiĂ© dans la classe et qui demande de devenir un geste pleinement relationnel, de devenir rĂ©ciprocitĂ©. Des Ă©changes entre classes, des rencontres rĂ©guliĂšres entre groupes dâĂ©lĂšves, des espaces dâĂ©change rĂ©guliĂšrement renouvelĂ©s, des moments privilĂ©giĂ©s dans le calendrier scolaire, autant de modalitĂ©s que les enseignants connaissent bien et que les enfants apprĂ©cient toujours pour que les poĂšmes tiennent leurs promesses de lanceurs relationnels. Nous proposerons ci-aprĂšs deux modalitĂ©s peut-ĂȘtre plus originales mais, rappelons-le, ces sorties » du poĂšme ne sont que le prolongement obligĂ© dâune activitĂ© qui est au cĆur du poĂšme et de sa réénonciation, lâinfini de son activitĂ© sous peine de ne plus ĂȘtre un poĂšme. Cet inaccompli nâexige aucun dĂ©fi autre que celui qui fait que le poĂšme engage Ă sortir de ce qui est son confinement Ă quelque assurance que ce soit, donc Ă risquer sa valeur et nous avec elle. Envols poĂ©tiques Le poĂšme est dâabord un appel Ă entrer en relation, Ă trouver lâinconnu. Que des cerfs-volants soient porteurs de ces appels signerait dans lâair et le vent cette activitĂ© de tout poĂšme traverser lâespace pour inventer une relation. On peut varier les propositions mais la collection Petits gĂ©ants » des Ă©ditions Rue du monde nous en suggĂšre une faire monter dans le ciel de la cour de rĂ©crĂ©ation un poĂšme sur plusieurs cerfs-volants comme chacun de ces petits livres offre un poĂšme dĂ©coupĂ© en autant de doubles-pages quâen compte lâalbum carrĂ©. Celui qui nous semble le plus adĂ©quat pour toucher du doigt cette proposition est illustrĂ© par Antonin Louchard avec le poĂšme de Paul Eluard quâil publia dans son livre issu dâĂ©missions radiophoniques rĂ©alisĂ©es en 1949, Les Sentiers et les routes de la poĂ©sie. Ce poĂšme et sa mise en livre font ce projet dâenvols qui suit le vent de la comptine en boucle oĂč tout un monde est parcouru et contenu dans lâair de son rĂ©citatif ; de la mĂȘme maniĂšre, les illustrations de Louchard cherchent cette lĂ©gĂšretĂ©, trouvent cet envol qui renverse. Câest comme ce jeu enfantin oĂč lâon aime voir le monde Ă lâenvers. Paul Eluard, Antonin Louchard ill., Dans Paris il y aâŠ, coll. Petits gĂ©ants », Rue du monde, 2001. PublicitĂ©s poĂ©tiques Disperser les poĂšmes des fragments de poĂšmes dans des lieux insolites, lĂ oĂč on ne les attendrait pas, permettrait de suggĂ©rer ce que les poĂšmes nous font. Ils nous refont parce quâils nous changent le monde. Cette dispersion peut prendre de nombreuses modalitĂ©s parmi lesquelles la plus simple consiste Ă utiliser les voies de la publicitĂ© si prĂ©gnante dans notre sociĂ©tĂ© contemporaine. Apposer des post-its dans des endroits inhabituels mais stratĂ©giques de lâĂ©cole, voilĂ qui interpelle le passant, crĂ©e mĂȘme des itinĂ©raires nouveaux⊠à partir du livre de Daniel Biga, La Chasse au haĂŻku 1998, les Ă©lĂšves mettent le livre en confettis et dispersent leurs post-its dans toute lâĂ©cole en cherchant Ă rĂ©aliser des jeux de pistes qui recomposent les itinĂ©raires quâils ont dĂ©couverts dans le livre. Lequel Ă©tait organisĂ© en chapitres » En ville » ; lâatelier des Ă©critures » ; le jardin » ; en montagne » ; des animaux » ; lâhiver » ; neige ». Ci-dessous un parcours sans titre rĂ©alisĂ© par un jeune lecteur, qui commence au matin et finit en rĂȘve⊠bonne journĂ©e ma chĂ©rie â au-revoir mon amour rendors-toi aucun livre ne vaudra jamais une journĂ©e heureuse le haĂŻku je le pratique comme la promenade quotidienne lettre du jour je lis puis ça se brouille les larmes aux yeux Abed a dit âquand la tristesse se prĂ©sente accueille la tristesseâ dans la chaleur animale des WC boite Ă rĂȘves sur la table lâombre de la main qui Ă©crit aprĂšs le genou qui gratte câest le nez qui dĂ©mange dans la salle silence dâor Ă©criture dâargent au carrelage du mur rĂ©pondent les carreaux du sol derriĂšre le mur rĂ©sonnent des voix sans corps la parole est au cĆur du silence ceux qui mâentourent ceux que je vois autour sous lâĂ©charpe se cache une gorge frileuse la mouche dans mon oeil nul autre ne la voit qui je suis ici et maintenant nâa pas de visage parfois je me demande comment me voient les oiseaux ? mon ombre passe merci Ă la terre comme au ciel ni pensĂ©e ni souci ouvre la fenĂȘtre du jardin plein de pensĂ©es plein de soucis je me penche tout en bas sur le lac une minuscule silhouette me regarde le nuage gris dĂ©robe une portion du caviar lactĂ© je fais un dĂ©tour pour ne pas dĂ©ranger un moineau picorant vent redoutable je mâachĂšte une Ă©charpe dâhiver plus haute que moi neige au matin je pense aux poireaux du jardin ce soir je mâendormirai la neige sous mes paupiĂšres Il y a bien sĂ»r la modalitĂ© opposĂ©e aux confettis poĂ©tiques lâagrandissement dĂ©mesurĂ© du poĂšme ou dâun fragment sur un mur, sur une banderole⊠agrandir au maximum un court fragment et poser Ă proximitĂ© le poĂšme en entier mieux le livre dont il est extrait. Exemple Cachecachecachent psst pssit petites chosesfantĂŽmes en catimini clins-dâyeux-mini petites agitĂ©es sorciĂšres et tintinabulantes lutines Ă tu et Ă toi Ă tu et Ă toi petites hop-hop heureuses flatteuses en flanelle flanelle petites gratteuses souriquoises aux yeux qui se carapatent crissent et courent et cachecachecachent droppent droppent guettant la vieille femme avec une verrue sur le nez ce quâelle vous fera nul ne sait car elle connaĂźt le diable ooh le diable ouh le diable aah le grand et vert danseur de diable diable diable diable huiiIII poĂšme de E. E. Cummings, traduit par Jacques Demarcq dans Contes de fĂ©es, 16 poĂšmes enfantins, ClĂ©mence hiver Ă©diteur, illustration de Macha Poynder, 2002, p. 62-63 La complexitĂ© revendiquĂ©e de la poĂ©sie de Cummings est aussi, avec de tels poĂšmes, la revendication de sa part enfantine qui est aux antipodes du simplisme lâamour produit de lâinconnu, câest sa fonction », disait ce poĂšte dans un sonnet. Et les 16 poĂšmes que ce grand poĂšte amĂ©ricain a rassemblĂ©s Ă la fin de sa vie font comme un hommage aux lectures enfantines de la poĂ©sie la plus difficile, puisquâelle font un autoportrait voir la postface Ă©crite par le traducteur, lui-mĂȘme poĂšte, Jacques Demarcq plein de confiance dans la relation que lance le poĂšme de lectures en lectures. Réénonciation continue de lâĂ©criture toujours en mouvement et qui trouve son sujet, comme dit le distique final du troisiĂšme poĂšme Car quoi quâon perde comme un moi ou un toi câest toujours soi que dans la mer on trouvera p. 54 Rencontrer les poĂštes On ne peut pas nier que la rencontre avec un Ă©crivain participe Ă la fois de la dĂ©sacralisation et de la valorisation de la littĂ©rature un Ă©crivain est un homme ordinaire⊠dont lâĆuvre nous fait des choses extraordinaires. Ou alors, cet Ă©crivain est un faiseur et son Ćuvre est une mystification , ce qui est malheureusement parfois le cas ! Aussi, est-il tout Ă fait judicieux dâorganiser de telles rencontres les Ă©lĂšves sont souvent partie prenante Ă condition quâaucune dĂ©magogie spectaculaire ne vienne altĂ©rer la qualitĂ© dâune rencontre comme on peut en avoir beaucoup dâautres â avec tel voisin » de lâĂ©cole qui vient partager son expĂ©rience de vie ou de travail⊠Suivent deux modalitĂ©s complĂ©mentaires de ces rencontres. La premiĂšre rĂ©pond Ă un souci dâancrage dans le temps dâune rencontre qui doit certainement garder son caractĂšre dâĂ©vĂ©nement mais qui exige quâon la prĂ©pare, la poursuive. De plus, la rencontre avec un poĂšte peut trĂšs bien ne pas ĂȘtre possible si ce dernier ne le souhaite pas, ne le peut pas, mais la correspondance peut venir la rendre vive Ă sa façon. Correspondances poĂ©tiques Odilon Redon, illustration pour les Fleurs du mal de Baudelaire Engager une correspondance avec un poĂšte est une modalitĂ© forte de la rencontre que ce soit donc pour sa prĂ©paration ou son prolongement mais Ă©galement pour tout simplement lâassurer et lâancrer dans lâĂ©criture elle-mĂȘme â quâelle prenne la forme dâĂ©crits ou dâenregistrements, dâenvois dâobjets divers photographies, livresâŠ. Une telle correspondance ne doit pas rester formelle et de simple politesse. La correspondance engage vraiment chacun dans une relation qui sâappuie sur la lecture. Chaque lecture celle des Ćuvres comme celle des lettres va demander une Ă©criture et donc une meilleure Ă©coute de ce quâon a lu puisque lâĂ©criture Ă©pistolaire demande de reformuler toujours avec lâautre. LâĂ©pistolaire oblige Ă relancer Ă chaque Ă©change et donc Ă remettre sur le chantier sa lecture puisque lâĂ©change avec un poĂšte ne peut sâengager quâĂ partir des lectures. Car il nây a pas Ă chercher une vĂ©ritĂ© de son Ă©criture dans le discours du poĂšte qui dĂ©tiendrait une vĂ©ritĂ© quelconque quâelle soit prise Ă lâanecdote biographique ou Ă la rĂ©vĂ©lation dâun procĂ©dĂ© quelconque de fabrication mais plutĂŽt Ă poursuivre dans la relation Ă©pistolaire ce que fait lâĆuvre Ă son auteur comme Ă son lecteur lâĂ©change de cette recherche augmentant certainement ce que lâĆuvre fait Ă chacun. Chaque Ă©lĂšve peut Ă©crire au poĂšte, y compris dans des formes qui ne sont pas forcĂ©ment canoniques, et si ce dernier ne rĂ©pond pas Ă chacun â ce qui serait certainement beaucoup trop lui demander â, sa rĂ©ponse au collectif classe saura entendre chacun et donc rĂ©pondre Ă chacun dans les inflexions de sa lettre. Si lâenseignant ne sait pas oĂč adresser la correspondance, rien nâest plus facile il suffit dâĂ©crire Ă lâĂ©diteur qui saura transmettre le courrier, ce qui signalera dâailleurs que cette correspondance est partie de la lecture du livre publiĂ© chez cet Ă©diteur ! Car pas de correspondances sans lectures il ne sâagit pas de jouer Ă la rencontre mais de la jouer Ă partir de ce qui seul peut la nourrir les poĂšmes et leurs lectures. Rencontres poĂ©tiques La PoĂ©sie Ă plusieurs voix. Rencontres avec trente poĂštes dâaujourdâhui, prĂ©face de Jean-Pierre SimĂ©on, coll. Le Français aujourdâhui », Paris Armand Colin, 2010, 264 p. Un jour alors peut arriver qui permettra une rencontre de vive voix Ă©change de regards et surtout de voix, câest-Ă -dire dâĂ©coute les yeux dans les yeux. Moments parfois magiques, souvent dĂ©cevants mais toujours marquants quand le poĂšme est passĂ© dans les voix comme dans les yeux ou encore un geste, une inflexion minuscule, un sourire mĂȘme. Il faudrait conclure sur la nĂ©cessitĂ© de varier de telles rencontres dans le domaine qui nous concerne ici. Cela demande de concevoir le continu des rencontres avec un poĂšte, avec dâautres personnes Ćuvrant chacune dans un domaine prĂ©cis mais toutes engagĂ©es par et dans le langage. Câest alors que la rencontre jouera son rĂŽle montrer la force du langage parce quâelle est lâĂ©thique de la relation quand elle devient poĂšme-relation. Et cela, un poĂšte est en devoir de le faire mais quiconque peut le rĂ©ussir. Alors chaque Ă©lĂšve comprendra quâil nây a pas de rencontres plus grandes » que dâautres parce que le partenaire de la rencontre est reconnu avant puisque cĂ©lĂšbre ou mĂ©diatisĂ©. Les rencontres sont grandes » parce que le partenaire nous engage Ă y ĂȘtre grands », plus grands que nous sommes, dans une rĂ©ciprocitĂ© certaine. Câest dâailleurs ce que font les poĂšmes quand ils sont poĂšmes nous faire plus grands dans et par le langage avec les autres car la grandeur ici nâest pas celle qui se mesure Ă lâaune dâune comparaison avec les autres mais avec soi en relation. Câest aussi tout lâenjeu de nâimporte quelle activitĂ© avec les poĂšmes les pratiques que nous venons de suggĂ©rer nâont pour finalitĂ© que cet agrandissement qui est aussi la condition dâun apprentissage langagier et littĂ©raire consĂ©quent. Avec les poĂšmes, les activitĂ©s scolaires mettent lâenfant en mesure de connaĂźtre et de grandir Ă la fois. il peut alors porter ce beau nom dâĂ©lĂšve puisquâil est pris dans une dĂ©marche dâĂ©lĂ©vation. Par une comptine, lâenfant saute Ă pieds joints par-dessus le monde sur mesure dont on lui enseigne les rudiments. Il jongle dĂ©licieusement avec les mots, et sâĂ©merveille de son pouvoir dâinvention. Il prend sa revanche, il fait servir ce quâil sait au plaisir dĂ©fendu dâimaginer, dâabuser. Paul Eluard 1954 Pour conclure sur lâensemble de ces rituels voir les billets prĂ©cĂ©dents, il faudrait repartir du plus cĂ©lĂšbre dâentre eux et qui semble se confiner aujourdâhui Ă lâĂ©cole maternelle, donc au cycle 1 de lâenseignement primaire, pour parfois sây trouver de plus instrumentalisĂ© Ă des fins dâenseignement phonologique le rituel de la comptine. Ce dernier nâest pas Ă proprement parler scolaire mais lâĂ©cole maternelle a su lui accorder depuis longtemps une place quasiment quotidienne il permet de constituer la classe en chorales, de laisser chaque voix trouver ses gestes relationnels et surtout dâengager le langage dans tout le corps, dâengager le corps dans tout le langage, Ă condition certes dâĂ©couter chaque voix, chaque geste dans une polyphonie indispensable Ă la comptine elle-mĂȘme. Observer les comptines dans les pratiques enfantines montre trĂšs vite que le langage y est entiĂšrement engagĂ© dans une pragmatique qui elle-mĂȘme devient entiĂšrement langage. Ce qui pourrait dâune certaine façon orienter notre attention Ă ce qui fait poĂšme lâinvention dâun rapport Ă soi, aux autres, et au monde » Meschonnic, 2001, p. 44. Car les comptines sont irrĂ©ductibles Ă quelque schĂ©ma ou recette que ce soit dans leur diversitĂ© considĂ©rable quâaucun savant â folkloriste, ethnologue, sociologue, littĂ©raire, pĂ©dagogue, psychologue⊠â nâa rĂ©ussi Ă ce jour Ă considĂ©rer dans leur force. Quâon sâintĂ©resse Ă leur dĂ©nomination mĂȘme â nous disons comptine depuis que Pierre Roy en 1926 a rassemblĂ© ces formulettes, comptes, rengaines, disettes et autres amusiottes voir Roger Pinon, Les noms de la comptine » dans Jean Baucomont et alii, 1961, p. 52 et suivantes.⊠â, quâon se prĂ©occupe de leur origine, de leur dissĂ©mination, de leur Ă©volution, de leurs multiples variantes, et surtout quâon soit attentif Ă leurs valeurs poĂ©tiques et relationnelles dans et par le langage, on ne peut manquer dâabord et avant tout de considĂ©rer le corps-langage quâelles inventent Ă chaque fois. Ce corps-langage est celui de chaque acteur en comptines comme celui de chaque petite ou grande collectivitĂ© quâelles constituent immanquablement ne serait-ce que dans cette activitĂ© qui est toujours une transmission de relation, une invention de gestes langagiers relationnels. Jean Baucomont a pu parler avec justesse Ă leur sujet de gestateurs » et a pu Ă©voquer dâune façon absolument pertinente la transe » poĂ©tique, montrant ainsi quâil faut considĂ©rer ces productions Ă Ă©galitĂ© avec les plus grandes Ćuvres de la littĂ©rature. Or elles sont encore trop souvent considĂ©rĂ©es comme puĂ©riles et, par consĂ©quent, souvent instrumentalisĂ©es Ă des fins strictement didactiques phonologie et prononciation par exemple. Le spectacle de cette transe » poĂ©tique incite Ă Ă©voquer dâautres faits de mĂȘme nature lâivresse linguistique des inventions vocabulaires chez Rabelais, le dĂ©bordement jaculatoire des sibylles antiques, le flux des lamentations vocĂ©ratrices corses, les inĂ©puisables phantasmes de certains textes rĂ©alistes obtenus par lâĂ©criture automatique, voire les piĂ©tinantes litanies des versets de PĂ©guy. Baucomont et alii., 1961, p. 23 Câest que les comptines, quand elles ne sont pas rĂ©duites Ă un simple divertissement futile et naĂŻf, ad usum Delphini » Baucomont et alii., 1961, p. 12, font bien plus visiblement que ce que tous les poĂšmes font , ainsi que Henri Meschonnic le prĂ©cise fortement dans une dĂ©finition qui vient dĂ©faire bien des prĂ©jugĂ©s et engager le poĂšme dans le vivre tout entier La poĂ©sie comme activitĂ© dâun poĂšme, est un des universaux du langage. Anthropologiquement. Câest une dĂ©finition qui Ă©chappe au signe. Elle fait du poĂšme une Ă©thique en acte, en acte de langage. InsĂ©parablement du fait que le poĂšme est ce quâun corps fait au langage. Meschonnic, 2001, p. 41 Comment ne pas conclure alors cette rĂ©flexion sur les rituels par une comptine et par une fable⊠Sâentretenir, câest se tenir ensemble, câest-Ă -dire vivre ensemble dans et par le langage. Je te tiens Tu me tiens Par la margoulette ou par la barbichette ou par la barbette ou par la barbignette ; Le premier qui rira ou Celui de nous deux qui rira ou le premier des deux qui rira Aura la claquette ou la tapette ou la clafette. DiffĂ©rents dĂ©partements Par la barbe je te tiens ; Si tu me tiens, je te tiens. Le premier dânous qui rira, Une claque il aura. Brest Je te tiens par le menton, Barbichon ; Et moi aussi, Barbiche ; Premier dânous deux qui rira, Un bon souffle aura, Lâoreille tirĂ©e, La cuisse pincĂ©e. SaĂŽne-et-Loire Cette comptine et ses variantes viennent du chapitre VII, Jeux et formulettes de jeux ; Le Pince-sans-rire », du trĂšs beau livre dâEugĂšne Rolland, Rimes et jeux de lâenfance publiĂ© en 1883 2002. Elles sont introduites ainsi par lâauteur Deux enfants se tiennent rĂ©ciproquement par le menton en chantant la formulette qui suit. Le premier qui rit reçoit de lâautre une claque ». Lâethnographe Thierry Charnay prĂ©face la réédition bienvenue de cet ouvrage. Il voit, dans lâanthologie rééditĂ©e du folkloriste, un rĂ©pertoire authentique » avec des matĂ©riaux pour une Ă©tude comparative et historique », des curiositĂ©s [âŠ] liĂ©es au contexte socio-culturel de lâĂ©poque » et des textes vraiment originaux ». Il note le manque dâindications ethnographiques, comme les circonstances du jeu, le lieu, sa pĂ©riodicitĂ©, lâĂąge des joueurs, leur sexe, sa frĂ©quence, etc. ». Voici sa conclusion LâintĂ©rĂȘt des Rimes et jeux de lâenfance, de tout le folklore enfantin, rĂ©side dans le fait quâil sâagit dâun mode de transmission traditionnel reposant sur le bouche Ă oreille, sur lâimitation, sur lâimprĂ©gnation culturelle [suit lâexemple du jeu de billes appris par lâenfant hors tout magistĂšre]. Il nây a pas dâĂ©criture, ces formulettes et ces jeux enfantins, transmis entre pairs mais lâĂ©cole peut aussi jouer un rĂŽle, le sont oralement, et, comme pour la âlittĂ©rature oraleâ, admettent des variations, des variantes car la reproduction exacte nâest guĂšre possible. Ce sont des Ćuvres ouvertes, toujours disponibles pour ĂȘtre rĂ©alisĂ©es selon des conditions qui en permettent la reconnaissance mais qui admettent Ă©galement des innovations. En somme, les activitĂ©s ludiques des enfants relĂšvent du âpatrimoine immatĂ©rielâ comprenant cette culture enfantine transmise entre pairs notamment dans les cours de rĂ©crĂ©ation des Ă©coles, pratiquement le seul espace oĂč elle peut circuler, se constituer, socialiser les enfants ; câest pourquoi les rĂ©crĂ©ations sont des espaces de libertĂ© Ă garder, Ă condition que le football ne les occupe pas tout entiĂšres. Comme Rolland, nous souhaitons par cette publication attirer lâattention sur la production enfantine qui devrait mĂ©riter tout notre intĂ©rĂȘt pour une meilleure comprĂ©hension de notre sociĂ©tĂ© . Observons que lâobjectivitĂ© ethnographique laisse entendre son soubassement subjectif une historicitĂ© des savoirs et mĂ©thodes que le scientisme socio-ethnologique ne peut masquer. Lâethnographie depuis Rolland a certainement progressĂ©. Elle attache dorĂ©navant autant dâimportance au faire quâau dire. Mais elle semble maintenir les points de vue traditionnels de lâethnographie du XIXe quand Charnay, voulant ne serait-ce quâĂ la marge contrĂŽler lâincontrĂŽlable, oublie que le football est une pratique et donc une invention jamais fixĂ©e dans telle ou telle rhĂ©torique du jeu, et surtout quand il rapporte, sous prĂ©texte dâabsence dâĂ©criture, la culture enfantine Ă la culture populaire et donc au langage ordinaire, ce no manâs land du discours, ce non-lieu du littĂ©raire. Son il nây a pas dâĂ©criture » vient comme rĂ©pĂ©ter les clichĂ©s habituels qui dĂ©clinent les dichotomies naturalisĂ©es de lâordinaire et du littĂ©raire, de lâoral et de lâĂ©crit, de la variation et de la fixation, jusquâĂ celle du populaire et du savant, qui toutes conduisent Ă sĂ©parer la littĂ©rature de la vie. Mais lâethnographe est savant et il sait que cet ordinaire » est extraordinaire » aussi remet-il cette spĂ©cificitĂ© dans une pragmatique de lâactualisation dâune forme immatĂ©rielle » soumise Ă une performance de la quotidiennetĂ©. Mais il sâagit de bien autre chose ! Certes lâethnographe voit passer un sujet de lâimitation sociale, du conformisme groupal, intĂ©grant une certaine innovation forcĂ©ment nĂ©cessaire, le temps passant, les conditions Ă©voluant. Mais il est sourd et nâentend pas le sujet du langage qui est au cĆur de tels processus, dont seule la considĂ©ration permet de penser lâarticulation de la sociĂ©tĂ© et du langage hors de toute instrumentalisation et du langage et du sujet. Ces formulettes sont bel et bien Ă©crites » ! Il faut le rappeler Ă lâethnographe oublieux, parce quâelles font lâĂ©criture dâun sujet un sujet-relation dont tout le corps est langage non seulement parce que les formulettes exigent la performance dans ses variantes et variations, mais parce quâelles inventent chaque fois nouvellement une performativitĂ© du corps-langage, Ă savoir une Ă©thique du dire par son faire. Reprenons notre formulette. Il faut vraiment se tenir » pour que la formulette marche⊠En effet, le se tenir » qui fait la rĂ©ciprocitĂ© est une forme de vie transformĂ©e en une forme de langage et lâinverse. Se tenir » par ce quâon nâa pas la barbe⊠câest justement faire la dĂ©monstration que le langage nous tient plus que ses signes. Câest cette tenue qui est la relation dans et par le langage, sa prosodie, son rythme, que la transmission ne cesse de rejouer dans les formulettes et autres jeux de rĂ©crĂ©ation, de re-crĂ©ation. Alors on ne peut se contenter de rapporter cette transmission Ă une simple actualisation, il faut la concevoir comme lâinvention dâun noyau poĂ©tique, forme interne de ce discours, historicisation radicale qui met toute actualisation au diapason dâune relation et non dâune rĂ©pĂ©tition. On voir par lĂ que la transmission transmet dâabord de la transmission, de lâentretien pour le moins. Laissons maintenant la formulette et passons Ă la fable. Nous allons vite voir que lâentretien, ou plutĂŽt lâentretenue, en fait toute la force. Nous la prenons dans une vieille Ă©dition scolaire Jean de La Fontaine, Fables prĂ©cĂ©dĂ©es dâune notice biographique et littĂ©raire et accompagnĂ©es de notes grammaticales et dâun lexique, dans Radouant, 1929. Le Corbeau et le Renard MaĂźtre corbeau, sur un arbre perchĂ©, Tenait en son bec un fromage. MaĂźtre renard, par lâodeur allĂ©chĂ©, Lui tint Ă peu prĂšs ce langage HĂ© ! bonjour, Monsieur du Corbeau, Que vous ĂȘtes joli ! que vous me semblez beau ! Sans mentir, si votre ramage Se rapporte Ă votre plumage, Vous ĂȘtes le phĂ©nix des hĂŽtes de ces bois. » A ces mots le corbeau ne se sent pas de joie ; Et pour montrer sa belle voix, Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie. Le renard sâen saisit, et dit Mon bon Monsieur, Apprenez que tout flatteur Vit au dĂ©pens de celui qui lâĂ©coute Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute. » Le corbeau, honteux et confus, Jura, mais un peu tard, quâon ne lây prendrait plus. Cette tenue par le corps-langage dâun sujet-relation que la formulette suggĂšre, on peut aussi entendre son activitĂ© dans la poĂ©sie » de la rĂ©citation scolaire, celle qui rejoue plus un enchantement » quâelle ne reprĂ©sente un théùtre de la parole ». Câest que, pour se limiter Ă la fable du corbeau et du renard, lâenchantement de lâ arbre perchĂ© », paradoxalement bien remarquĂ© par Rousseau, se poursuit dans tous les Ă©changes que fait faire la fable ramage-plumage », fromage-langage » pour une analyse plus dĂ©taillĂ©e et pour une considĂ©ration plus vaste de cette lecture dans lâhistoire de la poĂ©sie » Ă lâĂ©cole, voir Martin et S. Martin, Les PoĂ©sie, lâĂ©cole, p. 69-72.. Passage dâun corps-langage, formaticum, par la tenue rĂ©ciproque. Nâest-ce pas cette tenue que la rĂ©citation scolaire de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration a transmise bien plus quâune morale de lâinterlocution ? Ce qui serait tout autre chose quâune leçon de rhĂ©torique sur cette question, je me permets de renvoyer Ă Faire poĂ©sie, faire rĂ©citation, produire un poĂšme chercher le ton ou chercher la voix ? » dans F. Marcoin, 2002 ? Cette poĂ©tique relationnelle fait lâenchantement de la fable de La Fontaine . Ce langage nouveau » qui fait parler le Loup et rĂ©pondre lâAgneau », est un poĂšme-relation que la rĂ©citation a peut-ĂȘtre plus rĂ©ussi Ă entendre que ne le font certaines activitĂ©s pĂ©dagogiques portĂ©es sur la versification ou lâargumentation quâAnne-Marie Malazeyrat 1996 juge avec raison rĂ©ducteurs. DĂ©montrer la polyphonie narrative » permet certes de prendre conscience de lâĂ©cart » quâinstaure lâĂ©criture de La Fontaine avec la formule attendue, avec les rĂšgles traditionnelles du genre », avec la parole figĂ©e ». Mais cela revient Ă rĂ©duire le rĂ©citatif de la tenue rĂ©ciproque du corps et du langage, du langage et de la sociĂ©tĂ©, Ă une mise en scĂšne de la parole des personnages » puis du narrateur » Mazaleyrat, 1996 alors que câest le rĂ©citatif continu dâune voix-relation qui lâemporte sur la reprĂ©sentation de voix. Le théùtre est dans la voix et non lâinverse, tout comme la performance est dans la formulette et non lâinverse. Par consĂ©quent, la rĂ©citation scolaire, dans son aveuglement mĂȘme, son approche peu littĂ©raire » qui laisse bien des Ă©coliers » seulement entrevoir quelque chose de La Cigale et la Fourmi ou du Corbeau et du Renard » ibid., a pu transmettre ce théùtre de la fable plus que son explication. Câest cette tenue dâun sujet-relation qui fait le poĂšme du langage. Il est dans cet ordinaire de la cour de rĂ©crĂ©ation et de la rĂ©citation en classe, ordinaire qui ne lâest donc plus. Et nos rituels de devenir alors extraordinaires tous les jours que lâon fait classe⊠Cette troisiĂšme catĂ©gorie de rituels ne doit pas nous bercer dâillusions et vise au contraire Ă nous mĂ©fier de ce que lâĂ©cole et certaines traditions culturelles voudraient parfois faire accroire soit la crĂ©ation poĂ©tique est innĂ©e, soit elle est apprise ! Dans le premier cas, elle est rĂ©servĂ©e Ă une catĂ©gorie de personnes les gĂ©nies ou Ă une pĂ©riode de la vie lâenfant-poĂšte » ; dans le second cas, elle peut sâenseigner par une transmission de techniques dâexpression ou de fabrication ateliers dâĂ©criture inspirĂ©s du modĂšle amĂ©ricain creative writing ou du modĂšle français OULIPO pour Ouvroir de LittĂ©rature Potentielle ou encore rhĂ©torique ancienne que les lycĂ©es du XIXe siĂšcle enseignaient avec leurs exercices dâimitation des Anciens. Ces deux versions de la crĂ©ation poĂ©tique sont les deux faces dâune mĂȘme conception qui sĂ©pare le poĂšme du langage sous lâappellation de langage poĂ©tique » opposĂ© au langage ordinaire » alors que le gĂ©nie poĂ©tique » est au cĆur de toute activitĂ© langagiĂšre tout au long de la vie tout comme on ne peut rĂ©duire aucun poĂšme Ă quelque procĂ©dĂ© que ce soit sous peine de sĂ©parer la dĂ©finition du poĂšme de sa valeur et la valeur du poĂšme de sa dĂ©finition. Avec les consĂ©quences qui sâen suivent relativisme subjectiviste ou dogmatisme traditionnaliste. Comme dit Henri Meschonnic 2006, p. 14 Alors, que fait un poĂšme ? Un poĂšme fait la poĂ©sie. Sinon il est refait par elle. Refait, dans tous les sens du mot. Et quâest-ce que câest ? Ce nâest pas raconter une histoire, ce nâest pas dire une vĂ©ritĂ©, la vĂ©ritĂ©, aucune vĂ©ritĂ©. Je ne vois pas autre chose qui reste sinon sâinventer langage, vivre sa vie, et une vie langage. Ces rituels ne viseront donc pas autre chose que dâintensifier lâactivitĂ© langagiĂšre pour quâon y augmente lâattention au langage. Car cette derniĂšre est certainement la condition de la crĂ©ation de poĂšmes, plus prĂ©cisĂ©ment la condition de crĂ©ation de moyens permettant quâon les Ă©coute, les poĂšmes, dans et par les activitĂ©s langagiĂšres, en lecture comme en Ă©criture, Ă lâoral comme Ă lâĂ©crit. De la notation rapide au journal au long cours Le fruit de lâexpĂ©rience mâa permis de dĂ©gager trois types dâexercice dans la composition du haĂŻku Ă©veiller les enfants au rĂŽle de chaque mot dans une phrase, les habituer Ă manipuler les mots, affiner leur sensibilitĂ© Ă lâĂ©gard des mots et de leur usage. Fujii Kunihiko, Composons des haĂŻku, 1989 [citĂ© par Alain Kervern, 1995, p. 113] On sait le succĂšs des haĂŻku dans lâenseignement lâĂ©criture courte a toujours eu bonne presse parce quâelle permettait de tenir dans le temps scolaire et dans le cahier des charges de lâenseignant corriger 25 expressions Ă©crites⊠et lâon sait que bien des ZEP ou lieux Ă©quivalents nâoffrent comme projet dâĂ©criture Ă leurs Ă©lĂšves que ces carnets de haĂŻku » qui permettent de donner de la place Ă tous » et dâacculturer avec presque rien⊠MalgrĂ© ces critiques que dâaucuns trouveront rapides et faciles, gardons toutefois de ces expĂ©riences largement connues et explorĂ©es ce qui en constitue le plus grand intĂ©rĂȘt, lâĂ©criture de notations rapides, et ajoutons leur ce qui souvent leur manque une temporalitĂ© adĂ©quate et un travail de la reprise et du montage. Dans un premier temps, il semble tout Ă fait judicieux de faire noter rituellement des brĂšves â remarques, citations, notations sur le vif⊠â qui, dâune part, sâaccumulent lâintĂ©rĂȘt de ces brĂšves consiste dâabord Ă rendre disponible rapidement une certaine quantitĂ© pour la réécriture et, dâautre part, entraĂźnent une dextĂ©ritĂ© de la prise de notes comme pour tous les projets dâĂ©criture dans les classes, il est nĂ©cessaire de penser leur durĂ©e qui doit Ă la fois ne pas ĂȘtre trop longue mais assurer assez de possibilitĂ©s de reprise. Dans un second temps, lâactivitĂ© dâĂ©criture se transforme en celle de lecture, de relecture et surtout de sĂ©lection et de montage, voire dâillustration et dâĂ©dition, sans pour autant viser quoi que ce soit dâambitieux si ce nâest de se constituer un parcours qui montrerait une histoire, ne serait-ce que lâhistoire de cette activitĂ© de prises, au quotidien ou presque, sur le rĂ©el. La justification dâune telle activitĂ© est plus Ă rechercher par le moyen dâun support et dâun moment adĂ©quats quâĂ initier par une connaissance de la tradition japonaise ce qui me paraĂźt soit irrĂ©alisable avec de jeunes enfants et de moins jeunes apprenants !, soit dĂ©magogique et dâun exotisme de trĂšs mauvais goĂ»t car les haĂŻku constituent certes une tradition populaire au Japon mais on oublie souvent que leur dimension savante est extrĂȘmement rigoureuse sans parler de la prĂ©gnance dâune dimension Ă©rotique si ce nâest vulgaire⊠qui en fait tout le charme si ce nâest le sel. On comprendra alors quâil est plus sain, non seulement pour les enfants mais pour lâenseignant qui alors ne se joue pas dâun pseudo-savoir transmissif, de proposer de noter des bribes de rĂ©el sensations, visions, Ă©vocations voire citations en utilisant la page dâun carnet minuscule afin de favoriser lâagrandissement de la bribe ou de la brĂšve Ă la dimension de la page lui confĂ©rant ainsi une unitĂ© formelle mais Ă©galement temporelle immĂ©diate tout en la situant dans une opĂ©ration dâaccumulation â ce qui permet Ă la fois de rester sec un jour pour devenir disert un autre jour et surtout ce qui permet que les bribes sâenchaĂźnent les unes les autres sans forcĂ©ment suivre la mĂȘme logique, le mĂȘme thĂšme⊠Il y a lĂ des libertĂ©s et des nĂ©cessitĂ©s hasardeuses ! qui sont au principe dâune telle activitĂ© qui paradoxalement retrouvera alors lâesprit de la tradition japonaise, sachant bien que cette derniĂšre nâest pas homogĂšne et quâelle est trĂšs ancienne⊠et donc diverse historiquement. Ce rituel de la notation sur le vif peut se construire avec des consignes rĂ©pĂ©tĂ©es Ă satiĂ©tĂ© au moins une dizaine de fois et toujours assez simples â notez ce que vous avez vu en sortant de chez vous⊠â notez les paroles entendues Ă la rĂ©crĂ©ation⊠â notez la mĂ©tĂ©o du jour dans une acception trĂšs large, on peut noter les humeurs et autres sentiments du moment⊠â etc. Ce rituel peut alors se transformer progressivement en un jeu collectif petits groupes dâabord pendant lequel les participants enchaĂźnent leurs notations brĂšves comme dans un dĂ©fi, une joute verbale en lâoccurrence Ă©crite. Il serait judicieux alors que les Ă©lĂšves puisent dans leur stock de notations pour venir rĂ©pondre aux brĂšves lancĂ©es par leurs camarades. En groupe de 4, les Ă©lĂšves proposent une sĂ©rie enchaĂźnĂ©e de 12 notations en puisant dans leurs carnets puis les proposent Ă la classe oralement en prenant la parole chaque fois quâil sâagit de leur notation. En groupes plus importants, les Ă©lĂšves vont Ă©crire sur une grande affiche une notation qui vient rĂ©pondre aux prĂ©cĂ©dentes⊠Le principe du jeu doit mĂȘler le dĂ©fi et la participation de tous. En conclusion, ces notations ne prennent saveur quâau long cours. De la citation au collage Nous avons dĂ©jĂ Ă©voquĂ© lâactivitĂ© de notations et de diction de citations, donc de brefs fragments pris aux textes poĂ©tiques voire Ă dâautres textes ; aussi, il sâagirait de suggĂ©rer aux Ă©lĂšves de poursuivre cette activitĂ© de notations jusquâau montage-collage de nombreuses citations quâon appelait centon » Le terme dĂ©signe un texte en vers ou en prose dont les fragments sont empruntĂ©s Ă divers auteurs ou Ă diverses Ćuvres dâun mĂȘme auteur Demougin, 1985. Ces mĂ©langes qui introduisent pratiquement Ă lâanthologie nous y revenons bientĂŽt nâont pas pour objectif de prĂ©senter un simple ensemble de citations mais bien un texte cohĂ©rent, du moins dont le continu est perceptible â ce qui nâexclut pas des sauts et gambades », comme disait Montaigne de son Ă©criture. Ces rituels peuvent se contenter de crĂ©er non des poĂšmes mais bien plutĂŽt des ensembles qui, de la liste Ă©criture en lignes au texte continu Ă©criture en prose, permet de dĂ©couvrir par lâĂ©criture les traits saillants dâune recherche du poĂšme ce qui coupe / ce qui enchaĂźne ; ce qui reprend / ce qui perturbe ; ce qui sâallie / ce qui dĂ©sunit ; ce qui accentue / ce qui fond ; ce qui annonce / ce qui rĂ©pond ; ce qui accompagne / ce qui sĂ©pare ; ce qui se retranche / ce qui sâaffirme ; ce qui ralentit / ce qui accĂ©lĂšre ; ce qui ouvre / ce qui ferme ; etc. Bref, autant de catĂ©gories discursives qui font entendre du poĂšme dans et par une activitĂ© de reprise multiple. De lâimitation Ă la crĂ©ation Continuer CĂ©zanne est impossible. On ne peut le continuer que par de tout autres chemins. Ernest Pignon 1966 Mais nous savons que la tradition scolaire qui prend sa source dans les anciens exercices de rhĂ©torique tout comme dans certaines pratiques des ateliers dâĂ©criture, prĂ©conise lâactivitĂ© dâimitation pour produire » des textes dits poĂ©tiques en vertu de procĂ©dĂ©s de fabrication qui garantirait le label de poĂ©ticité⊠La littĂ©rature didactique et pĂ©dagogique sur la question naturalise cette activitĂ© en confondant procĂ©dĂ© ou technique dâĂ©criture et valeur poĂ©tique mĂȘme si lâintitulĂ© de tels exercices » dâimitation est plus que suggestif et engage bien autre chose que lâapplication de procĂ©dĂ©s Ă la maniĂšre de ». Câest que la maniĂšre » est un concept qui fait problĂšme est-ce seulement une affaire de main », un savoir faire transmissible, dâautant plus rĂ©duit Ă un tour de main » le plus souvent ! Non ! Nous savons bien que la maniĂšre conceptualisĂ©e dans le domaine pictural Ă lâĂ©poque classique rentre en concurrence dans le domaine littĂ©raire avec la notion de style, laquelle nâest pas moins problĂ©matique puisque le concept semble se confondre avec lâindividu quand, ailleurs, on sait que le style fait la caractĂ©ristique dâune Ă©poque, dâune Ă©cole, dâune sĂ©rie de fauteuils, etc., bref dâun collectif, dâun passage Ă lâanonyme. Câest pourquoi GĂ©rard Dessons a rĂ©introduit le concept de maniĂšre dans lâattention au poĂšme pour lui donner sa force conceptuelle de prise sur lâactivitĂ© subjective au cĆur du langage et des discours. Câest justement en considĂ©rant la maniĂšre comme ce qui permet que, par le langage comme aventure du dire, lâexpĂ©rience dâun seul devient lâexpĂ©rience de tous » Dessons, 2004, p. 380. Ce que pose Dessons, câest que la maniĂšre est un opĂ©rateur relationnel qui oblige chacun Ă trouver son rythme et non, Ă la diffĂ©rence du pastiche, de la parodie ou de la caricature, par exemple, de dissoudre le transubjectif dans une rĂ©pĂ©tition dâobjet et/ou de sujet qui achĂšve lâĆuvre dans ses dĂ©tails, dans ses tics, dans ses signes quand la maniĂšre engage Ă la continuer dans et par sa réénonciation. Aussi, sâagirait-il de travailler Ă des copies qui ne sont pas, Ă proprement parler, des copies » Octave Mirbeau dans Nathalie Heinich, 1991, p. 226, câest-Ă -dire de continuer la maniĂšre dâune Ćuvre plutĂŽt que de la rĂ©pĂ©ter, selon la formulation de Dessons p. 267. Jean-Claude Touzeil, Maud legrand ill., Parfois, Coll. Le farfadet bleu », ChaillĂ©-sous-les-Ormeaux, LâIdĂ©e Bleue, 2004, p. 20-21 Parfois, geai zĂ©ro phote an ortografe. oui, je lâai relu trois fois avant de comprendre!!! DĂ©cidĂ©ment, je ne suis pas encore habituĂ©e au langage SMS⊠Parfois, Tintin rejoint Titeuf au âBar des Bullesâ pour taper le carton avec ObĂ©lix et les frĂšres Dalton. jâimagine bien la scĂšne, au PrĂ©-en-Bulles, un bar de ma ville⊠Parfois, lâavenir du futur antĂ©rieur me semble problĂ©matique. Ă moi aussi⊠câest quoi dâailleurs? Parfois, Ă Ixelles Belgique, on ne trouve plus que des grandes tailles. va falloir que jâaille y faire un tour ^^ Le livre de poĂšmes de Jean-Claude Touzeil illustrĂ© par Maud Legrand, Parfois 2004, semble proposer une mĂȘme formule rĂ©pĂ©titive dâengendrement poĂ©tique » du dĂ©but Ă la fin du livre puisquâil est constituĂ© dâune litanie de propositions quâouvre lâadverbe parfois ». Mais, dâune part, lâillustration qui met deux blocs colorĂ©s face Ă face les anime de petits personnages qui progressivement dĂ©veloppent une Ă©popĂ©e minuscule et mystĂ©rieuse et, dâautre part, la litanie construit des registres thĂ©matiques, des parallĂ©lismes, des Ă©chos aussi variĂ©s quâinattendus. Bref, la rĂ©pĂ©tition se fait rythme du texte Ă lâimage et de fragments en fragments. Ce que chaque page, mĂȘme sans illustration, impose par son organisation en quatre propositions comme les quatre points cardinaux du sens en mouvement, une girouette au vent toujours changeant⊠Contentons-nous dâobserver ces deux pages 20 et 21 si les jeux de mots ou approximations nous mettent sur la piste dâun procĂ©dĂ© unitaire, un fragment la rose des sables » nây concourt pas et donc dĂ©fait cette premiĂšre rĂ©duction possible de la litanie Ă la rĂ©itĂ©ration dâun procĂ©dĂ© unique ; la structure syntaxique de la proposition est Ă©galement trois fois identique syntagme nominal+groupe verbal mais la premiĂšre proposition commence par un impersonnel ; trois propositions font deux lignes mais la quatriĂšme se contente dâune ligne ; etc. La litanie est donc plus un montage de propositions, souvent mais pas forcĂ©ment analogues par un de leur aspect. Ces propositions visent dâabord Ă construire un souffle ininterrompue de remarques certes hĂ©tĂ©roclites mais qui progressivement font entendre une maniĂšre de voir, de sentir, de vivre le monde, la pensĂ©e et le langage. Cette maniĂšre devient alors inimitable. Aussi, que reste-t-il Ă faire sous peine de rĂ©duire ce souffle Ă quelques procĂ©dĂ©s au souffle court, voire au souffle coupĂ© qui enterrerait la maniĂšre de Touzeil et celle du livre, donc aussi lâĂ©popĂ©e de lâillustration⊠? Il reste Ă continuer cette maniĂšre, Ă inventer si ce nâest avec des lanceurs du type de parfois », du moins avec des observations qui trouvent en mĂȘme temps quâelles se poursuivent un chemin pour une pensĂ©e qui se trouve dans le jeu de langage. Il nây a pas de recettes⊠pour passer de lâimitation Ă la crĂ©ation car, pas seulement parfois » mais toujours, faire la doublure / en retournant sa veste est une autre paire de manches » Touzeil, 2004, p. 43 Vous voyez, je ne nomme pas avant que de faire. Si on savait, si on savait, on ne serait pas lĂ dâabord. Câest lâimmense part dâinconnu ! Quand on parle de signe, on entre dans le connu ! Il y aurait une connaissance avant que fĂ»t le savoir. Pierre Tal-Coat 2007, p. 22, p. 27, p. 76 Les poĂšmes nâexistent pas hors du livre, plus prĂ©cisĂ©ment, les poĂšmes sont Ă©ditĂ©s et ces Ă©ditions les proposent trĂšs souvent avec un accompagnement artistique de type graphique ou plastique. Câest Ă cette dimension que dâautres rituels peuvent sâattacher sans que cela ne demande Ă proprement parler dâexplications autres quâune frĂ©quentation ouverte Ă toutes les sollicitations. Donner Ă lâillustration sa force premiĂšre de rendre illustre, de faire briller, et donc de faire mieux entendre le poĂšme en le voyant mieux, puis donner toute leur valeur dâopĂ©rateurs poĂ©tiques Ă tout ce qui concoure Ă lâĂ©dition dont lâillustration mais Ă©galement la mise en page, la typographie, etc., câest tenter de trouver des activitĂ©s rĂ©guliĂšres qui font aller plus vite au cĆur du livre de poĂšmes, au cĆur de la lecture. De lâillustration Ă lâĂ©dition Parfois, le poĂšme voudrait changer de page. Jean-Claude Touzeil 2004 Merci Ă Marie-Therese Cuenat Lâhabitude scolaire de recopier des poĂšmes peut-ĂȘtre considĂ©rĂ©e de deux façons soit il sâagit dâoccuper les Ă©lĂšves et de leur demander de recopier tel texte poĂ©tique en pariant sur le fait quâils ne perdent pas leur temps Ă recopier un beau texte » dâautant plus que la poĂ©sie Ă©tant ce quâelle est et les Ă©lĂšves aussi, il vaut mieux ne pas se faire dâillusion et assurer les compĂ©tences de base manuscrites et orthographiques avant dâenvisager autre chose⊠soit il sâagit de considĂ©rer une telle activitĂ© comme une vĂ©ritable activitĂ© intellectuelle non dĂ©nuĂ©e de sensations qui touchent Ă une physique de la lecture ainsi que Walter Benjamin le signalait avec beaucoup dâhumour dans un beau texte Objets de Chine » dont je retiens lâextrait suivant La force dâune route de campagne est autre, selon quâon la parcourt Ă pied, ou quâon la survole en aĂ©roplane. La force dâun texte est autre Ă©galement, selon quâon le lit ou quâon le copie. Qui vole voit seulement la route sâavancer Ă travers le paysage elle se dĂ©roule Ă ses yeux selon les mĂȘmes lois que le terrain qui lâentoure. Seul celui qui va sur cette route apprend quelque chose de sa puissance, et apprend comment, de cet espace qui nâest pour lâaviateur quâune plaine dĂ©ployĂ©e, elle fait sortir, Ă chacun de ses tournants, des lointains, des belvĂ©dĂšres, des clairiĂšres, des perspectives, comme lâordre dâun commandant qui fait sortir des soldats du rang. Il nây a que le texte copiĂ© pour commander ainsi Ă lâĂąme de celui qui travaille sur lui, tandis que le simple lecteur ne dĂ©couvre jamais les nouvelles perspectives de son intĂ©rioritĂ©, telles que les ouvre le texte, route qui traverse cette forĂȘt primitive en nous-mĂȘmes, qui va toujours sâĂ©paississant car le lecteur obĂ©it au mouvement de son moi dans lâespace libre de la rĂȘverie, tandis que celui qui copie le soumet Ă une discipline. Aussi lâart chinois de copier les livres fut-il la garantie incomparable dâune culture littĂ©raire, et la copie une clĂ© pour les Ă©nigmes de la Chine. Benjamin, 1950, 115-116 Demander rĂ©guliĂšrement de copier des poĂšmes pour les lire demande de laisser les Ă©lĂšves effectuer ce travail Ă leur guise, câest-Ă -dire en leur donnant le temps Ă lâissue de lâactivitĂ© dâĂ©changer rapidement sur leurs pratiques de la copie. Cela constitue un rituel de lecture extrĂȘmement consĂ©quent si lâon y rĂ©flĂ©chit bien. Dâautant plus quâen poursuivant la proposition de Walter Benjamin et se rappelant du fait que les chinois calligraphient, on peut suggĂ©rer aux Ă©lĂšves de dessiner au cĆur mĂȘme de leur activitĂ© de copie. PlutĂŽt que de sĂ©parer le dessin et la copie comme le faisait le cahier de poĂ©sies traditionnel, il serait judicieux dâengager les Ă©lĂšves Ă dessiner en mĂȘme temps quâils copient. Non pour tout confondre, encore quâun continu de la pensĂ©e du lecteur peut sây inscrire, mais pour donner prendre le temps de la lecture. Ajoutons que la pratique dâĂ©criture de bon nombre de poĂštes associent dĂšs le manuscrit ou dans des pratiques de prise de notes diverses, dessin et Ă©criture. On verra ci-dessous que le dessin peut se prolonger voire disparaĂźtre au profit du collage. Pour commencer de tels rituels, il est nĂ©cessaire de lancer des activitĂ©s trĂšs rĂ©guliĂšres de copie » qui convoquent des poĂšmes » ou plutĂŽt des extraits de poĂšmes trĂšs courts. Par exemple, la lecture magistrale ou par des Ă©lĂšves dâun poĂšme peut ĂȘtre suivie immĂ©diatement par le copiage dâun extrait soit imposĂ© soit libre de ce poĂšme. Un petit carnet de lecture â servant par ailleurs Ă dâautres activitĂ©s â ou plus simplement le cahier du jour, peuvent servir Ă cette activitĂ© qui ne dure pas plus de cinq Ă dix minutes. Des reprises sont toujours possibles en vue dâune Ă©dition de copies »⊠en utilisant, par exemple, la photocopie ! Mais alors, le montage va intervenir. On y revient plus loin. Il faudrait particuliĂšrement rĂ©server cette activitĂ© de copie aux poĂšmes » car câest avec de tels textes que vont se rencontrer un certain nombre de problĂšmes de lecture et dâĂ©criture et donc se construire des problĂ©matisations et conceptualisations importantes et dĂ©cisives pour tout lecteur. Le plus important â et peut-ĂȘtre le premier dans la genĂšse de lâĂ©criture et de la lecture â est celui de la justification qui ne peut se rĂ©duire Ă un vulgaire code typographique quand il sâagit de faire sens, de donner vie. La manipulation par la copie, quâelle soit manuscrite ou tapuscrite jusquâau traitement de texte, demande de penser lâĂ©criture dans son activitĂ© quasiment physique comme invention de son espace en mĂȘme temps que de sa temporalitĂ©, de son continu en mĂȘme temps que de ses discontinuitĂ©s, de sa volubilitĂ© en mĂȘme temps que de ses silences, etc. Les questions naĂŻves des jeunes Ă©lĂšves copiant un texte sont des questions fondamentales de lecture pourquoi, comment aller Ă la ligne ? », pourquoi, comment couper un mot ? », pourquoi, comment des majuscules, des signes de ponctuation⊠? » pourquoi, comment disposer dans la page ? », etc. Tenant compte de ces objectifs et des possibilitĂ©s dâaccorder toute son importance Ă lâactivitĂ© de copie de poĂšmes voire, de prĂ©fĂ©rence, dâextraits choisis de poĂšmes, il paraĂźt judicieux de continuer Ă utiliser le cahier de poĂ©sie. Cela demande alors de le transformer de deux points de vue varier son format et surtout ne plus opposer texte et illustration en recherchant des formes libres dâassociation et en laissant sâaccumuler des essais de copie mĂȘlant Ă©crits et dessins. NĂ©cessairement, les enseignants et peut-ĂȘtre les parents demanderont alors Ă vĂ©rifier ces copies » de poĂšmes mais dans un premier temps il semble prĂ©fĂ©rable dây attacher de lâattention et de les relire ensemble ou, mieux, dây consacrer de courts moments pour voir ce qui a Ă©tĂ© fait, ce qui est nouveau⊠et les erreurs de copie se corrigeront dâelles-mĂȘmes puisque le seul moyen de vĂ©rification est de repartir de lâoriginal, de lâĂ©dition officielle » du poĂšme en vue de cette Ă©dition personnelle quâest sa copie. Du collage au montage Une autre modĂšle du rituel pour illustrer avec les poĂšmes demande de donner toute sa place Ă lâactivitĂ© de collage. Comme dit Michel Butor, dans le collage, les mots ne sont plus quelque chose que lâon trace, mais que lâon trouve » Butor, 1974, p. 88. Si Butor parle des collages de fragments dâimprimĂ©s, on peut gĂ©nĂ©raliser sa proposition Ă©galement Ă tous les types de collage matiĂšres, couleurs, illustrations diverses et bien Ă©videmment morceaux de textes imprimĂ©s ou manuscrits car le collage demande, aprĂšs voire au cours de sa rĂ©alisation, dâengager une parole qui construit une lecture. Cette parole prendra forcĂ©ment appui sur les rapports qui peuvent apparaĂźtre entre la lecture premiĂšre du poĂšme ou fragment de poĂšme qui prĂ©cĂšde le poĂšme et la lecture seconde qui voit se superposer ou se juxtaposer collage et poĂšme. Prenons quelques exemples qui donnent matiĂšre Ă ces activitĂ©s de collage lire un poĂšme, ou rĂ©pĂ©tons-le une derniĂšre fois, un fragment de ce poĂšme, Ă cĂŽtĂ© de papiers de couleur dĂ©chirĂ©s ou dĂ©coupĂ©s qui viennent lâaccompagner observer alors les diffĂ©rences de lecture selon les accompagnements colorĂ©s et ne coller les papiers quâune fois lâexpĂ©rience conduite aprĂšs plusieurs essais ; rĂ©aliser le mĂȘme genre dâexpĂ©rience avec des papiers transparents en variant les couleurs, les formes, les superpositions, finir par une proposition ; prendre dans une banque dâimages de reproductions dâĆuvres ou de photographies paysages, portraits,objets⊠et essayer des combinaisons avec le poĂšme coller aprĂšs avoir effectuer si nĂ©cessaire des prĂ©lĂšvements, des superpositions⊠Si ces activitĂ©s avec bien dâautres variantes peuvent se rĂ©aliser dans le traditionnel cahier de poĂ©sies, elles peuvent Ă©galement en sortir et sâouvrir Ă des boĂźtes de poĂ©sies qui feront place Ă des objets â sâinspirant , par exemple, des boĂźtes de Joseph Cornell, autant quâĂ des papiers pour que la lecture alors prenne la troisiĂšme dimension sans hĂ©siter ! Mais avec le montage, câest vers la quatriĂšme dimension que les Ă©lĂšves vont alors se diriger⊠Joseph Cornell Navigating the Imagination Pour concrĂ©tiser cette activitĂ©, nous allons observer un ouvrage publiĂ© dans la collection Le farfadet bleu ». Au-delĂ , une observation de plusieurs ouvrages de cette collection permettrait dâailleurs aux Ă©lĂšves de trouver par eux-mĂȘmes des idĂ©es de montage avec les poĂšmes et les images⊠Le Capitaine des myrtilles de Daniel Biga est accompagnĂ© par un carnet de dessins » p. 25 Ă 34 rĂ©alisĂ© par KĂ©lig Hayel. Les 29 poĂšmes de Biga qui font comme une courte anthologie de son Ćuvre pour ses jeunes lecteurs puisquâils ont Ă©tĂ© pris Ă trois ouvrages antĂ©rieurs, sont parfois annotĂ©s dâun renvoi au carnet de dessin. Ce livre propose donc un montage Ă©tonnant un ensemble de poĂšmes et un carnet de dessin avec un systĂšme de renvois des uns aux autres ! Mais si lâon observe de plus prĂšs ce dispositif, on voit que câest lâĂ©criture de Biga qui lâa suggĂ©rĂ©. Le poĂšme qui suit est prĂ©cĂ©dĂ© de la mention manuscrite dessin du carnet ». PAYSAGE RAPIĂCĂ haies de cyprĂšs de saules de peupliers longues et hautes allĂ©es de domaines inconnus chemins terreux route de goudron limites de champs et vignobles ruisseaux serpentins bordĂ©es de forĂȘts de cannes talus frontaliers enchevĂȘtrĂ©s de garrigues lambeaux campagnards bourrelets cicatrices hachĂ© coupĂ© retaillĂ© bordĂ© surfilĂ© patchwork multiples coutures reprises du paysage image Ă venir Ce poĂšme et ce dessin quâil faut donc associer en tournant les pages du livre nous font faire ce quâils font et ce quâils disent quâils font rapiĂ©cer » ! Mais ce montage qui est un travail de reprise par les bordures, les enchevĂȘtrements, les cicatrices, le surfilage et les coutures, lie dans un continu le texte Ă lâimage, le propos Ă la maniĂšre, le rythme au sujet. Aussi, le paysage nâest plus une description statique mais un mouvement de va-et-vient qui ne cesse de tisser une voix autant quâun regard, une expĂ©rience autant quâune pensĂ©e. Pour encore mieux prĂ©ciser la dĂ©marche ici proposĂ©e avec les Ă©lĂšves, il sâagit bien de considĂ©rer lâactivitĂ© dâĂ©criture de listes voir nos sĂ©quences avec un livre de poĂšmes et la premiĂšre activitĂ© proposĂ©e liste lexicale hiĂ©rarchisĂ©e comme une vĂ©ritable activitĂ© dâĂ©criture. Ici, lâĂ©criture de listes inclut la prise dâĂ©lĂ©ments graphiques et illustratifs, du moins nâhĂ©site pas Ă passer des uns aux autres. Quand la collection a Ă©tĂ© plus ou moins rĂ©alisĂ©e, les Ă©lĂšves sont amenĂ©s Ă la prĂ©senter et donc Ă effectuer un montage. Ce montage peut sâeffectuer linĂ©airement comme fait Daniel Biga dans son poĂšme â ce qui correspond Ă lâactivitĂ© de hiĂ©rarchisation prĂ©cĂ©demment proposĂ©e â ou tabulairement comme fait KĂ©lig Hayel pour son dessin d ». Ce tableau » est en effet concentrique par son organisation signifiante collage concentrique de fragments de dessins, pastels grattĂ©s et encres » autour de reproductions dĂ©coupĂ©es de papillons venant elles-mĂȘmes entourer une liste de ces mĂȘmes papillons â ces derniers ayant Ă©tĂ© pris Ă un manuel » ou guide » naturaliste. Il faut toutefois ajouter que cette organisation concentrique est perturbĂ©e puisquâelle est orientĂ©e vers le coin supĂ©rieur droite de la double-page et que les dessins » noirs y concourent par leur disposition. Un peu comme la liste hiĂ©rarchisĂ©e des Ă©lĂ©ments du paysage rapiĂ©cĂ© » de Daniel Biga est lancĂ©e par le syntagme haies de cyprĂšs » qui met le lecteur au cĆur si prĂšs ! de ce qui organise ce poĂšme-paysage ses coutures ». De ce principe dĂ©sorganisateur, le poĂšme fait une orientation qui paradoxalement construit un continu dans et par la fragmentation haies de cyprĂšs-de saules-de peupliers » oĂč dĂšs la premiĂšre ligne nous lisons cette accumulation apparemment hĂ©tĂ©roclite puisque chaque fragment est une reprise du paysage » . Le continu du poĂšme puise son principe dans lâexigence du continu du microcosme au macrocosme et de lâextĂ©rieur Ă lâintĂ©rieur, que la voix du poĂšme rĂ©alise. Il ne faudrait surtout pas perdre ces moments qui permettent Ă la classe de continuer Ă apprendre sans se soucier dâobjectifs Ă atteindre, de savoirs prĂ©cis Ă trouver, de dĂ©marches Ă contrĂŽler⊠Ces moments ritualisĂ©s sont comme bien des moments de la vie, ceux oĂč lâon fait sans trop savoir ce que lâon fait mais en sachant bien quâon le fait bref, ce sont des moments dâĂ©coute ou de diction flottante, de lecture Ă vue et dâĂ©criture au fil de la plume parce quâon se laisse aller dans un cadre ritualisĂ© qui assure quâon en reviendra sain et sauf et mĂȘme ragaillardi, rĂ©joui, et pourquoi pas reposĂ© aussi. Ces rituels sont gĂ©nĂ©ralement courts certains les ont appelĂ©s gouttes de poĂ©sie » mais une tornade ne peut prendre que quelques instants et le goutte-Ă -goutte est souvent le dernier remĂšde avant lâextinction ! Alors de la minute qui vient comme ponctuer les autres activitĂ©s scolaires Ă ce petit moment rĂ©gulier quâon retrouve tous les jours ou tous les deux jours et qui nous met tous ensemble pour entamer une activitĂ© sĂ©rieuse ou au contraire boucler une activitĂ© qui manque de sĂ©rieux⊠de la minute au quart dâheure, on peut trouver une variĂ©tĂ© de rituels qui mettent les poĂšmes au diapason des habitudes toujours vives et pas forcĂ©ment empĂȘtrĂ©es dans la morositĂ©, les mauvaises habitudes ou les facilitĂ©s occupationnelles. Rituels pour rĂ©citer les poĂšmes Le souci Et pour qui sont ces six soucis ? Ces six soucis sont pour mĂ©moire. Ne froncez pas les sourcils Ne faites donc pas une histoire, Mais souriez, car vous aussi, Vous aussi aurez des soucis. Robert Desnos 1991, p. 42. De la rĂ©citation au rĂ©citatif Le rituel le plus rĂ©pandu dans lâĂ©cole câest la rĂ©citation qui est Ă la fois un exercice trĂšs ancien et progressivement rĂ©duit Ă lâinstrumentalisation de la poĂ©sie. On aurait tendance aujourdâhui Ă le vouer aux gĂ©monies. Pourquoi ne pas le garder en lui redonnant ses lettres de noblesse, peut-ĂȘtre mĂȘme en le rĂ©inventant ! Par exemple, la rĂ©citation pourrait sâinspirer de cet extrait du théùtre de ValĂšre Novarina 1997, p. 142-144 Lâenfant dâoutrebref Vous nâavez plus que cinquante-huit phrases Ă dire. La figure pauvre En tout et pour tout ? Le plancher est ; la pluie coule Ă verse ; jâai passĂ© les tuyaux au ZĂšbracier ; jâai dĂ©placĂ© sur ma table les galets tĂ©moins ; de plus en plus de personnes en moi, ou hors de moi, disent quâelles ont froid aux pattes ; le soleil luit aujourdâhui ; jâirai faire un tour chez les vĂ©nĂ©naux ; puis je me lĂšverai matin ; bĂ©nis ceux dont les langages me parlent dans la tĂȘte ; bĂ©nie soit la vie qui nous Ă©chappe ; ombre verte est lâombre verte ; je vais balayer. » Lâenfant traversant Encore trois cent quatre-vingt-neuf mots. La figure pauvre [âŠ] Lâenfant traversant Trois-cent vingt et un. La figure pauvre Par la fenĂȘtre, on voit un groupe de sapins ; un sapin isolĂ© Ă double tronc ; une maison en ruine avec des poutres ; une haie dâorties ; une prairie dâherbes avec des chardons ; les sapins vert sombre ou bleu sombre, vert-bleu sombre ; les sapins toujours lĂ sombrement ; une colline bleue ou bleu-gris ; le ciel trĂšs-trĂšs-trĂšs blanc au-dessus du bas de la colline ; le ciel un peu plus bleu au-dessus ; des rojales oyu Ă©pilobes au milieu des orties. â Nom des herbes, dire le nom des herbes ! â Je peux encore dire le nom des herbes ? Lâenfant traversant Dites le nom des herbes que vous savez ! La figure pauvre La tramine, lâĂ©pieuse, le lactis, les foliacĂ©es, lâĂ©grangette, la bardane, lâĂ©pilobe, la prĂȘle, la fĂ©tuque, la brize, le dactyle, le vulpin, le scirpe, la laĂźche, la luzule, le colchique, le narcisse, lâiris, lâoseille, le mĂ©landre, le coucou, lâĆillet, le caltha, le trolle, la renoncule, la cardamine, la parnassie, lâansĂ©rine, la benoĂźte des ruisseaux, la valĂ©riane, la succise, la scabieuse, le coult, la campanule, la marguerite, lâarnica, le sĂ©neçon, la carline, le salsifis, le pissenlit, la chicorĂ©e sauvage, la piloselle, la folle avoine, le muscari, la tulipe sauvage, la petite oseille, la renouĂ©e, la dauphinelle, lâadonide, le pavot, le coquelicot, le fumeterre, le sĂ©nevĂ©, la ravenelle, le bec de grue, lâeuphorbe, la pensĂ©e, le liseron, la morgeline, le lamier, la galĂ©opse, la menthe, la mĂ©lampyre, la niĂšble, la matricaire, lâanthĂ©mide, la centaurĂ©e, le laiteron, le cirse. Nâavoir que 58 phrases Ă dire, que 389 mots ou encore dire le nom des herbes que lâon sait⊠autant de pistes de rĂ©citation ! Quâest-ce Ă dire ? Quâil sâagit de rĂ©citer des listes qui ne sont pas seulement nominales, de maniĂšre adĂ©quate au niveau ou aux finalitĂ©s que lâon se donne un rĂ©citant et un chĆur qui reprend â le rĂ©citant pouvant ĂȘtre lâenseignant, le chĆur pouvant ĂȘtre la classe ou de petits groupes qui rĂ©citent alternativement⊠des listes ; un ou plusieurs Ă©lĂšves lisent des listes dans un premier temps puis progressivement emportĂ©s par la rĂ©citation se mettent Ă improviser des suites de listes ou des listes nouvelles⊠Ces rĂ©citations nâont pas pour objectif premier de bien lire, de bien articuler, de bien exprimer ces listes mais de faire passer des fragments certes sensĂ©s dâun discours qui nâa de tenue que par sa profĂ©ration, son passage en bouches â voire en boucles â exactement comme les ritournelles enfantines qui dâailleurs peuvent ĂȘtre pour les plus petits lâoccasion de rĂ©citations semblables. Ces rĂ©citations habituent Ă mettre le corps dans des dispositions libres pour que les textes prennent voix indĂ©pendamment des volontĂ©s et autres stratĂ©gies dâarraisonnement Ă des fins trop rĂ©flĂ©chies. Il sâagit de faire venir lâĂ©nergie discursive proche de la volubilitĂ© des parleurs engagĂ©s dans des conversations passionnantes des enfants qui parlent pour parler, par exemple comme font bien des adultes au tĂ©lĂ©phone ou au cafĂ© voire dans les soirĂ©es mondaines dont lâart, rappelons-le, est de tenir la conversation coĂ»te que coĂ»te⊠Quand la rĂ©citation de listes acquiert cette volubilitĂ©, elle peut alors facilement sâĂ©tendre Ă nâimporte quel texte pour faire peut-ĂȘtre entendre son poĂšme câest-Ă -dire ce qui peut en faire un poĂšme, Ă©tant entendu que la volubilitĂ© entraĂźne tout le discours dans lâinconnu de la relation langagiĂšre. Câest un test excellent pour voir si un texte mis en bouche fait poĂšme. Et il faudrait autant sinon plus que par lâexplication tester les textes ainsi. Ce qui nâa rien Ă voir avec la diction théùtrale qui peu ou prou entre dans une culture qui surplombe le texte bien souvent ou avec la diction dite expressive qui vient comme confirmer la comprĂ©hension et lâinterprĂ©tation scolaires ou savantes. Les unes comme les autres ne rendront jamais tel texte de Henri Michaux 1963, p. 92-93 Ă son poĂšme autant quâune rĂ©citation-profĂ©ration. Dans la nuit Dans la nuit Dans la nuit Je me suis uni Ă la nuit Ă la nuit sans limites Ă la nuit. Mienne, belle, mienne. Nuit Nuit de naissance Qui mâemplit de mon cri De mes Ă©pis. Toi qui mâenvahis Qui fais houle houle Qui fais houle tout autour Et fumes, es fort dense Et mugis es la nuit. Nuit qui gĂźt, nuit implacable. Et sa fanfare, et sa plage Sa plage en haut, sa plage partout Sa plage boit, son poids est roi, et tout ploie sous lui Sous lui, sous plus tĂ©nu quâun fil Sous la nuit, La Nuit. Tous les poĂšmes de cet ensemble intitulĂ© PoĂšmes » â il y en a treize ! â peuvent ainsi ĂȘtre mis en bouche pour le seul enjeu de vivre leur volubilitĂ© qui fait le plein de poĂšmes. Celui qui figure ici â le neuviĂšme â commence par se rĂ©pĂ©ter pour ne plus arrĂȘter de se reprendre un peu comme sâil bĂ©gayait mais, plus quâune hĂ©sitation dans la diction, il sâagirait dâune insistance, dâun tournoiement, dâun abandon Ă cette nuit », Ă cette obscuritĂ© envahissante qui tient autant Ă sa prosodie quâĂ sa thĂ©matique, qui tient Ă sa voix Ă©blouissante. LâĂ©nergie discursive se trouve dans la diction qui se cherche en rĂ©pĂ©tant, en reprenant presque inlassablement jusquâĂ un certain Ă©puisement, un certain oubli du texte, de la situation mĂȘme⊠Câest que lâenjeu dâune telle activitĂ© consiste Ă faire venir jusquâĂ son Ă©coute lâinconnu dâun texte autant que lâinconnu de lâactivitĂ© elle-mĂȘme. La surprise est imprĂ©visible ; la trouvaille ne se maĂźtrise pas. De la citation Ă lâaction Ăcrire au tableau une phrase du jour ou, variante, faire Ă©crire aux Ă©lĂšves la phrase du jour sur une affiche qui accumule ainsi les phrases, extraits de proses et de vers⊠pour que chacun les recopie, les redise, les apprenne par cĆur on vĂ©rifie ces mĂ©morisations dans la journĂ©e, le lendemainâŠ, sachant bien que la sĂ©lection sâopĂ©rera dâelle-mĂȘme pour chacun mais aussi dans le groupe. Ce bon mot » du jour peut se voir reconsidĂ©rer de plusieurs maniĂšres le recopier, certes, mais en travaillant le graphisme sans, pour autant, faire calligramme de ce qui nâa pas Ă©tĂ© Ă©crit pour cela mais simplement pour dĂ©monter lâextrait, le montrer autrement, se lâapproprier La riviĂšre parfois tremble se noue pourtant jamais elle ne se retourne pour voir si on la suit. Alexandre Voisard dans Guy Goffette, 2003, p. 92 le contextualiser en lisant le contexte de lâextrait avant et/ou aprĂšs, en donnant les rĂ©fĂ©rences, en se documentant sur lâauteur, le thĂšme, les mots⊠Voulez-vous parlons dâautre chose Il y a des esprits moroses Des esquimaux des ecchymoses Louis Aragon, 2003, p. 72. lâafficher dans des lieux insolites dans la classe, dans lâĂ©cole pour que ces nouveaux contextes obligent Ă lire autrement, Ă inventer dâautres lectures, Ă trouver dâautres lecteurs tout lâintĂ©rĂȘt de cette activitĂ© câest aussi dâĂȘtre rĂ©guliĂšre jusque dans ses surprises mĂȘmes. Liste indicative de telles possibilitĂ©s souvent inspirĂ©es par Amandine Marembert dans Cahiers pĂ©dagogiques, n° 417, 2003, p. 37-38 corbeille de fruits poĂ©tiques Ă lâentrĂ©e de la classe, de lâĂ©cole fil Ă linge poĂ©tique dans le couloir self poĂ©tique un poĂšme sur le plateau du self le midi post-it poĂ©tiques sur les marches dâescalier, aux plafonds parapluie, parasols et paravents poĂ©tiques dans la BCD papillotes, boules et autres guirlandes poĂ©tiques dans lâarbre de la cour portes-clĂ©s, badges, tickets et autres petits matĂ©riels poĂ©tiques pour une fĂȘte de lâĂ©cole sms, timbres et enveloppes poĂ©tiques pendant une semaine de la poĂ©sie petites annonces poĂ©tiques sur le panneau des informations tracts poĂ©tiques la matin ou le soir avant ou aprĂšs les heures de classe fusĂ©es, avions et cerfs-volants poĂ©tiques etc. le jouer de multiples fois pour en tester la force en variant les dispositifs scĂ©niques ou vocaux La source tombait du rocher Goutte Ă goutte Ă la mer affreuse. LâOcĂ©an, fatal au nocher, Lui dit Que me veux-tu, pleureuse ? Je suis la tempĂȘte et lâeffroi ; Je finis oĂč le ciel commence. Est-ce que jâai besoin de toi, Petite, moi qui suis lâimmense ? » La source dit au gouffre amer Je te donne, sans bruit ni gloire, Ce qui te manque, ĂŽ vaste mer ! Une goutte dâeau, quâon peut boire. » Ce poĂšme de Hugo tirĂ© des Contemplations avril 1854 dans Hugo, 1973, p. 254 demanderait plus quâune mise en scĂšne dialogique qui dâailleurs dĂ©truirait la continuitĂ© de la voix du fabuliste. Il exige un long travail de variations sur un ou deux vers seulement, quels quâils soient. Dire de trĂšs nombreuses fois un ou deux vers, les passer de bouche en bouche, les faire vivre dans des dĂ©placements du corps et dans des gestes, vont alors permettre que les commentaires fusent et surtout que le poĂšme de cette fable sâincorpore, devienne le propre de chacun sans quâaucune explication nâait Ă©tĂ© donnĂ©e. Ces variations partagĂ©es sur de petits moments poĂ©tiques dâun texte ouvrent un vrai dĂ©bat interprĂ©tatif dans et par lâattention prĂ©cise aux dĂ©tails les plus infimes de ce que fait un poĂšme au corps, Ă la voix, Ă chacun et Ă tous. Parions que le mot goutte » ne sera plus jamais entendu, compris, employĂ© comme avant⊠Deux ouvrages seulement pour le collĂšge mais aprĂšs ceux des cycles 2 et 3, chacun comprendra aisĂ©ment la dĂ©marche et saura lâadapter aux autres ouvrages que nous avons proposĂ©s et Ă bien dâautres tout aussi forts de lecture. Certes, lâampleur et la difficultĂ© augmentent mais rien ne remplace, contrairement aux habitudes souvent acquises dans le secondaire, cette dĂ©marche qui laisse toute sa place Ă lâaventure de la lecture et des lecteurs Ă©tant donnĂ© quâelle est toujours lâexigence de leur libertĂ©, câest-Ă -dire de lâĂ©coute la plus proche des Ćuvres. Avec Blaise Cendrars et ses Feuilles de route Il nây a pas plus allĂ©gorique de la lecture elle-mĂȘme que le journal de voyage et câest un tel journal que Cendrars propose comme livre de poĂšmes avec ses Feuilles de route la dĂ©dicace fort longue qui ouvre le livre parle de cahier » ; ce qui nous fait songer au carnet de bord. Lequel est constituĂ© de trois parties I. Le Formose », du nom du bateau quâemprunte Cendrars en direction du BrĂ©sil en passant par Bilbao et Dakar, dont nous connaissons lieux et dates dâĂ©criture puisquâon lit au bas de cette premiĂšre partie la mention Le Havre-Saint-Paul, fĂ©vrier 1924 »; II. Sao-Paulo », le Saint-Paul de la mention finale de la premiĂšre partie, qui comprend six courts poĂšmes ; III. », la troisiĂšme partie du cahier » sans autre titre que sa numĂ©rotation qui commence par un DĂ©part » pour sâachever sur un question abyssale Pourquoi jâĂ©cris ? » Ă laquelle est donnĂ© la rĂ©ponse la plus ouverte qui soit Parce que⊠» avant que ne figure lâannĂ©e de cette Ă©criture 1924 ». On notera toutefois que les Ă©ditions Gallimard ont donnĂ©, dans le sommaire le titre du premier poĂšme » Ă la troisiĂšme partie sans utiliser les rĂšgles typographiques qui sâimposent⊠Câest donc un cahier » de 80 pages environ quâon peut lire dâune traite comme lâinvention dâun livre qui se cherche autant dans ses lecteurs que dans son propos, mĂȘme si Cendrars semble nous donner des pistes rassurantes autant que dĂ©routantes avec sa lettre-ocĂ©an » LETTRE-OCĂAN La lettre-ocĂ©an nâest pas un nouveau genre poĂ©tique ⊠La lettre-ocĂ©an nâa pas Ă©tĂ© inventĂ©e pour faire de la poĂ©sie Mais quand on voyage quand on commerce quand on est Ă bord quand on envoie des lettres-ocĂ©an On fait de la poĂ©sie p. 22 Passage qui pourra certainement susciter un dĂ©bat nourri tout au long du livre mĂȘme si les formes du dĂ©bat peuvent rester allusives voire silencieuses⊠*** Les listes lexicales possibles sont bien Ă©videmment nombreuses ; il semble toutefois que des pistes exemplaires puissent ĂȘtre empruntĂ©es et la classe pourra utiliser Ă bon escient des rĂ©partitions en sous-groupes Ă©tant entendu que chaque liste lexicale hiĂ©rarchisĂ©e rĂ©alisĂ©e ne peut lâĂȘtre quâindividuellement puisquâil sâagit toujours de se montrer un parcours de lecture dans lâĆuvre. Observez quelques personnages rencontrĂ©s par Cendrars au long de son voyage et ordonnez-les Ă votre convenance ; Le narrateur du cahier livre ses impressions de voyageur au long cours, relevez-les et ordonnez-les ; Listez quelques activitĂ©s des voyageurs Ă bord des transatlantiques telles que dĂ©crits par le narrateur de ces Feuilles de route et ordonnez-les dans lâordre de prĂ©fĂ©rence de ce mĂȘme narrateur. Il sâagit, on lâaura compris, de pĂ©nĂ©trer la voix narrative, dâen comprendre les accents, dâen saisir la force jusque dans son ironie parfois grinçante et sa porositĂ© aux clichĂ©s de lâĂ©poque quoiquâelle ne cesse de sây opposer â perdons lâhabitude de dire que le poĂšte pense que, parle de⊠et considĂ©rons en poĂ©sie comme en roman, y compris autobiographique, que le narrateur que nous prĂ©fĂ©rons appeler, dĂšs quâil y a poĂšme, le raconteur » nâest pas lâauteur ! *** Les instantanĂ©s théùtraux peuvent avoir pour objectif de montrer le travail dâĂ©criture pensive et aventuriĂšre de Cendrars Ă©criture au prĂ©sent de lâĂ©criture. Cendrars donne toujours lâimpression du poĂšme en train de sâĂ©crire au moment du vivre. On pourrait donc proposer aux Ă©lĂšves de dire tel ou tel passage de leur choix en mimant leur Ă©criture machine Ă Ă©crire ou plus certainement traitement de texte avec vidĂ©o-projecteur si le collĂšge a les moyens. Ce mode de diction en Ă©crivant â mĂȘme fictivement car un diaporama projetĂ© peut trĂšs bien avoir dĂ©jĂ Ă©crit le texte qui se projette sâĂ©crivant â permet Ă la voix de sâintĂ©rioriser dans son passage au public. Un exemple avec trois poĂšmes » qui vont ensemble p. 34-35 LâĂQUATEUR LâocĂ©an est dâun bleu noir le ciel bleu est pĂąle Ă cĂŽtĂ© La mer se renfle tout autour de lâhorizon On dirait que lâAtlantique va dĂ©border sur le ciel Tout autour du paquebot câest une cuve dâoutremer pur LE PASSAGE Ă LA LIGNE Naturellement jâai Ă©tĂ© baptisĂ© Câest mon onziĂšme baptĂȘme de la ligne Je mâĂ©tais habillĂ© en femme et lâon a bien rigolĂ© Puis on a bu JE NAGE JusquâĂ la ligne câĂ©tait lâhiver Maintenant câest lâĂ©tĂ© Le commandant a fait installer une piscine sur le pont supĂ©rieur Je plonge je nage je fais la planche Je nâĂ©cris plus Il fait bon vivre Ce passage de la ligne lâĂquateur peut ĂȘtre lu comme un passage Ă la ligne dans lâĂ©criture, passage qui renverse toute lâĂ©criture comme lâĂquateur traversĂ© renverse les saisons. Ce qui rappelle le sĂ©rieux dâune anecdote dans lâĂ©criture aller Ă la ligne. SĂ©rieux qui aussitĂŽt peut aussi faire rire, dĂ©faire le sĂ©rieux de lâĂ©crire je nâĂ©cris plus »⊠LâinstantanĂ© théùtral peut suggĂ©rer ce passage Ă la ligne en crĂ©ant cet espace brisĂ© et renversant espace qui doit dâabord sâentendre dans la diction qui explorera les modes du passage Ă la ligne liĂ©es et sĂ©parĂ©es, les lignes inventent une danse de la voix⊠*** Les Ă©crits Ă la premiĂšre personne emprunteront bien Ă©videmment le genre » qui nâen est pas un ! de la lettre-ocĂ©an. La plus grande libertĂ© est possible quant aux signataires de ces lettres-ocĂ©an un papillon » Un papillon grand comme la main est venu virevolter tout autour du paquebot / Il Ă©tait noir et jaune avec de grandes stries dâun bleu dĂ©teint », p. 39 ou un ouistiti » jâai achetĂ© trois ouistitis que jâai baptisĂ©s Hic Haec Hoc », p. 78 ; voir aussi p. 82 peuvent fort bien en ĂȘtre les signataires ; mais le charpentier » p. 82 ou encore Christophe Colomb p. 83 peuvent signer de belles lettres-ocĂ©an en Ă©cho Ă celles de Cendrars. La mythologie personnelle de Cendrars pourrait aussi venir nourrir une lettre-ocĂ©an signĂ©e dâOrion, sa constellation de prĂ©dilection p. 30 qui est sa main montĂ©e au ciel » p. 34. LâĂ©criture de telles lettres demandent de se nourrir du poĂšme, de ne pas hĂ©siter Ă le citer, de glaner des documents dans les dictionnaires, bref, de dĂ©river, de voyager dans et par lâĂ©criture. Didactiquement, il est certainement prĂ©fĂ©rable dâorienter la libertĂ© dans un projet dâĂ©criture qui montera progressivement en puissance. Par exemple, en suivant une progression de ce type 1. Ăcris la rĂ©ponse Ă la Lettre » p. 13 ; 2. Europe » rĂ©pond Ă la lettre En route pour Dakar » p. 17-18 ; 3. Cendrars a trouvĂ© une lettre-ocĂ©an » dans un cachot » de GorĂ©e » p. 24 mais ne lâa pas publiĂ©e ; tu dĂ©cides de nous la montrer ; 4. Orion envoie une lettre-ocĂ©an » Ă Cendrars voir p. 30 et 34 ; Etc. Avec ValĂ©rie Rouzeau et Pas revoir Ce petit livre est un grand livre. Cela commence par son titre son attaque qui fait entendre la premiĂšre syllabe de lâĂȘtre cher disparu Papa » ; sa syntaxe ouverte, bĂ©ante sur tout ce qui sây entend si fort mais qui ne peut ĂȘtre nommĂ©, seulement suggĂ©rĂ© ; son refus du syntagme figĂ© au revoir » des rituels relationnels y compris avec les morts, son refus du semblant, cette exigence de dire vrai, non le vrai ; son anonymat qui crie lâĂ©nonciation la plus singuliĂšre parce que justement sây entendrait cette voix dâenfant â peu importerait son Ăąge â qui sâaffirme face au pĂšre et avec lui, dans ce face Ă face oĂč lâaltĂ©ritĂ© la plus grande la mort devient forme de vie. Donc, un grand poĂšme de vie, non qui rend vie, mais qui vit, donne vie Ă qui lâentend, le lit. Soixante-dix-neuf stations dâun thrĂšne au pĂšre font de ce livre une course Ă©perdue Toujours courir » de Toi » Ă mon pĂšre », premier et derniers mots du livre tout le contraire dâune lente remĂ©moration, dâune commĂ©moration. La mĂ©moire est au prĂ©sent dâune syntaxe qui rĂ©cupĂšre, Ă©vacue, redistribue, un peu comme le pĂšre faisait dans son mĂ©tier avec son camion. Les voix sâemmĂȘlent pour peut-ĂȘtre mieux entendre celle quâon cherche Ă Ă©couter ça va quand on demande moi je dis bien surtout sâil y a du monde je prends sur moi trĂšs bien ». Et câest dit trĂšs fort Tu me fais marcher ». Car ce long poĂšme est aussi le rythme dâun sujet qui travaille son Ă©coute, lâaffine, parce que justement la voix du pĂšre rĂ©sonne la voix de sa fille, et lâinverse Les fleurs seront bientĂŽt trĂšs bleues. / Mon Ćil, tes yeux ». Le thrĂšne nâest pas un chant dĂ©senchantĂ© mais lâĂ©change comme enchanteur Tu as mes fleurs jâai ton sourire on est quittes ». Et câest par moments, un bouquet dâair, presque une voix qui comptine, un rire quand pas les mots ». Et câest Ă la fin Ma main lĂ posĂ©e sur la table de dehors. / De la mĂȘme couleur que sa main Ă mon pĂšre. » Le poĂšme a juste mesurĂ©, et mesurĂ© juste il faudrait dire rythmĂ©, car rien nâest calculĂ© et tout est trouvĂ©, cette distance deux phrases ou lignes sĂ©parĂ©es par un point et cet Ă©change extĂ©rieur/intĂ©rieur ; ma main » / sa main ». A-t-il aussi trouvĂ© la couleur Ă mon pĂšre » ? La lamentation serait alors un hymne Ă la vie ? Les grands poĂšmes font vivre pas revivre nos morts. Pas revoir en est un, il participe, Ă sa maniĂšre de poĂšme, dâune invention de lâanthropologie du quotidien, de la mort dans et avec la vie, dont nous avons tous le dĂ©sir quand ce nâest le besoin. Toutes les activitĂ©s que nous avons proposĂ©es dans les sĂ©quences prĂ©cĂ©dentes viennent ici empĂȘcher que lâon rĂ©duise ce livre, comme les prĂ©cĂ©dents, Ă ce dont il parle car ce qui compte avec les poĂšmes câest de sâintĂ©resser Ă ce quâils nous font, Ă ce quâon fait avec eux au dire plus quâau dit, au sentir plus quâau senti, au ressentir plus quâau ressenti, etc. Câest pourquoi on raterait le poĂšme de ce livre si sa lecture Ă©tait dâemblĂ©e placĂ©e sous le signe de son genre le thrĂšne ou chant pour les morts ou de son thĂšme la mort du pĂšre⊠Les activitĂ©s proposĂ©es, si elle nâempĂȘche pas la problĂ©matisation gĂ©nĂ©rique ou thĂ©matique visent dâabord Ă laisser agir les lectures au plus prĂšs de chacun et de tous dans les circonstances de ces lectures. *** La premiĂšre activitĂ© attire lâattention des lecteurs sur les passages jugĂ©s difficiles bizarres » si lâon prĂ©fĂšre en les ordonnant par ordre de difficultĂ© ou, si lâon prĂ©fĂšre, de bizarrerie ». Il ne sâagit pas de rĂ©soudre » ces difficultĂ©s mais seulement de montrer par ces prises dâabord hasardeuses que le poĂšme fait systĂšme et que telles difficultĂ©s locales va soudain sâĂ©clairer du contexte ou dâoccurrences semblables. La consigne peut se prĂ©ciser ainsi RelĂšve quelques passages qui te paraissent difficiles. Attention pas plus dâun par page les 79 stations » ! Ordonne ces passages par ordre de difficultĂ© ». ApparaĂźtront donc des similitudes et donc ainsi certaines difficultĂ©s sâĂ©limineront dâelles-mĂȘmes quand dâautres seront rendues moins difficiles par comparaisons et, forcĂ©ment, relectures. Quelques exemples La premiĂšre station en offre bon nombre mais suivons la consigne Toi mourant man au tĂ©lĂ©phone pernoctera pas voir papa p. 7 Comment lire ce verset » ? OĂč dĂ©couper les syntagmes signifiants ? Tout sâenchaĂźne et pourtant⊠tout est suggĂ©rĂ© dans cet enchevĂȘtrement, dans ce chamboulement des habitudes que fait la mort au langage, Ă la vie, jusquâĂ inventer des mots pernocter »⊠Il y aurait peut-ĂȘtre des coquilles dans ce livre La neige a ses rĂȘves quâelle ignore de tant tomber de ciel sur nous p. 13 On dit toujours tomber du ciel » ! Mais ici câest le ciel qui tombe ! Et puis plus bas, lâaccord nâest pas fait pour la neige » quand il semble fait pour la voix » Beau neige voix blanche. p. 13 Etc. Mais on retiendra pour montrer la direction de cette activitĂ© un des faits les plus saillants de tout lâouvrage et qui en constitue certainement lâenjeu Je prends son vĂ©lo Ă mon pĂšre. p. 31 Ma main lĂ posĂ©e sur la table de dehors. De la mĂȘme couleur que sa main Ă mon pĂšre. p. 85 Ce doublement du possessif est bien autre chose quâune faute » enfantine ou populaire » la duplication est lâĂ©criture dâun Ă©change qui met les corps et le langage dans le mouvement dâun passage rĂ©alisant ainsi une transmission rĂ©ciproque masculin/fĂ©minin, troisiĂšme et premiĂšre personneâŠ. *** On peut alors sâengager dans les instantanĂ©s théùtraux qui chercheront ces passages de voix. Prenons un seul exemple pour montrer lâenjeu de cette recherche, par ces essais qui doivent bien Ă©videmment ĂȘtre multiples, se jouer seul ou Ă plusieurs, une fois ou de nombreuses fois en variations infinitĂ©simales⊠Te parler papa jâai pu te paparler un peu un petit peu paparce que nous nâavions plus tout le temps. p. 30 Le bĂ©gaiement Ă©crit nâest pas un symptĂŽme dâun hors-langage deuil qui empĂȘche de dire⊠mais lâĂ©coute dans le discours de ce qui le double, de ce qui va plus vite que lui, de ce qui vient dans le dire avant le dit lâappel de lâinterlocuteur envahit tout le dit et met le dire te dire » au premier plan. Ce qui laisse une marge plus quâimportante Ă la force de lâadresse que toute diction cherchera Ă trouver dans des gestes et dâabord dans des gestes de paroles pensons aux postillons que lâocclusive ne manque pas de lĂącher !. Alors les rĂ©pĂ©titions qui suivent ne sont plus les tics dâun bĂ©gaiement mais les gestes dâune relation quâil faut faire entendre, faire voir, faire sentir et dâabord en les sentant dans sa bouche Te parler papa jâai pu te paparler un peu un petit peu paparce que nous nâavions plus tout le temps. Dehors le monde ses oiseaux blancs comme des avions, le mur du son. Tes mains sur le drap blanc jaunissaient jaunissaient. Ils nâont sĂ»rement pas le droit de voler aussi bas pas pas le droit de voler aussi bas tu disais. MĂȘme mĂȘme le blanc de tes yeux Ă©tait jaune nous alors nous sommes tout pardonnĂ©. p. 30 *** Ce livre de poĂšmes est Ă©galement un parcours dont les lecteurs peuvent reconstituer les Ă©tapes les stations » si lâon veut filer la mĂ©taphore chrĂ©tienne avec la Passion du Christ qui constitue certainement dans la tradition littĂ©raire un des grands topoĂŻ du passage de la vie Ă la mort. LâĂ©criture dâune anthologie lĂ©gĂšrement commentĂ©e du parcours de la narratrice en choisissant des lieux-moments clĂ©s de ce parcours, mettrait en valeur cette dimension organisatrice du livre. Il y a des lieux qui suivent lâagonie, lâenterrement, lâaprĂšsâŠmais ces lieux dâune temporalitĂ© linĂ©aire qui rendraient compte dâun destin et donc dâune fin qui achĂšverait la vie, sont doublĂ©s voire multipliĂ©s dans tous les sens par dâautres lieux, lieux-souvenirs, lieux-avenirs, lieux-rĂȘves, lieux-dĂ©rivesâŠ, qui alors mettent le rĂ©citatif plus fort que le rĂ©cit, le poĂšme plus fort que le destin, la vie incluant la mort, le vivant des voix plus fort que lâĂ©cho mortel, le pas revoir » dâun appel plus fort que lâau revoir » dâun adieu. On saisira pour lâexemple ces passages de lieux dans ce poĂšme-comptine qui fait entendre bien dâautres poĂšmes de Charles dâOrlĂ©ans Ă Guillevic en passant par Apollinaire Mon pĂšre mon pĂšre mon pĂšre en terre au vent dâĂ©tĂ© au vent dâhiver. Oh mon pĂšre terra terraquĂ© je te rĂ©pĂšte perroquet mon pĂšre mon pĂšre. Au vent dâhiver au vent dâĂ©tĂ© en terre entier au vent chantĂ©. Enfant dans les grands sapins verts câĂ©tait toi qui sifflais soufflais enfant dans les grands sapins blancs. Mon pĂšre je te rĂ©pĂšte en lâair câest une fleur lancĂ©e assez haut. Les deux pieds dans tes graviers clairs. Les mains pour la fleur ou lâoiseau. p. 57 Les lieux circulent de la tombe gravier Ă lâair », de la terre » au ciel, de lâ hiver » Ă lâ Ă©tĂ© », de la fleur » Ă lâoiseau » mais aussi de lâenfance Ă maintenant, du vert au blanc, des pieds aux mains, du siffler » au souffler », etc. Ces itinĂ©raires commentĂ©s doivent rester toujours fort singuliers et les lieux les plus incongrus peuvent donner Ă voir autant de parcours de lecture qui sont des parcours vivants dans le livre. *** Enfin, lâĂ©criture de paroles donnĂ©s aux sans-voix du poĂšme permettrait de laisser entendre le dĂ©bat qui ne manquera pas de sourdre pour chaque lecteur entre tristesse et joie, tendresse et rĂ©volte, dĂ©tresse et joie de vivre, mutisme et jubilation volubile⊠Câest quâil nây a pas Ă choisir mais Ă entendre toutes ces voix qui nous traversent et forment le chĆur dâun poĂšme de vie. Ce poĂšme part certes dâune disparition mais il fait repartir dâune force de vie. Le dĂ©fi maximal serait de faire entendre la voix du pĂšre mort, de faire entendre sa vie non seulement en reprenant des souvenirs que le poĂšme fait revivre mais Ă©galement en trouvant des accents de vie dans une voix qui rĂ©pondrait jusque dans son silence Tu nâĂ©coutes plus rien si je parle plus bas. Ni tu nâentends plus rien des guĂȘpes qui sâoccupent de piquer les lilas. Ni nâen vois la couleur ni celles que jâai sur moi. Ces bottes sont faites pour marcher tu ne chantes plus ça. Câest de la haute fidĂ©litĂ© ton silence mâarrĂȘte lĂ . p. 34 AprĂšs que les Ă©lĂšves du cycle 2 ont commencĂ© la rencontre avec des Ćuvres poĂ©tiques, les Ă©lĂšves du cycle 3 vont augmenter leur capacitĂ© de faire Ćuvre en cherchant Ă augmenter tout ce qui fait la force dâun auteur et en particulier en percevant quâune Ćuvre est toujours une force en mouvement qui peut inclure plus dâun texte, qui ne sait jamais oĂč elle commence ni oĂč elle finit. Avec une anthologie thĂ©matique, La mer en poĂ©sie Comment lire une anthologie en classe ? Sâil est vrai quâune anthologie consĂ©quente comme celle que nous proposons ici ne peut exiger sa lecture intĂ©grale, il nâempĂȘche quâil sâagit dâamener les Ă©lĂšves Ă sa lecture dans tous les sens et donc Ă une lecture du livre pour en comprendre les choix, les valeurs et les enjeux. Lâanthologie, de ce point de vue, est un excellent terrain dâentraĂźnement pour la lecture critique. La table des matiĂšres du livre offre la liste des auteurs et surtout lâorigine bibliographique des extraits qui constituent lâanthologie thĂ©matique. VĂ©ritable bibliothĂšque poĂ©tique qui mĂȘle connus et inconnus, cĂ©lĂšbres et oubliĂ©s, cette table est toutefois incomplĂšte puisque les titres des poĂšmes, quand ils existent, nây figurent pas. Pire, on ne voit pas Ă sa lecture si une organisation quelconque prĂ©side Ă lâordonnancement des poĂšmes. Ces lacunes apparentes peuvent ĂȘtre prĂ©texte Ă des interrogations qui relanceront fortement les activitĂ©s proposĂ©es. Le dossier pĂ©dagogique sera laissĂ© Ă lâusage libre des Ă©lĂšves car il nous semble ne pas rĂ©pondre Ă notre objectif, lire une anthologie, quand il sollicite simplement des activitĂ©s plutĂŽt occupationnelles non justifiĂ©es par cette anthologie. La plupart des activitĂ©s consisteront Ă mobiliser les Ă©lĂšves dans des activitĂ©s anthologiques quitte Ă faire mieux â câest le dĂ©fi â que lâanthologie convoquĂ©e, du moins Ă engager une critique anthologies dâanthologie⊠pour suggĂ©rer que la lecture nâest rien moins quâune activitĂ© dâĂ©criture anthologique et que toute Ă©criture est une anthologie de lectures. *** La liste lexicale hiĂ©rarchisĂ©e peut viser en plusieurs sĂ©ances, au fil des lectures qui vont parcourir linĂ©airement ou sauvagement » lâanthologie, Ă constituer un rĂ©pertoire de morceaux choisis gĂ©nĂ©ralement courts incluant le mot mer ». Ce rĂ©pertoire devra ĂȘtre hiĂ©rarchisĂ© en suivant le degrĂ© dâĂ©vocation proposĂ© par chaque fragment. Les critĂšres de la hiĂ©rarchisation sâils restent toujours subjectifs sont toujours discutables et donc permettent de mettre en valeur les critĂšres dâapprĂ©ciation construits par les Ă©lĂšves. Depuis la citation de Baudelaire Homme libre, ⊠/ La mer est ton miroir ⊠» jusquâĂ celle de Saint-Pol Roux OcĂ©an // Ciel Ă lâenvers », des rĂ©sonances sâentendent mais dâinfimes gradations peuvent aussi sâĂ©tablir mĂ©taphore abstraite puis concrĂšte ou extĂ©riorisation dâune subjectivitĂ© puis personnalisation dâun Ă©lĂ©ment objectif⊠Et la quĂȘte se poursuit avec Guillevic Mer de ceux qui veulent y mourir » et Maurice Fombeure Si la mer touchait Ă la nuit »⊠Si la consigne paraĂźt trop difficile, la simple recherche des occurrences de mer » et leur hiĂ©rarchisation peut suffire pour aboutir aux mĂȘmes discussions et apprĂ©ciations plus ou moins attentives au travail poĂ©tique quâengage cette anthologie. *** Les instantanĂ©s théùtraux viseront de la mĂȘme maniĂšre Ă monter des passages qui sâenchaĂźnent dâun poĂšme Ă lâautre enchaĂźnements thĂ©matiques ou autres qui feront entendre un parcours de lecture seul ou Ă plusieurs. Ici, le travail en petites Ă©quipes est Ă encourager pour augmenter les lectures en les mutualisant. Le prĂ©texte actif aux enchaĂźnements peut ĂȘtre le passage dâobjets, de mots, de matiĂšres, de lumiĂšres â des lectures qui incluent un Ă©clairage, voire une projection de diapositives ou dâombres colorĂ©es, seraient propices Ă cette anthologie vivante. Loin dâaboutir Ă un quelconque spectacle, cette activitĂ© nâa pour objectif que de faire vivre la lecture dans et par lâactivitĂ© corporelle dont la voix constitue le cĆur le plus vivant, le plus extime », câest-Ă -dire nouant sans faire appel aux intentions explicites lâintime dâune lecture Ă son exercice public â Ă©tant entendu que le public ici convoquĂ© lâest toujours dans lâĂ©galitĂ© du partage et de lâĂ©change rĂ©ciproque des lectures, donc du respect de chacune. Des montages plus faciles peuvent ĂȘtre rĂ©alisĂ©s les poĂšmes de Jules Supervielle prĂ©sents dans lâanthologie, tous les poĂšmes sâintitulant Marine », etc. *** La rĂ©alisation de documentaires » avec tous ces poĂšmes peut rappeler des expĂ©riences Ă©ditoriales frĂ©quentes en littĂ©rature jeunesse mais tout particuliĂšrement celles quâa initiĂ©es Georges Jean voir Jean, ????. Rassembler des citations autour dâobjets marins » prĂ©sentĂ©s thĂ©matiquement bateaux et marins, plages et tempĂȘtes⊠ou encore rĂ©aliser un glossaire de tel ou tel aspect de la mer » avec, pour chaque entrĂ©e du glossaire », une citation ou plusieurs bien rĂ©fĂ©rencĂ©es, prises Ă un ou plusieurs poĂšmes de lâanthologie, voilĂ de quoi relire et proposer une lecture dans et par lâĂ©criture anthologique. Exemple de rĂ©alisation par un Ă©lĂšve sur le premier tiers du livre Petit glossaire des bateaux de La mer en poĂ©sie BaleiniĂšre Alors dans sa baleiniĂšre le pĂšre tout seul sâen est allĂ© » Jacques PrĂ©vert, La pĂȘche Ă la baleine » Barque Lâun nâa-t-il pas sa barque et lâautre sa charrue ? » Victor Hugo, Oceano Nox » ; Sur la mer blanche de colĂšre, par cette blanche nuit de neige, les barques plongent, aux arpĂšges de la rafale et de la mer » Paul Fort, Puisquâil faut toujours que lâon parte » ; La barque est belle fille / Du flĂšche Ă la quille » Saint-Pol Roux, PriĂšre Ă lâOcĂ©an » Caravelle ⊠penchĂ©s Ă lâavant des blanches caravelles, / Ils regardait monter en un ciel ignorĂ© / Du fond de lâOcĂ©an des Ă©toiles nouvelles » JosĂ© Maria de Heredia, Les conquĂ©rants » Cargo Au loin un cargo fait naufrage » Jacques PrĂ©vert, Le gardien du phare aime trop les oiseaux » Esquif Chaque vague en passant dâun butin sâest chargĂ©e ; / Lâune a saisi lâesquif, lâautre les matelots ! » Victor Hugo, Oceano Nox » Felouque La felouque a coupĂ© lâĂ©treinte de leurs mains / ⊠/ La felouque glisse au creux des vagues de guerre » Robert Arnaud, Le pirate dâAlger » Motogodille Maintenant les autres vont me pourchasser en motogodille » Jacques PrĂ©vert, La pĂȘche Ă la baleine » Navire En pierre mon navire sâembosse Ă la Terre » Saint-Pol Roux, PriĂšre Ă lâOcĂ©an » Nef Lente la nef cambre les muscles de son torse » Robert Arnaud, Le pirate dâAlger » Vaisseau Et comme un jour les vents, retenant leur haleine, /Laissaient paisiblement aborder les vaisseaux » La Fontaine, Le berger et la mer » ; Voici rentrer lâofficier de marine, / ⊠/ Il dit combien de vaisseaux il a pris » Charles Cros, Chanson de la cĂŽte » ; DĂ©mon de verre cassant des vaisseaux comme on casse des noix » Saint-Pol Roux, PriĂšre Ă lâOcĂ©an » En vue dâun tel Ă©crit, on pourrait envisager la collaboration de plusieurs Ă©lĂšves mais rappelons que jamais lâexhaustivitĂ© nâest lâobjectif et que lâengagement personnel jusque dans les erreurs est une condition de lâappropriation puis de la discussion avec lâĆuvre. *** Donner la parole Ă la mer en rĂ©alisant un montage de citations des poĂšmes de lâanthologie permettrait de boucler » ces activitĂ©s en laissant toutefois lâĂ©criture dĂ©river et donc les citations passer dans lâĂ©criture des Ă©lĂšves les citations se perdant donc dans lâĂ©criture deviennent ainsi non seulement la parole de la mer mais la parole de chacun des lecteurs. Exemple de rĂ©alisation LâOcĂ©an parle Ă la suite de Claude Roy, Guillaume Apollinaire, Pablo Neruda, Paul Verlaine et Victor Hugo Je suis beau je suis sel je suis vent je suis bleu Je suis immense et fou je suis avide et tout Autour de ta maison il y a moi que tu connais Et qui ne repose jamais Et jâĆuvre en ton silence Tu ne reposes pas auprĂšs de ce rocher Je palpite sous lâĆil de la lune en deuil et palpite encore Je vais, viens, luis et clame Le sombre oubli que jette le temps sur tous ceux que jâenfouis Avec AnacoluptĂšres de James SacrĂ© Ce petit livre porte jusquâau bout son Ă©nigme avec un plaisir certain qui demande toujours de revenir en arriĂšre souvenirs dâenfance et dâaller de lâavant surprise dâun poĂšme quâon nâattendait pas comme ces fourmis qui vous montent dans les jambesâŠ. On comprend quâil ne sâagira jamais dâen venir Ă bout â qui prĂ©tendrait maĂźtriser le monde des insectes, monde infini comme celui des poĂšmes⊠On comprend aussi quâil sâagira de beaucoup sâamuser tout en se posant des questions redoutables la mort rĂŽde ou plutĂŽt lâexpĂ©rience Ă©lĂ©mentaire de ce pouvoir dâĂ©craser, de punaiser nâimporte quel insecte avec les meilleurs prĂ©textesâŠ. Ce petit livre et les lectures quâil va entraĂźner demandent lâattention la plus forte possible aux toutes petites choses qui vont sây faire un peu comme un collectionneur dâinsectes sait que la valeur de sa collection est dans les toutes petites diffĂ©rences. Le titre constitue Ă lui seul une Ă©nigme qui peut-ĂȘtre le restera aprĂšs la lecture des Ă©lĂšves⊠mais ces titres Ă©nigmatiques ne sont-ils pas ceux qui laissent le plus de souvenir parce quâils Ă©veillent la rĂȘverie. Ce titre est un mot valise qui emmĂȘle anacoluthe » et colĂ©optĂšres », donc deux types dâobservation concernant le langage et le monde. Ce qui montre bien que ce petit livre possĂšde dĂšs son titre une rĂ©versibilitĂ© des plus actives. ANACOLUTHE. Ce terme est utilisĂ© traditionnellement et encore par LittrĂ© pour dĂ©signer deux phĂ©nomĂšnes syntaxiques diffĂ©rents. La tradition grammaticale faisait de lâanacoluthe lâemploi du pronom relatif sans antĂ©cĂ©dent par exemple il y aurait ellipse de lĂ dans Il va oĂč le devoir lâappelle, ou de celui dans Qui vivra verra. Lâanacoluthe est dĂ©finie, plus gĂ©nĂ©ralement, comme une rupture de construction, un changement dâorientation, une asymĂ©trie pouvant produire divers effets surprise, suspens, etc. En fait les exemples classiques relĂšvent dâune possibilitĂ© trĂšs gĂ©nĂ©rale le dĂ©placement Ă gauche » ou thĂ©matisation » Le nez de ClĂ©opĂątre sâil eĂ»t Ă©tĂ© plus court⊠». Demougin, 1985 COLĂOPTĂRE gr. koleos, Ă©tui, et pteron, aile. ColĂ©optĂšres ordre dâinsectes Ă mĂ©tamorphoses complĂštes, pourvus de piĂšces buccales broyeuses et dâailes postĂ©rieures pliantes protĂ©gĂ©es au repos par une paire dâĂ©lytres cornĂ©s, comprenant plus de 300 000 espĂšces parmi lesquelles le hanneton, le charançon, la coccinelle, etc. Larousse, 1995 Les activitĂ©s avec ce livre vont tenter de tenir cette rĂ©versibilitĂ© jusquâau bout, rĂ©versibilitĂ© quâil faudrait dâailleurs gĂ©nĂ©raliser description et narration, vers et proses, rĂ©flexion et divagation, etc. *** Viser un premier parcours dans lâĆuvre demande de hiĂ©rarchiser un lexique. Ce livre commence et finit par une liste alphabĂ©tique de colĂ©optĂšres Liste quelques-uns de ces colĂ©optĂšres en commençant par ceux que tu connais ». Ce premier lexique hiĂ©rarchisĂ© prĂ©cĂšde un second qui semble indispensable Ă un premier parcours personnel dans lâĆuvre RelĂšve les colĂ©optĂšres Ă©voquĂ©s par le livre de James SacrĂ© â en excluant ceux listĂ©s au dĂ©but et Ă la fin de lâouvrage â puis Ă©numĂšre-les dans lâordre de tes prĂ©fĂ©rences ». Les Ă©lĂšves apercevront dans les Ă©changes qui sâen suivront bien des spĂ©cificitĂ©s de lâouvrage le premier fragment signale le cĂ©toine et le calosome », si le premier est mentionnĂ© dans la liste ouvrant le livre, le second ne lâest pas ! le second qui est consacrĂ© au carabe dorĂ© » sâachĂšve sur les cicindĂšles » les deux figurent dans la liste mais on ne comprend pas facilement le rapport entre eux ; le troisiĂšme consacrĂ© au criocĂšre », lequel ne figure pas dans la liste augurale, mais les colĂ©optĂšres Ă©voquĂ©s avec lui sont des paysans perchĂ©s dans les peupliers » ! qui pourraient â pourquoi pas ? â venir complĂ©ter la liste des colĂ©optĂšres⊠; les fourmis » Ă©voquĂ©es dans le cinquiĂšme fragment sont-elles des colĂ©optĂšres ? si lâon en croit le Larousse illustrĂ©, non ! puisque les hymĂ©noptĂšres, sâils sont des insectes, ne sont pas des colĂ©optĂšres ! Le livre sâouvre donc Ă une dĂ©couverte des insectes plus que des colĂ©optĂšres au sens strict ! Sans compter que maman » est comparĂ© par le narrateur Ă une grande fourmi dans le temps » ! etc. sans oublier le termite » et non la » ! qui est inclus sur la liste des isoptĂšres⊠Conclusion du narrateur Ă propos du dictionnaire Dans le gros livre qui est un arrangement systĂ©matique des mots ça fait une dĂ©rive de vocabulaire mal tenu » 6e fragment ! De la mĂȘme façon, les listes des Ă©lĂšves pourront mal se tenir puisque les dĂ©rives lexicales inĂ©vitables auront suivi lâimprĂ©visibilitĂ© des passages entre dĂ©couverte du monde et dĂ©rive langagiĂšre. Ces rĂ©versibilitĂ©s tenues jusque dans les listes rĂ©pondent au poĂšme Un poĂšme comme un doigt levĂ© ou comme Un coup de balai bien donnĂ©, vraiment, Le voilĂ -t-y qui ruse encore, Autrement que jâai pu penser ? 13e fragment PrĂ©cisons-le Ă cette occasion cette activitĂ© qui gĂ©nĂ©ralement ouvre les lectures-Ă©critures-jeux avec les livres de poĂšmes demande Ă lâenseignant dâaccepter et mĂȘme dâĂ©couter au plus prĂšs toutes les propositions des Ă©lĂšves autrement quâil a pu penser »⊠Câest certainement dans ces altĂ©ritĂ©s » de la pensĂ©e, dans ces imprĂ©vus de la didactique que se construisent les valeurs de lâĆuvre. Si, par exemple dans la classe, un dĂ©bat prend sur lâinclusion ou non de la nicole » fragment 16 qui ne figure pas dans la liste du livre mais qui bien Ă©videmment semble ĂȘtre le nom pour la coccinelle, lâoccasion est belle de faire travailler la confusion toujours forte de lâexpĂ©rience personnelle et de la connaissance du monde parce que, comme dit le narrateur au fragment 18 Peine perdue de pas le croire, tu joues / Ă transformer la bestiole et ton poĂšme en je. » DĂšs lâĂ©criture de liste lexicale hiĂ©rarchisĂ©e, lâenjeu câest bien de faire venir ce je » qui nâest pas le moi » de lâindividu, ou de lâĂ©lĂšve mais le sujet dâune activitĂ© que le poĂšme seul peut faire advenir au cĆur du langage. Des variantes de consignes sont tout Ă fait possibles faire une liste non exhaustive des souvenirs dâenfance du narrateur et les ordonner dans lâordre dâimportance ; faire une liste non exhaustive des comparaisons que le narrateur effectue et les ordonner Ă sa convenance ; etc. *** La seconde activitĂ© demanderait de laisser une grande libertĂ© de choix aux Ă©lĂšves avec une consigne Ă la fois trĂšs ouverte et extrĂȘmement ferme choisis un passage du livre â pas trop long â et joue-le en lâaccompagnant dâun geste fort et dâun objet Ă©vocateur ». Cette association du fragment textuel, dâun geste et dâun objet oblige les Ă©lĂšves Ă chercher entre lâillustration littĂ©rale et lâanalogie la plus suggestive possible leur voix propre que peut seul permettre une mise en espace rapide mais dĂ©cisive. Exemples de rĂ©alisations sachant bien que mille autres sont possibles et quâaucun modĂšle ne peut ici intervenir ; on considĂšrera Ă©galement que la classe est par ailleurs entraĂźnĂ©e Ă des activitĂ©s rĂ©guliĂšres de jeu dramatique avec les textes littĂ©raires instantanĂ©s théùtraux Maman sâen va, jâentends mal ce que dit maman⊠maman comme une grande fourmi dans le temps » peut faire entendre un Ă lâĂąge que tâas ! » dit par une mĂšre qui est trop prise par ses occupations domestiques entre les deux parties de ce fragment ; ce qui oblige le joueur Ă se dĂ©doubler et Ă remplir » la suspension qui sĂ©pare ce court fragment. Qui câest quâa peur des libellules ? / Petites filles princesses dragons » lâadresse demande dâinterpeller fortement le public, de lui dĂ©crire en deux temps trois mouvements des mĂ©tamorphoses subites petites filles=>princesses=>dragons⊠La nicole. Le seul insecte Ă qui presque on donnait de lâaffection. La voilĂ montĂ©e au bout de ton doigt, du cĂŽtĂ© quâelle sâenvolera tu te marieras ! » finir sur une comptine en ayant jouĂ© des doigts auparavant facile et difficile car il faut se retenir et faire tenir toute la diction sur un doigt⊠Lâenseignant peut aussi faire jouer toute la classe dans une course Ă la liste des insectes diction articulĂ©e mais rapide, diction sans compĂ©tition mais pour que chaque voix fasse entendre sa propre polyphonie diction qui prend bien entendu place dans lâanthologie sonore de chacun. *** LâĂ©criture documentaire avec ce livre de poĂšmes semblerait couler de source puisque le poĂšme parle dâinsectes » fragment 13 et quâil Ă©voque les soixante-dix illustrations en noir et une planche en couleurs pour les seuls papillons » dans le dictionnaire Larousse de mille neuf cent soixante-trois » dessine la planche des anacoluptĂšres de James SacrĂ© en utilisant comme lĂ©gendes des citations de cet ouvrage » ! Mais ne pourrait-on pas le faire parler dâautre chose⊠et par exemple de poĂšmes rĂ©alise une anthologie des passages de ce livre qui parle de poĂ©sie » ou bien encore de souvenirs confectionne un album des souvenirs du narrateur de AnacoluptĂšres un peu comme un album photos de famille »⊠Plus quâen cycle 2, les Ă©lĂšves vont maintenant chercher Ă mieux coudre » les Ă©lĂ©ments de leur documentaire. De deux points de vue soit en proposant un court texte de prĂ©sentation des Ă©lĂ©ments regroupĂ©s chapeau dâintroduction ou quatriĂšme de couverture du livret, soit en liant les Ă©lĂ©ments du documentaire avec des titres qui sâenchaĂźnent voire se rĂ©pondent, ces titres pouvant mĂȘme ouvrir Ă de courts textes de liaison qui montrent une progression, un ordre de prĂ©sentation. Exemple de rĂ©alisation dâun petit livret anthologique commentĂ© des illustrations peuvent lâaccompagner, en lâoccurrence, collage de photocopies de dictionnaires divers couverture Nom et prĂ©nom de lâĂ©lĂšve-auteur pseudonyme possible Les poĂšmes du poĂšme de James SacrĂ© Ăditions de lâĂ©cole X p. 1 Le poĂšme rassemble Il collectionne une tellement courte collection » Il arrange que ça fasse un parterre de ces mots un poĂšme » Il ordonne tout un dictionnaire vivant » p. 2 Le poĂšme accueille Il sâouvre au monde ramener du printemps dans les mots dâun poĂšme » Il sâouvre aux mots câest plus que des mots » p. 3 Le poĂšme se cache Dans le corps des poĂšmes comme des fourmis dans les jambes » Dans le langage tu joues Ă transformer la bestiole et ton poĂšme en je » p. 4 Le poĂšme surprend On ne sait pas exactement oĂč il est une ruse pour surprendre en lâarrangement de ses propres mots ce qui le fait poĂšme, ou si vraiment câest pour ĂȘtre mais comment ? avec la nicole qui voulait pas sâenvoler de nos doigts dâenfants, ou le barbot lent que maman balayait vivement de la chambre humide sans surtout lâĂ©craser ? » quatriĂšme de couverture Dans son livre AnacoluptĂšres, le poĂšte James SacrĂ© parle de la poĂ©sie. Il va chercher les poĂšmes dans les petites bĂȘtes. Il a parfois envie de les Ă©craser mais il les laisse vivantes. Pour lui, les poĂšmes sont comme des insectes bien vivants. Alors, dĂ©couvrez la poĂ©sie comme on dĂ©couvre le monde des insectes. *** Les insectes nâont pas vraiment la parole dans ce livre de poĂšmes. Donnons-la leur ! Il sâagit de rĂ©pondre au narrateur ou bien encore de les faire dialoguer entre eux Ă propos de cet ouvrage, de ce poĂšme voire dâun fragment seulement. Le choix peut rester libre ou bien un projet peut aider chacun Ă progresser. Exemples de consignes Le carabe dorĂ© ou le criocĂšre prend la parole afin de commencer par une ou plusieurs reformulations Ă la premiĂšre personne du texte descriptif du narrateur ; La nĂšpe, la punaise et le termite du Larousse de 1963 Ă©changent leurs impressions on peut lire des Larousse ultĂ©rieurs sur les articles qui leur sont consacrĂ©s et sur ce quâen dit le poĂšme ; LâaraignĂ©e du fragment 17 rĂ©pond au narrateur qui avait une familiaritĂ© mĂ©chante et joueuse avec ce qui Ă©tait dĂ©clarĂ© mauvais » et qui tuait occasionnellement un insecte »⊠Les insectes Ă©pinglĂ©s dans lâespĂšce de tiroir ⊠selon lâordre » que lui a montrĂ© un livre sur les insectes, discutent entre eux du collectionneur dâinsectes devenu poĂšte⊠Nous proposons deux sĂ©quences avec des Ćuvres pour le cycle 2, lâune avec une Ćuvre classique et lâautre avec une Ćuvre contemporaine ; paradoxalement la seconde est certainement plus facile que la premiĂšre car le texte est moins important et donc elle devrait prendre place avant la premiĂšre prĂ©sentĂ©e ici dans le cursus de lâĂ©lĂšve. Mais tout est relatif dans de telles progressions, car il est tout Ă fait envisageable de reprendre une Ćuvre et câest ce que nous proposerions concernant celle de Desnos qui est un incontournable dans un programme » poĂ©tique Ă lâĂ©cole et au collĂšge. Nous la verrions bien abordĂ©e au cycle 2 puis reprise en dĂ©but de collĂšge ! Avec Robert Desnos Chantefables et Chantefleurs Câest lâannĂ©e de son arrestation que Robert Desnos 1900-1945, en 1944 donc, porte Ă Michel GrĂŒnd un manuscrit de trente Chantefables Ă chanter sur nâimporte quel air que RenĂ© Poirier publia dans sa collection Pour les enfants sages » avec des illustrations dâOlga Kowalewsky. Ce nâest quâen 1952 que ces poĂšmes furent Ă©ditĂ©s accompagnĂ©s des Chantefleurs dans une Ă©dition illustrĂ©e par Christiane Laran Ă la Librairie GrĂŒnd, et il fallut attendre 1955 pour que paraisse une Ă©dition dĂ©finitive comprenant 80 poĂšmes qui, depuis lors, eurent le succĂšs que lâon sait auprĂšs des enfants des Ă©coles. Mais Desnos lui-mĂȘme notait, non sans modestie, dans son journal de fĂ©vrier 1944 que ces Chantefables seraient la part la plus durable de son Ćuvre, ce qui nâest pas sans tĂ©moigner dâun grand respect et dâune grande confiance pour ses jeunes lecteurs. De lâalligator au zĂšbre et de lâangĂ©lique Ă la violette, ce bestiaire doublĂ© dâun livre des fleurs rassemble ce que certains appellent des comptines » Par exemple, Marie-Claire Dumas, Ă©ditrice des Ćuvres 1999 qui sâachĂšvent sur ce recueil. On observera dâailleurs dâune Ă©dition Ă lâautre dâinfimes diffĂ©rences ponctuation, majuscules⊠; ce qui pourrait engager les Ă©lĂšves dans des lectures attentives dâune Ă©dition Ă lâautre pour tenter de donner valeur Ă ces diffĂ©rences. *** Autour de sĂ©ances qui sâouvrent toujours avec des lectures Ă voix haute de nombreux poĂšmes â chaque sĂ©ance pouvant recommencer par des rappels des poĂšmes antĂ©rieurs celui que vous voulez quâon relise »⊠â la sĂ©quence commence par la rĂ©alisation de listes. Si tout est possible car lâobjectif premier consiste Ă ce que les Ă©lĂšves se fraient chacun un chemin lexical » et donc une mĂ©moire lexicale dans lâĆuvre, il semble fort judicieux de partir avec des listes de rimes. Syllabes, mots, syntagmes ? On doit surtout laisser les Ă©lĂšves dĂ©cider par eux-mĂȘmes des unitĂ©s Ă convoquer dans leur recherche â cela fera dâailleurs lâobjet de discussions aprĂšs comparaisons⊠Consignes 1. cherche au moins trois sĂ©ries de rimes ; 2. ordonne ces sĂ©ries dans lâordre de tes prĂ©fĂ©rences. ModalitĂ©s travail individuel dâabord avec, selon le niveau, coloriage au crayon puis notations sur le cahier ou notations directes ; puis Ă©changes en petits groupes avec Ă©change collectif dirigĂ© pour faire Ă©merger quelques trouvailles et questionnements ; enfin, chacun retient une ou deux remarques quâil fait siennes sur son cahier. LâintĂ©rĂȘt est double la dĂ©finition de la rime est Ă construire et doit absolument rester ouverte, discutĂ©e et discutable â de ce point de vue, les notations des Ă©lĂšves sont dâune importance cruciale dĂ©coupage, mise en rapport⊠et il sera important de les faire expliciter dans la mesure du possible en respectant les trouvailles et mĂȘme les incohĂ©rences voire les erreurs Ă©ventuelles ; Ă©tant donnĂ© lâimportance des rimes dans ces poĂšmes, leur manipulation par les Ă©lĂšves permettront de nombreuses remarques et surtout les points dâappui essentiels pour la mĂ©morisation non pas pour tout retenir mais pour pouvoir aisĂ©ment survoler le corpus de poĂšmes et surtout sâimprĂ©gner de la culture prosodique de Desnos. *** Deux activitĂ©s parallĂšles peuvent alors sâengager, lâenseignant se chargeant principalement dâaider, ne serait-ce que par une Ă©coute active, la seconde activitĂ© qui demande une bonne organisation spatiale la rĂ©alisation dâune courte anthologie personnelle et de petites mises en voix ou en scĂšne de deux ou trois poĂšmes Ă deux ou trois enfants. Consignes 1. Choisis quatre poĂšmes de Robert Desnos, prĂ©sente-les dans un petit livret que tu illustreras. 2. Ă deux ou trois, choisissez deux ou trois poĂšmes de Robert Desnos que vous allez prĂ©senter Ă toute la classe. Les consignes sont volontairement trĂšs ouvertes car lâobjectif est une appropriation la plus personnelle possible de lâĆuvre et lâĂ©coute des trouvailles des autres pour penser sa propre lecture, la rejouer diffĂ©remment en lâincorporant par lâĂ©crit et par lâoral, en observant les rĂ©alisations des autres lecteurs. Quelques prĂ©cisions cependant pour mieux orienter ces activitĂ©s sont nĂ©cessaires. *** Concernant lâanthologie, il sâagit de rĂ©aliser de petits livrets une feuille A4 pliĂ©e en 4 est largement suffisante venant sâajouter Ă une collection rĂ©guliĂšrement rĂ©alisĂ©e par chaque Ă©lĂšve autant de petits carnets de lecture, si lâon veut. La perspective anthologique est bien Ă©videmment importante sâagissant de lâĆuvre dâun auteur classique. Chaque Ă©lĂšve obtiendra ainsi son Desnos ! Nous nous situons dans la tradition du cahier de poĂ©sie recopier un poĂšme dâun auteur ; en lâoccurrence quatre ! Si la quantitĂ© paraĂźt trop Ă©levĂ©e pour certains Ă©lĂšves, ils peuvent se contenter de recopier quelques vers les prĂ©fĂ©rĂ©s des quatre poĂšmes choisis. On aperçoit que le premier objectif est celui du choix la sĂ©lection des poĂšmes prĂ©fĂ©rĂ©s dans le corpus des 80 poĂšmes des Chantefables et Chantefleurs lâenseignant peut avoir rĂ©duit le corpus aux 60 voire seulement aux fables ou aux fleurs⊠mais la quantitĂ© ne doit pas ĂȘtre nĂ©gligeable sous peine de retirer Ă toutes les activitĂ©s leur intĂ©rĂȘt quelle que soit lâautonomie des Ă©lĂšves dans les performances de lecture ; en effet, la lecture des titres peut suffire⊠puis lâappropriation par le recopiage de certains de ces poĂšmes voire de fragments, câest-Ă -dire leur passage par la main du lecteur. Cette activitĂ© prend tout son sens et ne reste pas un simple exercice de recopiage si lâensemble forme un rĂ©el petit livret dont lâĂ©lĂšve est rendu entiĂšrement responsable. Câest pourquoi, il a en charge lâordre de prĂ©sentation des poĂšmes. Plusieurs possibilitĂ©s sâoffrent Ă lui ordre fidĂšle Ă celui de Desnos ; ordre alphabĂ©tique des titres ; ordre thĂ©matique deux animaux, deux fleurs ; seulement des oiseaux⊠; ordre rhĂ©torique ou mĂ©trique poĂšmes Ă rimes semblables ; poĂšmes qui posent des questions ; poĂšmes de huit syllabesâŠ. Ordre choisi voire construit que lâĂ©lĂšve explicitera dans un petit sommaire en fin de livret auquel il donnera un titre personnel et quâil signera comme auteur en page de titre bien entendu ; si la classe est habituĂ©e Ă cette activitĂ© de rĂ©alisation de livret, on peut envisager une quatriĂšme de couverture avec un court texte de prĂ©sentation visant le lecteur potentiel et cherchant Ă le captiver⊠Un tel livret ne peut se passer dâun accompagnement illustratif plusieurs solutions sâoffrent alors aux Ă©lĂšves que lâenseignant rendra ou non obligatoires en fonction des expĂ©riences antĂ©rieures. Prioritairement dans le cadre de cette activitĂ©, il sâagit de signaler que la littĂ©rature est un mode de dĂ©couverte du monde. Aussi, lâaccompagnement illustratif pourra-t-il tout simplement bĂȘtement ! prendre la caractĂšre dâune illustration de type sciences naturelles » en empruntant aux ouvrages adĂ©quat dictionnaires, manuels⊠et effectuer des collages ou des dĂ©calques de ce type dâillustrations. LâintĂ©rĂȘt didactique est double puisque les Ă©lĂšves croiseront des lectures lecture du poĂšme et du texte dĂ©finitionnel ou scientifique » concernant, par exemple le ZĂšbre ou le Souci et devront Ă©galement confronter manuellement, pourrions-nous dire, texte et image et donc organiser la confrontation sur chaque page de leur livret soit en conservant un mode de confrontation, soit en le variant et lâadaptant Ă chaque cas⊠Toute cette expĂ©rience nâa pas pour objectif de rĂ©aliser des chef-dâĆuvres. Toutefois, au bout dâun certain nombre dâexpĂ©riences du mĂȘme type, le niveau dâexigence puisse bien sĂ»r sâaccroĂźtre, mais nous proposerions plutĂŽt dâatteindre de tels objectifs en cycle 3 et au collĂšge. Cette expĂ©rience a dâabord pour objectif de faire expĂ©rimenter un mode de réénonciation de lâĆuvre littĂ©raire dans un temps limitĂ© mais suffisant pour que lâĂ©lĂšve sâapproprie trĂšs concrĂštement des fragments de lâĆuvre et surtout pour quâil commente, Ă©change, confronte avec ses camarades les conditions hypothĂšses, trouvailles, Ă©vocations diverses⊠de cette lecture en actes. Ces Ă©changes doivent cependant rester assez libres et câest Ă lâenseignant, si nĂ©cessaire, de les susciter, de les soutenir, de les valoriser sans jamais vouloir obtenir des savoirs qui viendraient confirmer ou infirmer lâexpĂ©rience des Ă©lĂšves, laquelle doit toujours rester ouverte Ă condition quâelle soit constamment confrontĂ©e Ă lâĆuvre elle-mĂȘme. Aussi, la rĂ©ussite dâune telle activitĂ© est-elle mesurable au degrĂ© dâengagement de chacun plus quâĂ la qualitĂ© matĂ©rielle de la rĂ©alisation finale mĂȘme si celle-ci tĂ©moignera forcĂ©ment dâun engagement ; toutefois beaucoup dâĂ©lĂšves de cycle 2, voire de cycle 3, nâont pas la dextĂ©ritĂ© manuelle habiletĂ© graphique⊠nĂ©cessaire Ă une rĂ©alisation magistrale ! Mais ils ont tous la possibilitĂ© de montrer quâils peuvent rendre compte de leur lecture par un petit objet » dans lequel ils ont investi beaucoup dâeux, de leur lecture qui a valeur dorĂ©navant tant pour lâenseignant que pour eux-mĂȘmes⊠*** Le jeu dramatique proposĂ© avec les poĂšmes de Desnos doit lui aussi rester modeste tout en engageant fortement chaque Ă©lĂšve. Sâil vise certes Ă rĂ©citer les poĂšmes choisis librement par les enfants en petits groupes, chacun en apprenant quasiment par cĆur un, il vise Ă©galement Ă augmenter lâĂ©coute des poĂšmes dans la bouche des autres car on ne peut se contenter dans cette activitĂ© dâun passage de trois Ă©lĂšves devant la classe rĂ©citant chacun son tour trois poĂšmes. En effet, la consigne demande de prĂ©senter ensemble et donc de savoir ce que les deux Ă©lĂšves ne rĂ©citant pas vont faire pendant quâun Ă©lĂšve rĂ©cite⊠sans que pour autant ils soient obligĂ©s de le rĂ©citer en silence !!! câest-Ă -dire de mimer chaque mot comme si le sens devait se voir dans une explicitation qui rend tout le monde idiot⊠Pas facile ! et pourtant pas si compliquĂ© si nous prenons quelques exemples. Un Ă©lĂšve sur les trois pourrait, comme dans le théùtre de Bertolt Brecht â voir lâarticle sur lâOpĂ©ra de Quatâsous dans â, utiliser une petite pancarte une feuille A4 bien tenue pour commencer⊠pour indiquer le titre du poĂšme ou le refrain ou encore une image⊠pendant que le second jouerait un geste, une mimique voire montrerait un objet⊠Exemple La Sauterelle ». Pancarte Saute, saute, sauterelle ». Mimique lâĂ©lĂšve assis derriĂšre une table couchĂ© au sol⊠fait mine de suivre une sauterelle qui traverse la table, la scĂšne⊠en le faisant discrĂštement pour seulement appuyer la diction de son camarade qui rĂ©cite ou lit le poĂšme. En conservant le mĂȘme dispositif, une variante consiste Ă faire participer vocalement les deux Ă©lĂšves accompagnateurs pour les refrains quand il y en a, y compris avec les variantes comme dans LâĂglantine, lâAubĂ©pine et la Glycine » vers 2, Rouge, rouge, rouge et blanc. » puis vers 6, Bouge, bouge, bouge et vlan ! » et enfin vers 9, Et vlan, vlan, vlan ! » ; idem pour La Girafe » avec sans variante le refrain des vers 2 et 4 des quatre quatrains Vent du sud et vent de lâest » puis Vent du nord et vent de lâouest ». Mais les Ă©lĂšves sauront trouver dâeux-mĂȘmes des petits dispositifs simples et efficaces comme, par exemple pour La Fleur de Pommier », la pancarte indiquant Joli rossignol et fleur de pommier » et lâĂ©lĂšve-acteur faisant tomber quelques petits flocons de coton devant la pancarte pour Ă©voquer les fleurs de pommier qui font de la neige » en plein mois de Juillet »⊠Ainsi on gagnerait certainement des dictions plus lentes ou plus rapides si nĂ©cessaire mais moins scolaires » puisque les trois acteurs » doivent se coordonner, sâĂ©couter et au fond faire passer le poĂšme, devenir des passeurs de poĂšmes. Il va de soi que le dispositif nâa dâintĂ©rĂȘt que si les Ă©lĂšves changent de rĂŽle Ă chaque poĂšme, que si les expĂ©riences sont partagĂ©es avec toujours beaucoup de bienveillance dans des moments et des lieux adaptĂ©s pour que lâĂ©coute et les Ă©changes qui sâen suivent atteignent leur objectif partager un moment poĂ©tique oĂč beaucoup de poĂšmes vont sâĂ©changer de vives voix. ConcrĂštement, pour que tous les Ă©lĂšves passent, cela demande certainement plusieurs sĂ©ances soit deux moments forts ou plusieurs petits qui vont ponctuer dâautres activitĂ©s. *** Cette sĂ©quence ne peut sâachever sans que les Ă©lĂšves soient sollicitĂ©s pour prendre la parole, plutĂŽt sans donner la parole Ă ceux qui ne lâont pas eue dans les poĂšmes de Desnos ou dont la voix ne sâentend pas â ce qui est une maniĂšre de prendre la parole en la donnant, de ne plus confondre le je » et le moi », de prĂ©server Ă©galement ce qui dans le cadre collectif de la classe ne peut se dire sans quelques risques. Ce don de parole est aussi une maniĂšre de vivre ensemble en prĂ©servant lâintĂ©gritĂ© de chacun. La consigne est simple mais demande effectivement que les Ă©lĂšves sâhabituent Ă ce genre dâactivitĂ©s Donne la parole Ă un personnage qui ne lâa pas dans un poĂšme de Robert Desnos ». Prenons quelques exemples et montrons quelques rĂ©alisations qui vont du plagiat Ă lâinvention folle »⊠Nous suivons les poĂšmes dans lâordre de lâĂ©dition GrĂŒnd et nous proposons des rĂ©alisations dont lâorthographe a Ă©tĂ© revue. La Rose » parle Ah ! il mâa cueilli. Eh bien, je vais lâendormir »; Je suis rose ou blanche ou dâor / Je suis en branche pas encore Ă©close » ; Rose, il dit rose, mais je suis blanche ! » ⊠Le GlaĂŻeul », câest le fils du PĂšre GlaĂŻeul » qui parle Je suis au Cap, je suis Ă Gand, / Je suis Ă Nice et Ă Tunis, / Et je suis Ă Senlis. / Je suis perroquet dans une oasis » ; Comment mon pĂšre GlaĂŻeul sait-il oĂč je suis ? Si encore câĂ©tait mon aĂŻeul qui est au pĂŽle Nord, je lui dirais dâaller au pĂŽle Sud Ă mon pĂšre GlaĂŻeul ! Câest pas tout, jâai froid gla-gla ! » La Pivoine », câest la marchande qui parle Pivoine, pivoine, / Qui veut mes belles pivoines ? » ; ou câest la pivoine qui dit Je ne veux pas aller sur lâeau avec ces matelots / ils vont me laisser faner pour les beaux yeux de la marchande. » LâAlligator » pense tout en parlant au nĂ©grillon », Bonjour, mon garçon » Un tendre nĂ©grillon, ce serait bon pour mon rĂ©veillon » ; et Ă la fin, il pense RatĂ© pour aujourdâhui mais demain, mon petit, je tâoffrirai un bonbon et tu feras mon rĂ©veillon. » Etc. PlutĂŽt que de faire Ă©crire des poĂšmes » aux Ă©lĂšves, il est prĂ©fĂ©rable de les faire Ă©crire avec les poĂšmes et dâengager un mode dâexpression qui permette Ă chacun de se prĂ©server tout en ayant toute sa libertĂ© dâĂ©criture. Aussi, cette consigne permet dâune part de choisir le poĂšme, de choisir le mode dâĂ©criture en ligne, en prose, avec ou sans rimes, en reprenant tout ou partie du texte de Desnos, en ignorant complĂštement le poĂšme⊠pour rĂ©pondre au poĂšme dâune maniĂšre personnelle tout en prĂ©servant son quant-Ă -soi puisque lâĂ©lĂšve peut toujours dire que ce nâest pas lui qui parle, sâexprime, rĂ©pond⊠étant entendu quâil est le scribe de ce personnage qui prend la parole Ă partir du poĂšme. Comme pour les autres activitĂ©s, le rĂ©sultat nâest pas toujours Ă la hauteur de ce quâon espĂ©rerait mais lâessentiel est cette reprise par lâĂ©lĂšve dâun fragment de lâĆuvre. Reprise qui est en lâoccurrence une réénonciation, une appropriation. *** Ces quatre activitĂ©s conduites constituent un petit ensemble qui permet aux Ă©lĂšves de parcourir lâĆuvre, de se lâapproprier dâune maniĂšre personnelle tout en ne cessant dâĂ©changer avec les autres. Chaque Ă©lĂšve a ainsi la possibilitĂ© de choisir les modes de son engagement avec lâĆuvre attente, observation, reprise, engouement⊠sans jugement de valeur et surtout sans ennui. En effet, lâenseignant veille Ă ce que chacun sâengage au moins dans deux ou trois des quatre activitĂ©s et surtout il veille Ă ne pas surcharger ses Ă©lĂšves dâexplications, de consignes et dâexercices qui souvent dĂ©goĂ»tent mĂȘme les meilleurs. Ici les activitĂ©s constituent dâabord des reprises assez libres des poĂšmes que lâenseignant est toujours le premier Ă proposer Ă ses Ă©lĂšves dans des moments de lecture magistrale. Sans que cela soit une obligation on peut conclure par un petit dĂ©bat collectif ou par un moment conclusif. Par exemple, en demandant aux Ă©lĂšves dâĂ©changer sur ce qui les a fait le plus rire ou ce qui les a le plus intriguĂ©s dans tous ces poĂšmes. Discussion permettant de remĂ©morer les poĂšmes mais aussi de pointer la force humoristique, joueuse de Desnos sans quâĂ aucun moment un consensus ne soit Ă imposer Ă chaque Ă©lĂšve qui peut prĂ©server son jardin secret, son Desnos Ă lui⊠Dâailleurs, ce moment conclusif peut consister Ă garder pour soi dans son carnet de lecture ce quâon aimerait garder de Desnos aprĂšs tout ce travail⊠Mon dernier lilas bien qui lilas le dernier », Ă©crivait Desnos dans le Lilas » ! Avec En toutes circonstances dâAlbane GellĂ© Ce livre de poĂšmes poursuit la tradition forte dâun Robert Desnos. Le refrain nâest pas sans faire penser Ă sa fourmi de dix-huit mĂštres Au 10, de la rue de lâespoir, assise sur le trottoir⊠une fourmi mĂȘme pas noire agitait lâun de ses 937 mouchoirs. [âŠ] » Donc comme sâil y avait six refrains mais avec des variations et comme une progression puisque le dernier commence par un dĂ©cidĂ©ment » et propose un retour Ă la case dĂ©part puis retourna sâasseoir sur le trottoir » ! Six refrains ponctuĂ©s de 5 couplets » comprenant chacun 6 puis 5, 5, 5 et enfin 6 sĂ©quences trĂšs courtes toutes aussi insolites afin de dessiner un univers du rĂȘve ? du jeu ? de lâĂ©numĂ©ration ? et surtout du plaisir de dire, de la volubilitĂ© de raconter, rĂ©citer, imaginer, jouer, plus quâavec les mots, avec tout le langage. *** On pourrait rapidement lister les consignes que nous ne commenterons pas aussi longuement que pour Desnos Liste lexicale 1. Lister au moins cinq personnages du livre ; 2. Les classer dans lâordre de prĂ©fĂ©rence et donner un titre Ă la liste ». Il sâagit bien de permettre Ă chaque Ă©lĂšve de poser ses marques pour assurer les lectures ultĂ©rieures ; ces marques les plus diverses dont la dimension subjective ou plus certainement dont la connaissance dĂ©jĂ assurĂ©e monde connu » ou univers dâexpĂ©rience proche » mais aussi dont les possibles surprises et plaisirs attirent, constituent autant de parcours personnels de lecture que les Ă©changes vont faire se croiser et forcĂ©ment sâouvrir les uns aux autres. Jeu dramatique 1. Choisir un couplet du livre et le jouer seul ou Ă plusieurs ; 2. Apprendre par cĆur un ou deux refrains puis progressivement improviser des histoires de fourmi noire ». Il sâagit de jouer la jubilation rĂ©citative du poĂšme se raconter des histoires Ă dormir debout mais aussi faire tenir des histoires courtes sur leur force rĂ©citative, leur prosodie de comptine, leur entrain ludique dans et par le langage. Les ratĂ©s sont forcĂ©ment de la partie et chaque partie est toujours Ă remettre. Documentaire Faire un bestiaire Ă partir du livre En toutes circonstances de quatre Ă huit pages avec des illustrations adĂ©quates ». Les Ă©lĂšves ne manqueront pas de profiter des propositions de Alain Bahuaud, lâillustrateur des poĂšmes dâAlbane GellĂ©, qui utilise les techniques du collage. Les bĂȘtes » du bestiaire peuvent au demeurant sâhumaniser ou se chosifier au grĂ© des trouvailles plastiques et verbales⊠La parole vive Deux personnages de deux couplets diffĂ©rents de En toutes circonstances dialoguent ». La notion de personnage est ici Ă prendre dans sa plus grande extension. Exemples de dialogues possibles entre les chanteurs de rock » et la vieille dame » ou entre le cheval en colĂšre » et le placard ouvert »⊠*** Ces quatre activitĂ©s ne cherchent pas Ă faire le tour de tous les dĂ©tails circonstances » ! du poĂšme mais Ă lancer le mouvement qui lâanime celui dâune ritournelle qui met tous les sens au diapason dâune jubilation enfantine des plus Ă©couteuses comme le montre dĂšs le dĂ©but la premiĂšre sĂ©quence du premier couplet si le ciel est un peu en dĂ©sordre câest pour faire joli ? La question qui ressemble Ă toutes celles des enfants combien dâĂ©toiles y a-t-il dans le ciel ? » reste nĂ©anmoins prudente un peu » vient renforcer la proposition hypothĂ©tique tout en proposant sur le mode interrogatif une rĂ©ponse pour faire joli » qui empĂȘche toute instrumentalisation du jeu enfantin. Ce que confirmerait une autre sĂ©quence prise au troisiĂšme couplet trĂšs trĂšs loin les Ă©toiles se demandent si câest possible une seule fois de redescendre pas pour longtemps Ces parenthĂšses commentatives mettent beaucoup dâhumour et de prudence dans le jeu enfantin qui est toujours la tentative de refaire le monde sans le dĂ©truire, bref de le faire jouer un peu, beaucoup, passionnĂ©ment⊠*** On peut facilement parier quâĂ lâissue de ces activitĂ©s, beaucoup dâĂ©lĂšves auront mĂ©morisĂ© nombre de passages du livre. Ce petit livre dâAlbane GellĂ© les aura mis au cĆur dâune parole libre, assez jubilatoire mais Ă©galement pleine dâinterrogations naĂŻves ou abyssales mais toujours joueuses et, en fin de compte, rieuse pour ne pas dire rimeuse »⊠Câest quâau cycle 2, on poursuit tout ce que le cycle 1 a engagĂ© lâattention au langage dans toutes ses composantes puisque la dimension prosodique voire pragmatique des textes nây est jamais oubliĂ©e car, Ă nâimporte quel Ăąge mais particuliĂšrement Ă lâĂąge oĂč lâon apprend Ă lire, la parole, quâelle soit Ă©crite ou orale, est Ă la hauteur dâun acte qui transforme le monde, change le locuteur et emporte lâauditeur. Pas de sĂ©quences poĂ©sie » sans livres de poĂšmes ! Ce premier impĂ©ratif demande quelques remarques. Si les livres sont chers, ils restent indispensables ne serait-ce quâun livre dans les mains de lâenseignant et les poĂšmes ne sont plus les mĂȘmes ! Ils viennent du livre autant sinon plus que de la bouche du professeur ! Ces livres sont constamment Ă la disposition des Ă©lĂšves tout simplement parce que câest lâĆuvre quâil sâagit de transmettre et non telle ou telle notion, tel ou tel savoir . Aussi on abandonnera dĂ©finitivement les mauvaises habitudes qui parfois cachaient aux Ă©lĂšves tout ou partie de lâĆuvre et du livre sous des prĂ©textes fallacieux divers ; celui de lâanticipation Ă©tant le plus curieux puisquâau prĂ©texte de travailler cette facultĂ© on interdisait aux Ă©lĂšves de dĂ©couvrir lâĆuvre en les privant de celle-ci⊠alors que la facultĂ© anticipatrice nâa quâĂ ĂȘtre exercĂ©e et si elle doit ĂȘtre rĂ©flĂ©chie, elle peut lâĂȘtre toujours a posteriori et non a priori allez donc au cinĂ©ma et coupez le film au bon moment, vous verrez que les spectateurs demanderont le remboursement du ticket dâentrĂ©e ! Ces mĂȘmes spectateurs nâont pas besoin quâon coupe le film pour exercer leur facultĂ© dâanticipation ! Tout lecteur sait bien quâelle est en Ă©veil constant ; ce qui nâempĂȘche pas que des activitĂ©s visant Ă observer lâactivitĂ© dâanticipation, Ă augmenter sa puissance ne soient organisĂ©es dans la classe, mais jamais elles ne doivent lâĂȘtre au dĂ©triment de la dĂ©couverte dâune Ćuvre littĂ©raire et encore moins poĂ©tique ! Câest pourquoi, toutes ces sĂ©quences visent Ă faire connaĂźtre le plus rapidement possible lâintĂ©gralitĂ© de lâĆuvre ; la premiĂšre condition Ă©tant que le livre soit toujours accessible pour tous et chacun. Le mieux Ă©tant certainement que chacun en dispose mais les conditions matĂ©rielles de lâenseignement ne le permettant pas toujours, lâenseignant saura le mettre Ă disposition de chacun par divers moyens un livre par groupe dâĂ©lĂšves, un livre par Ă©lĂšve pour un groupe qui rĂ©alise une activitĂ© avec lâĆuvre pendant que les autres font autre chose dans un autre domaine et quoiquâil en soit le livre prĂ©sent dans la classe, bien visible et lisible Ă tous moments en classe. Le lecteur de ces billets ne manquera pas de lire lâensemble de ces sĂ©quences indĂ©pendamment du niveau dont il est chargĂ© car nous dĂ©veloppons des points particuliers dans chaque sĂ©quence et inversement nous passons plus rapidement sur des aspects dĂ©jĂ traitĂ©s dans des sĂ©quences antĂ©rieures. Tout particuliĂšrement, le lecteur lira la premiĂšre sĂ©quence puisquâelle permet de donner concrĂštement le cadre gĂ©nĂ©ral de la conception de ces sĂ©quences. Ajoutons quâun enseignant peut fort bien selon les circonstances se nourrir des maniĂšres de faire qui font les lectures et la programmation de sa classe Ă un autre niveau que celui de ses Ă©lĂšves⊠Nous proposons ci-dessous une programmation dâĆuvres pour lâĂ©cole et le collĂšge avec des variantes possibles. Ă raison de deux ou trois Ćuvres par an, un Ă©lĂšve aurait en fin de cycle un corpus de 7 Ćuvres poĂ©tiques intĂ©grales, puis en fin dâĂ©cole primaire, au moins 14 Ćuvres et en fin de scolaritĂ© obligatoire, environ 24 Ćuvres, ce qui est loin dâĂȘtre nĂ©gligeable ! RĂȘvons Ă cette bibliothĂšque de 24 Ćuvres poĂ©tiques qui constituerait le socle commun dâun enseignement avec les poĂšmes ! Cette programmation peut paraĂźtre assez arbitraire mais elle rĂ©pond toutefois aux critĂšres suivants Ă©quilibrer les Ćuvres pour que la poĂ©sie reste en tension voir toute la premiĂšre partie de cet ouvrage, varier les voix pour que la pluralitĂ© appelle chacun Ă entendre sa propre diversitĂ© et donner Ă entendre la force du langage avec des Ćuvres qui engagent tout ce quâon a de meilleur et de fort. Les rĂ©fĂ©rences prĂ©cises des ouvrages sont donnĂ©es en bibliographie sur cette page Cycle 2 GS CP CE1 Ćuvres Luce Guilbaud, Qui, que, quoi ? Albane GellĂ©, En toutes circonstances Robert Desnos, Chantefables et Chantefleurs EugĂšne Guillevic, Ăchos, disait-il Victor Hugo, Chansons pour faire danser en rond les petits enfants et autres poĂšmes Jean-Marie Henry, Le Tireur de langue Jean-Damien ChĂ©nĂ©, Jâai un chut ! dans la gorge Cycle 3 CE2 CM1 CM2 Le ClĂ©zio, Sirandanes Jean-Pascal Dubost, Câest corbeau Pierre Marchand et Vincent Besnier, La mer en poĂ©sie Lucien Suel, Visions dâun jardin ordinaire Jacques Roubaud, Les Animaux de tout le monde James SacrĂ©, AnacoluptĂšres Jean-Marie Henry, Tour de terre en poĂ©sie CollĂšge 6e 5e 4e 3e Jeanne Gatard, La Grande gigue Jean-François Bory, Le Cagibi de MM. Fust et Gutenberg Antoine Emaz, De lâair Jean Tardieu, LâAccent grave et lâaccent aigu Daniel Biga, La Chasse au haĂŻku Blaise Cendrars, Feuilles de route Jean de La Fontaine, Les Fables, Livre 1 ValĂ©rie Rouzeau, Pas revoir Henri Meschonnic, Les cinq rouleaux Jacques PrĂ©vert, Histoires Quelques remarques complĂ©mentaires afin de mieux comprendre une telle programmation dont on peut sâinspirer pour en Ă©tablir dâautres, la renouveler partiellement, la complĂ©ter avec dâautres lectures⊠Si on ne peut parler de lecture de livres de poĂšmes en cycle 1, il va de soi que la lecture de poĂšmes y est par contre tout Ă fait nĂ©cessaire et utile. Aussi nous incluons dans notre programmation deux ouvrages destinĂ©s Ă la grande section dont on connaĂźt le statut Ă cheval » sur les deux cycles. Lâouvrage de Luce Guilbaud est explicite par son titre et montre comment les poĂšmes font autant mouvement avec les questions quâavec les rĂ©ponses ici les rĂ©ponses sont dans le mouvement de la devinette dont on sait que lâintĂ©rĂȘt rĂ©side autant sinon plus dans le jeu de lâinterlocution que dans la rĂ©ponse finale. Lâillustration et la mise en page avec un jeu de cache entrent pleinement dans lâactivitĂ© des poĂšmes-devinettes qui font patienter, rĂȘver, jouer. Le livre dâEugĂšne Guillevic continue cette pratique interlocutive doublement. Paroles rapportĂ©es, ces poĂšmes constituent Ă©galement autant dâĂ©chos Ă ce qui nâa pas de source prĂ©cise mais qui permet une recherche infinie de lâaltĂ©ritĂ© et surtout un jeu de la relation. Comme pour le livre prĂ©cĂ©dent, lâaccompagnement illustratif est indispensable et poursuit la chaĂźne des Ă©chos. Lâouvrage qui ouvre lâĂ©cole Ă©lĂ©mentaire Ă la lecture intĂ©grale dâun livre de poĂšmes est pris Ă une collection particuliĂšrement fĂ©conde, Le farfadet bleu », dont les livres constituent Ă la fois de vrais livres de poĂšmes plus que de simples recueils dâautant plus que les accompagnements graphiques participent chaque fois singuliĂšrement au projet. Si certains ouvrages peuvent convaincre plus que dâautres, tous constituent une premiĂšre collection qui pourra accompagner les jeunes lecteurs tout au long de leur scolaritĂ©. En toutes circonstances poursuit les pratiques poĂ©tiques de lâĂ©cole maternelle qui mettent le corps-langage dans une jubilation certaine tout en introduisant Ă une pensĂ©e du langage en actes quâun Robert Desnos viendra confirmer en fin de cycle avec son livre universellement reconnu et devenu un monument patrimonial dans la bouche des enfants eux-mĂȘmes. Aussi faudrait-il montrer le continu dâune poĂ©sie contemporaine, celle dâAlbane GellĂ© avec des monuments » scolaires anciens que sont devenus Hugo puis Desnos. Les chansons de Victor Hugo nâimitent pas la chanson enfantine mais introduisent dans la grande poĂ©sie la fraĂźcheur enfantine et dĂ©rident le sĂ©rieux patrimonial en mĂȘme temps. Lire une anthologie des jeux de mots avec ce titre qui leur donne un enjeu tout autre que seulement le ludisme gratuit dâune enfance naĂŻve voire bĂȘte, câest montrer dĂšs le cycle 2 que le langage nâest pas coupĂ© en deux le discours sĂ©rieux et ce qui ne veut rien dire mais bien continu car tirer la langue » câest sĂ©rieux comme nâimporte quel jeu de mots lâenjeu est bien celui de la force du langage plus que le seul plaisir des mots. Le petit livre de devinettes de Jean-Damien ChĂ©nĂ© dont les illustrations de Bernadette ChĂ©nĂ© redoublent lâintĂ©rĂȘt, vient poursuivre cet enjeu. il fait du livre lâobjet mĂȘme de la lecture voir ses index alphabĂ©tique », index matiĂšre » et sommaire » ce qui met le jeu de mots dans le poĂšme et donc dans la voix, le geste, le corps-langage plus que dans une mĂ©taphysique des mots, des lettres ou de lâĂ©criture Ă laquelle on soumet plus tĂŽt quâon ne le pense les lecteurs Ce quâil vous plaĂźt ne le sachant pas, de chercher, puis-je pouvons-nous lâĂ©crire sâil nous plaĂźt ? ChĂ©nĂ©, 2002, p. 51 Le cycle 3 sâouvre alors sur un semblable recueil de devinettes qui viennent de loin et dont Jean-Marie-Gustave Le ClĂ©zio et son Ă©pouse nous offrent avec la version originale de belles traductions. Des Ăźles Maurice, nous devinons toute la richesse dâune vie qui emmĂȘle la nature, la culture, les bĂȘtes et les hommes, le corps et le langage jusque dans les couleurs vives de ces broderies qui illustrent les sirandanes. Elles illustrent ainsi le jeu infini de la dĂ©couverte du monde et de lâhomme avec les poĂšmes des devinettes jeu de la relance, jeu de la relation. Câest que le poĂšme nous fait revoir le monde. Ainsi Lucien Suel et son jardin ordinaire » met les visions » dans notre langage de tous les jours avec les moyens du poĂšme. Passer des devinettes ancestrales Ă une Ă©criture dâaujourdâhui qui rappelle sans nostalgie tout ce qui disparaĂźt sous nos yeux ces jardins ouvriers qui assuraient plus quâun approvisionnement substantiel une vie de rĂȘve dans une vie de labeur⊠Si le poĂšme fait rĂȘver câest pour mieux vivre, pour vivre la vraie vie. Dans la vraie vie, il y a la mort et Jean-Pascal Dubost raconte cette arrivĂ©e avec son corbeau ». Cette Ă©criture de notations qui construit un journal dâimpressions montre comment le poĂšme peut transformer des jours sans lendemain en une vie qui nâa pas fini de laisser vivre lâintrusion de lâĂ©trange, de lâaltĂ©ritĂ© radicale, dans nos vies. Cette Ă©criture est lancĂ©e par le prĂ©sentatif du titre câest corbeau ». Le poĂšme invente sa grammaire comme il invente la vie. Mais jamais il ne lâinvente dans lâisolement, dans lâincommunicabilitĂ©. Le livre de Jacques Roubaud voir pour sa lecture intĂ©grale le livre dâAgnĂšs Perrin, 2004, dans la longue tradition des bestiaires que ce cycle 3 explore en filigrane jusquâĂ James SacrĂ© et ses AnacoluptĂšres, rassemble les animaux comme il rassemble tout le monde. Ces jeux qui sont souvent des clins dâĆil amicaux mettent en verve le lecteur comme dans une grande parade et les dĂ©guisements animaliers ouvrent au carnaval des discours, des genres ; alors le poĂšme mĂšne la danse. Deux anthologies viennent complĂ©ter ces livres dâauteurs une anthologie thĂ©matique autour de la mer et une anthologie de poĂ©sies du monde entier avec les versions originales qui montrent la diversitĂ© des langues et des cultures tout en signalant certainement trop rapidement que les poĂšmes ne connaissent pas les frontiĂšres, quâil suffit de chercher sa voix pour dire lâaltĂ©ritĂ© dans sa langue. De telles anthologies ne sont que des portes ouvertes vers des lectures multiples, des lectures toujours plus appropriĂ©es qui font de chacun un sujet du langage. Au collĂšge, la classe de sixiĂšme peut permettre de dĂ©couvrir un personnage qui nâexiste quâen poĂšme, La Grande Gigue de Jeanne Gatard ouvre Ă cette existence que seul le poĂšme permet dâinventer. Force du geste qui met du corps dans des proses pleines de poĂšme au singulier car il sâagit bien de chercher du poĂšme. En sixiĂšme on peut alors partir pour une chasse au poĂšme Ă la maniĂšre de cette chasse au haĂŻku que Daniel Biga propose dans ses notations ultrarapides et quotidiennes. Cette Ă©criture prosaĂŻque met le poĂšme dans la vie Ă condition quâon entende ce que le poĂšme invente et dispose en ouvrant les yeux et les oreilles comme on nâa pas lâhabitude. Il faudrait aussi se lancer dans la lecture des textes fondateurs » comme le demandent les Programmes, pas seulement pour en dĂ©couvrir un succĂ©danĂ© Ă©vĂ©nementiel, mais dâabord pour en entendre une voix ou plutĂŽt des voix qui nous font nous dĂ©couvrir. LâĂ©criture du poĂšte et traducteur Henri Meschonnic fait venir Ă nous cette oralitĂ©-lĂ trĂšs ancienne et trĂšs moderne parce quâelle met Ă vif lâĂ©popĂ©e de nos vies. Ces cinq rouleaux font cinq livres de poĂšmes quâil est indispensable de lire dans nos voix, dans toutes les voix de la classe. Câest un voyage, non seulement dans le temps chronologique et historique, mais surtout dans le temps subjectif dâun rĂ©citatif infini, dans le temps divin qui met lâhomme Ă lâĂ©coute de lâhumain. Aventure que poursuit Ă sa façon un livre de poĂšmes comme celui de Blaise Cendrars. Cette recherche du poĂšme de lâaltĂ©ritĂ© est Ă©galement au principe de lâactivitĂ© typographique des textes de Jean-François Bory qui fait Ă©cho dâune maniĂšre trĂšs ludique et savante Ă lâhĂ©ritage poĂ©tique quâun Ă©lĂšve de cinquiĂšme peut alors Ă©voquer en nâhĂ©sitant pas Ă passer dâun livre Ă lâautre, du palais des Belles-Lettres au Cagibi de MM. Fust et Gutenberg, du manuscrit au tapuscrit, etc. Retrouver deux grands auteurs scolaires en quatriĂšme, La Fontaine et PrĂ©vert, câest lâoccasion de faire De lâair comme nous y invite Antoine Emaz ! Les Ă©lĂšves ne peuvent alors que relire ces vieux auteurs pour les retrouver tout neufs, pleins de force. Fables » et histoires » deviennent alors non des poĂ©sies » Ă rĂ©citer mais des textes qui demandent de les vivre dans des activitĂ©s oĂč le corps, la voix, la parole se multiplient, sâouvrent Ă lâinconnu, se poursuivent dans des relations qui nâen reviennent pas de se trouver⊠Câest ce que Antoine Emaz fait avec son journal qui cherche le poĂšme de chaque jour, de chaque sensation, de chaque humeur. Et alors la poĂ©sie fait respirer un air neuf, un air vif, un air plein de fables et de paroles vraies. La classe de troisiĂšme peut alors infinir ces lectures en poĂ©sie par deux livres dont le premier, celui de Tardieu, cherche lâaccent qui nous fait toujours nous-mĂȘmes avec les autres, quand le second, celui de ValĂ©rie Rouzeau, nous fait autre avec nos plus proches. Ces passages sont toujours des inventions relationnelles pleines de langage, intensifiant des formes de vie en formes de langage et inversement. Graves ou aigus, nos noms ne sont plus des mots, mais des voix qui marchent, des pas qui font chaque fois des histoires, des histoires de lecteurs toutes indispensables pour chacun. Les poĂšmes des lectures scolaires sont alors devenus des poĂšmes de vie. La poĂ©sie est un acte. Elle nâest pas subie, elle est agie. Pierre Reverdy dans Charpier, 1956, p. 545 Les poĂšmes ne demandent quâune chose Ă lâĂ©cole la vie ! parce quâils sont la vie du langage par excellence. Souvent les faux problĂšmes empĂȘchent de se rendre compte que lâĂ©cole câest tout simplement de longs moments de vie pour toutes les gĂ©nĂ©rations dâĂ©coliers faut-il alors opposer lâĂ©cole Ă la vie ou faire rentrer la vie dans lâĂ©cole ou faire sortir lâĂ©cole dans la vie ? Autant de questions qui ratent le vrai problĂšme faire que les activitĂ©s scolaires soient vivantes, maintiennent et mĂȘme suscitent la curiositĂ©, lâentrain et la vivacitĂ© des Ă©lĂšves et de leurs professeurs. De ce point de vue, on ne peut considĂ©rer les poĂšmes que comme les ferments parmi dâautres dâun tel objectif puisque les poĂšmes sont ce quâil y a de plus vivant dans le langage⊠à condition quâon ne les tuent pas dans lâĆuf. Mais nous savons maintenant comment et pourquoi Ă©viter ce bain de sang qui se fait souvent avec les meilleures intentions puisque nous avons en main les dix clĂ©s du problĂšme ! Nous allons maintenant concevoir au moins trois modes de vie avec les poĂšmes Ă lâĂ©cole et au collĂšge, qui sont trois modes bien connus dâorganisation des activitĂ©s scolaires. Nous les dissocions pour les besoins de lâexposĂ© mais ils sont Ă©troitement associĂ©s et ne vont pas lâun sans lâautre. En effet, pas de surprises sans habitudes, pas de nouveautĂ©s sans acquisitions lentes, pas dâentraĂźnements rĂ©guliers sans explorations hasardeuses et pas dâaventures merveilleuses sans de patients prĂ©paratifs⊠Rituels, sĂ©quences et projets vont alors sâentrelacer pour faire vivre les apprentissages avec les poĂšmes. Les rituels constituent des habitudes que les sĂ©quences permettent de rĂ©flĂ©chir pendant que les projets organisent des sorties la poĂ©sie demande de changer un peu les habitudes langagiĂšres y compris en didactique. Alors, nâhĂ©sitons pas Ă dĂ©placer les habitudes et la langue de bois⊠Lâessentiel consiste Ă observer si nos Ă©lĂšves sây retrouvent, câest-Ă -dire apprennent et aiment. Comment concevoir rituels, sĂ©quences et projets ? Commençons par esquisser une conception de la sĂ©quence. Les poĂšmes demandent de ne pas se fier Ă un seul modĂšle de sĂ©quence dâapprentissage. Il est vrai que lâĂ©cole habitue dans ce domaine Ă ce quâon appelle le moment de poĂ©sie » et que selon les modĂšles didactiques ou le niveau, il est tantĂŽt orientĂ© vers un moment » tout Ă fait original et spĂ©cifique, soit vers un moment » qui se confond avec dâautres. Dâun cĂŽtĂ© le moment » qui, de la maternelle au cycle 3, Ă©volue de lâapprentissage collectif dâune comptine ou poĂ©sie » dans une situation fonciĂšrement interlocutive du type chorale Ă lâapprentissage individuel dâune poĂ©sie » pour la rĂ©citer et lâillustrer ; ce dernier moment Ă©tant accompagnĂ© de menues explications prenant parfois la forme dâun questionnement de texte » pour mieux comprendre la poĂ©sie ». Dâun autre cĂŽtĂ© le moment » qui, de la maternelle au cycle 3, engage dans la crĂ©ation » câest-Ă -dire dans une production dâĂ©crit » plus ou moins libre, parfois fort contrainte, lequel moment se conçoit comme une occasion propice Ă lâactivitĂ© dâĂ©criture inventĂ©e en allant de la dictĂ©e Ă lâadulte bien plus souvent collective quâindividuelle Ă lâexpression Ă©crite avec premier jet » et grille de réécriture Ă©laborĂ©e en commun, câest-Ă -dire sous lâĆil vigilant de lâenseignant qui veille Ă ce que le texte produit apparaisse comme conforme Ă un modĂšle textuel si ce nâest poĂ©tique. Il est vrai que de nombreuses classes dans la tradition dâun Freinet, mettent ce moment sous le rĂ©gime de lâexpression libre non sans renforcer une autre mythologie aussi pernicieuse que la premiĂšre qui vise lâimitation dâun moule syntaxique pendant que la seconde vise lâimitation dâun cadre thĂ©matique que le » surrĂ©alisme a offert Ă Freinet et ses Ă©mules le texte libre » valorisant la dimension imaginative de lâactivitĂ© en nâengageant que la lecture des images produites, rĂ©duisant ainsi la production langagiĂšre Ă la nomination, dâoĂč une valorisation extrĂȘme des noms, des groupes nominaux, dĂšs quâon est en poĂ©sie ». Nous aimerions proposer des activitĂ©s qui concourent Ă une sĂ©quence avec des poĂšmes sans quâaucune instrumentalisation ne dĂ©tourne les Ă©lĂšves, les lecteurs donc, de leur appropriation personnelle-collective de ces poĂšmes entendons bien quâil sâagit de ne jamais utiliser les poĂšmes comme des prĂ©textes Ă une quelconque activitĂ© qui les ignorerait telle que lâentraĂźnement pour la prononciation correcte du français, la diction rhĂ©torique des textes, lâimitation des modĂšles textuels y compris de ce que dâaucuns appellent le texte poĂ©tique »⊠Les activitĂ©s dâune sĂ©quence avec les poĂšmes viennent simplement rĂ©pondre au souci des programmes concernant les Ćuvres littĂ©raires que les Ă©lĂšves soient mis en contact avec des textes forts, quâils se les approprient par les voies les plus directes, les plus simples, les plus engageantes et respectueuses de chacun. Le modĂšle » dâactivitĂ©, si lâon peut employer ce terme, est celui de la reformulation, mais on comprend aussitĂŽt quâil ne peut y avoir de modĂšle puisque chaque texte demande dâinventer ses reformulations, voire de les multiplier. Le fondement de ces reformulations qui constituent autant de modes singuliers dâappropriation, est la lecture magistrale restitution de lâĆuvre par la voix haute du maĂźtre. Celle-ci permet Ă chaque Ă©lĂšve, quelles que soient ses performances en lecture, dâaccĂ©der Ă lâĆuvre littĂ©raire ; en effet, mĂȘme sâil sâavĂšre incapable de lire seul le texte de lâĆuvre, il est tout Ă fait capable de reformuler lâĆuvre aprĂšs quâon la lui ait transmise de cette maniĂšre ; câest pourquoi aucune Ćuvre littĂ©raire dâimportance dans le dispositif didactique ne doit Ă©chapper Ă ce mode de transmission qui nâempĂȘche nullement que les Ă©lĂšves lisent seul le texte â les activitĂ©s les y encouragent â ou dâautres textes, tout simplement parce quâainsi aucun Ă©lĂšve nâest exclu de la dynamique collective quâouvre la lecture magistrale dâune Ćuvre et les activitĂ©s de reformulation qui vont accompagner cette lecture en vue de son appropriation par chaque Ă©lĂšve â y compris, rappelons-le, lâĂ©lĂšve le moins performant du point de vue des techniques de la lecture. Soit une Ćuvre, lâactivitĂ© dâappropriation de cette Ćuvre par la classe et par chacun des Ă©lĂšves est celle de la multiplication des reformulations se redire, relire, réécrire, jouer, transposer, Ă©voquer, citer, manipuler⊠Cette dĂ©marche est au fond celle que nous proposons pour toutes les Ćuvres littĂ©raires qui constituent le socle commun, et donc le fonds de la culture littĂ©raire commune. Les poĂšmes, nous lâavons dit, se prĂ©sentent dâabord, comme les autres Ćuvres littĂ©raires, sous la forme dâun livre, livre de poĂšmes dâun auteur ou anthologie⊠Ils doivent donc dâabord ĂȘtre abordĂ©s Ă ce titre dans la classe. Câest donc Ă ce titre que les sĂ©quences les considĂšrent dâabord. Nous verrons ensuite dans les rituels et projets, dâautres maniĂšres de les rencontrer, de vivre avec eux. Si les reformulations des Ćuvres sont forcĂ©ment multiples, il nous paraĂźt indispensable de les regrouper, quelle que soit lâĆuvre, dans quatre formes dâactivitĂ©s de reformulation complĂ©mentaires et jamais exclusives les unes des autres mais toujours reliĂ©es voire concomitantes si possible pour une contextualisation plus gĂ©nĂ©rale, voir Martin, mai 2005 1. LâĂ©chelle lexicale il serait plus judicieux de la dĂ©nommer liste lexicale hiĂ©rarchisĂ©e » mais la mĂ©taphore de lâĂ©chelle que chaque Ă©lĂšve se construit pour grimper dans lâarbre textuel si ce nâest au ciel des constellations dâun univers textuel, lâemporterait sur le rappel des Ă©chelles dâacquisition de lâorthographe lexicale » Pothier, 2003 que nous respectons tout Ă fait par ailleurs mais qui nâont rien Ă voir avec cette Ă©chelle, ce parcours de lecture personnel dans un texte prĂ©lever, lister, hiĂ©rarchiser et Ă©ventuellement titrer des Ă©lĂ©ments lexicaux du texte pour en faire ressortir une facette, une dimension, un aspect. Cela reviendrait Ă construire un rĂ©seau qui maille le texte, le traverse soit fragmentairement soit complĂštement et ainsi lâĂ©lĂšve se donnerait des prises pour le relire et pour construire sa comprĂ©hension et son interprĂ©tation. 2. Le jeu dramatique dire le texte ou un fragment mĂȘme rĂ©duit du texte pour que sa lecture engage le corps, sa voix et ses gestes afin dâobserver ce quâil nous fait quand il nous traverse ; afin de sentir ce qui lâanime, constitue sa force, organise les Ă©nergies qui sây rencontrent⊠3. Le documentaire dĂ©couvrir le monde construit avec le texte, avec son Ă©nonciation en particulier et pas seulement son Ă©noncĂ©, en reconfigurant ce monde dans un texte documentaire qui met ce monde en rĂ©sonance avec les prĂ©occupations, les interrogations et les mondes dĂ©jĂ construits par les lectures et les expĂ©riences antĂ©rieures. Sachant bien quâil ne sâagit pas ici de construire une vĂ©ritĂ© scientifique mais dâagencer des informations, des notations pour apercevoir une vĂ©ritĂ© du texte dans et par sa lecture. Câest pourquoi lâexercice aurait pu aussi bien sâappeler documenteur » car il se peut que ses informations ne soient pas validĂ©es scientifiquement si elles doivent toujours lâĂȘtre comme vĂ©ritĂ©s dâexpĂ©rience de lecture. Et si mensonge il y avait, on nâoubliera pas la leçon dâAragon avec son mentir-vrai ». 4. La parole vive faire rĂ©sonner le texte lu des paroles quâil recĂšle mais quâil ne livre pas explicitement en donnant la parole Ă des protagonistes du texte, animĂ©s ou inanimĂ©s, protagonistes qui ne lâont pas apparemment mais qui peuvent trĂšs vite la prendre si on la leur donne ; il sâagit dâĂ©crire en je » autant de reformulations incidentes et dialogiques qui vont rĂ©sonner dans la pluralitĂ© les dire du texte souvent localement, parfois plus globalement â par exemple en fin de parcours⊠pour de plus amples dĂ©veloppements sur cette derniĂšre activitĂ©, voir Martin, septembre 2005. Ces quatre activitĂ©s conduites, on peut affirmer que chaque Ă©lĂšve Ă sa façon et la classe dans cette configuration forcĂ©ment singuliĂšre puisque articulĂ©e avec ce quâelle aura auparavant lu et fait, se sont appropriĂ©s lâĆuvre littĂ©raire et en lâoccurrence lâĆuvre poĂ©tique. Mais on perçoit bien que cela demande parallĂšlement un Ă©tayage. Les rituels et les projets vont lâapporter puisque les premiers vont permettre de renforcer des savoir-faire initiĂ©s dans les sĂ©quences et les seconds vont Ă©largir le sens dâactivitĂ©s forcĂ©ment rĂ©duites aux conditions de la classe. On aura compris que le cĆur du dispositif la sĂ©quence est bien scolaire, quâil est expĂ©rientiel et rĂ©flexif sans nĂ©gliger la dimension rĂ©pĂ©titive et entraĂźnante des rituels ni celle plus aventureuse des projets. Les poĂšmes devraient toujours sây retrouver, du moins jamais se perdre, puisque jamais ne devraient sâimposer naturellement dans ce dispositif didactique les sĂ©parations traditionnelles que nous avons dâores et dĂ©jĂ bien pointĂ©es dans la perspective dâune redĂ©couverte du langage avec les poĂšmes. Proposition dâorganisation de sĂ©quences littĂ©raires et donc poĂ©tiques sur deux semaines en cycle 2 et trois semaines en cycle 3. La durĂ©e Ă©tant liĂ©e Ă lâimportance quantitative de lâĆuvre, certaines sĂ©ances peuvent donc sây dĂ©doubler mais le principe est fondamentalement le mĂȘme . Pour le collĂšge, on adaptera cette durĂ©e en comptant les sĂ©ances. Certaines sĂ©ances peuvent ĂȘtre plus longues que dâautres, bien entendu. Ce modĂšle » est bien Ă©videmment Ă adapter aux temporalitĂ©s de la classe entre dĂ©but et fin dâannĂ©e et de lâĆuvre plus ou moins longue. SĂ©ances 1 2 3 4 5 6 7 Lecture magistrale 1 1 1 2 1 Ăchelle lexicale 2 2 Jeu dramatique 2 1 1 3 Documentaire 2 bis 1 bis 1 Parole vive 2 1 bis Les sept sĂ©ances montrent lâorganisation des activitĂ©s suivantes La premiĂšre sĂ©ance est dâabord consacrĂ©e Ă une dĂ©couverte de lâĆuvre par la lecture magistrale inaugurale puis par les premiĂšres prises lexicales personnelles sur lâĆuvre. La seconde sĂ©ance poursuit si ce nâest achĂšve la lecture intĂ©grale et magistrale de lâĆuvre et ouvre deux ateliers concomitants jeu dramatique et documentaire qui vont se poursuivre lors de la troisiĂšme sĂ©ance pour organiser quelques Ă©changes des travaux quelques rĂ©alisations dramatiques et documentaires prĂ©sentĂ©es et apprĂ©ciĂ©es. La quatriĂšme sĂ©ance dĂ©place les activitĂ©s avec lâĆuvre en commençant par une relecture magistrale en relisant des passages dĂ©licats ou choisis par les Ă©lĂšves⊠pour lancer lâactivitĂ© dâĂ©criture personnelle, la parole vive. La cinquiĂšme sĂ©ance croise lecture magistrale et rĂ©alisations dramatiques des Ă©lĂšves veillant Ă ce quâun maximum dâĂ©lĂšves sâexpriment devant la classe, en particulier ceux qui nâauraient pas eu lâoccasion de le faire lors de la troisiĂšme sĂ©anceâŠ. La sixiĂšme sĂ©ance permet Ă tous les Ă©lĂšves dâachever leurs travaux personnels, de les reprendre, de les amĂ©liorer. Enfin, la septiĂšme sĂ©ance vient couronner la sĂ©quence en la bouclant sur une reprise de lâĆuvre par lâenseignant et les Ă©lĂšves lecture magistrale et rĂ©alisations dramatiques qui ouvre Ă une derniĂšre prise sur lâĆuvre peut-ĂȘtre plus problĂ©matique reprise adaptĂ©e de lâactivitĂ© de lâĂ©chelle lexicale afin de lancer un dĂ©bat pour conclure provisoirement du point de vue du travail de lâĆuvre mais dĂ©finitivement du point de vue de son inscription obligatoire dans le temps scolaire. On remarquera que le dernier mot est aux Ă©lĂšves ils font vivre lâĆuvre montrant que cette derniĂšre est maintenant leur responsabilitĂ© alors que câest lâenseignant qui lâavait ouverte. Passage dâĆuvre qui est un passage de sujet â nous y reviendrons dans des billets ultĂ©rieurs. Fables et voix, livres et lecteurs Unpeu d'histoire Des cartes articulĂ©es, cartonnĂ©es et imprimĂ©es Ă©taient dĂ©jĂ vendues au tout dĂ©but du XXĂšme siĂšcle. En 1904, Jacques Fronton, chroniqueur au Journal du Dimanche, signalait leur apparition Ă la Foire de Paris, sur les stands des maisons de cartes postales qui y sont « lĂ©gion ». « La nouveautĂ© du jour, Ă©crivait-il, câest la carte postale
Illustration Pauline NunezCâest la seconde fois que nous sommes amenĂ©s Ă faire un bilan de lâannĂ©e Ă©coulĂ©e, et ce sera peut-ĂȘtre la derniĂšre car lâexercice brille souvent par son incapacitĂ© Ă retranscrire les sensations perçues au cours des douze derniers mois. De surcroĂźt, Ă lâĂ©poque oĂč des clips sur YouTube ont remplacĂ© des singles dans des disquaires de briques et mortier, les albums ont-ils toujours autant de sens ? Chez certains artistes, qui rééditent leurs disques de nombreuses fois avec de nouveaux titres afin de booster les Ă©coutes sur les sites de streaming, peut-ĂȘtre pas, pour ceux que nous dĂ©fendons ici, somme toute, oui. Il y a toujours cette notion presque artisanale de crĂ©er une Ćuvre aux contours dĂ©finis. Peut-ĂȘtre celle-ci â comme nos classements respectifs â prendra-t-elle un jour une autre forme. Il est dâailleurs tout autant probable quâavec le recul des annĂ©es, cet exercice de style se modifiera et sâaffinera. Pour lâinstant, nous vous livrons les listes de chacun des auteurs ci-dessous sans filtre, brutes, histoire que vous puissiez identifier ceux avec lesquels vous avez le plus dâaffinitĂ©s tout le monde fait ça, rassurez-vous, vous pouvez cliquer sur leurs noms et que vous y dĂ©couvriez un, soyons fou, plusieurs disques Ă chĂ©rir et Ă votre tour. Une chose est cependant sĂ»re ces albums ont piquĂ© notre curiositĂ© en 2019, nous avons eu envie dâen dĂ©fendre un certain nombre sur ce site et il nây a pas de raison que cela soit diffĂ©rent en Gimenez-FauvetyCLASSEMENT COLLECTIF1. Cate le Bon, Reward Mexican Summer 2. Purple Mountains, S/T Drag City 3. Weyes Blood, Titanic Rising Sub Pop 4. Ela Orleans, Movies For Ears Night School 5. Sunn O, Life Metal / Pyroclasts Southern Lords Rdcs6. Big Thief, 4AD 7. Chromatics, Closer To Grey Italians Do It Better 8. Corridor, Junior Sub Pop 9. Fontaines ., Dogrel Partisan Records 10. Helado Negro, This Is How You Smile RvngIntl. 11. JĂ©rĂŽme MiniĂšre, Une clairiĂšre Objet Disque 12. Kim Gordon, No Home Record Matador 13. Lispector, Small Town Graffiti Teenage Menopause 14. Nick Cave, Ghosteen Ghosteen Ltd / Mute 15. Tim Presleyâs White Fence, I Have To Feed Larryâs Hawk Drag City16. Tyler, The Creator, Igor Columbia 17. Studio Electrophonique, Buxton Palace Hotel Violette Records 18. Arlt, Soleil EnculĂ© Objet Disque 19. Arthur Russell, Iowa Dream Audika 20. Astrobal, Lâinfini, lâunivers et les mondes Karaoke Kalk 21. Biche, La nuit des PersĂ©ides Banquise records 22. Big Thief, Two Hands 4AD 23. Bill Callahan, Sheperd in a Sheepskin Vest Drag City 24. Cate Le Bon & Bradford Cox â Myths 004 Mexican Summer 25. Chris Cohen, S/T Captured Tracks 26. Fabio Viscogliosi, Rococo Objet Disque 27. Hannah Diamond, Reflections PC Music 28. Infinite Bisous, Period Tasty Morsels 29. Little Simz, Grey Area Age 101 Music 30. Lizzo, Cuz I Love You Atlantic 31. Malik Djoudi, TempĂ©raments Cinq 7 32. Matana Roberts, Coin Coin Chapter Four Memphis Constellation 33. Michael Kiwanuka, Kiwanuka Polydor/Interscope 34. Om, BBC Radio one Drag City 35. Pastel Coast, Hovercraft autoproduit 36. Requin Chagrin, Semaphore KMS Disques 37. Robert Forster, Inferno Tapete Records 38. Rustin Man, Drift Code Domino 39. Steve Gunn, The Unseen In Between Matador 40. The Reds, Pinks & Purples, Anxiety Art Pretty Olivia recordsNDLR Tous les albums sont Ă©coutables en cliquant sur leur INDIVIDUEL Thomas Bartel1. Philippe Katerine, Confessions Cinq 7 2. Chromatics, Closer to Grey Italians do it better 3. Sleater Kinney, The Center wonât Hold Mom+Pop music 4. The Coathangers, The Devil You Know Suicide Squeeze Records 5. Boy Harsher, Careful Nude Club 6. Jenny Hval, The Paractice of Love Sacred Bones Records 7. Drahla, Useless Coordinates Captured Tracks 8. Girlpool, What Chaos Is Imaginary Anti- 9. Purple Mountains, S/T Drag City 10. Ela Orleans, Movies for Ears an Introduction to Ela Orleans Night School records Christophe Basterra12 Chansons Lispector, Seabird Tindersticks, For The Beauty Buvette, In Real Life Stephan Eicher, PrisonniĂšre Chromatics, Youâre No Good Vincent Delerm, Panorama Single, Un Roce Al Paso ClĂ©a Vincent, Laisse Toi Aller Piroshka, Whatâs Next Emmanuel Tellier, Stella, Alone With The Sky Vendredi Sur Mer, Chewing-gum Anthony Reynolds, I Was Born1 Mini-Album Studio Electrophonique, Buxton Palace Hotel Violette Records 1 Réédition Migala AsĂ Duele Un Verano1 Chanson qui ne date pas de 2019 Ultimate Painting, The Ocean4 Concerts New Order, Nuits de FourviĂšre, Lyon, 28 juin The Cure, Mad Cool, Madrid, 13 juillet Sr. Chinarro, Life Is A Minestrone, Charenton, 8 septembre Chromatics, Pitchfork, Paris, 1er novembre1 Lecture CĂ©cile Coulon, Riom, 5 juillet1 Exposition La Movida, Rencontres photographiques dâArles1 Livre Manuel Vilas, Ordesa1 Livre Musique » Phoenix, LibertĂ©, ĂgalitĂ©, Phoenix!3 Films Douleur Et Gloire, Pedro Almodovar Le Roi Lion, Jon Favreau Je Ne Sais Pas Si Câest Tout Le Monde, Vincent DelermTrop de disparitions Edouard BertrandKit Sebastian, Mantra Moderne Mr Bongo Biche, La Nuit des PersĂ©ides Banquise Records Strawberry Guy, Taking My Time To Be Melodic Anderson .Paak, Ventura Aftermath Entertainment Holy Hive, Harping feat. Mary Lattimore Big Crown Records Whitney, Forever Turned Around Secretly Canadian Steve Lacy, Apollo XXI 3qtr Chris Cohen, Chris Cohen Captured Tracks Drugdealer, Raw Honey Mexican Summer Sault, 5 Forever Living OriginalsConcerts 1. Khruangbin, Bataclan 2. Pearl & The Oysters, Point EphĂ©mĂšre 3. Sunset Rollercoaster, La Maroquinerie 5. Drugdealer, Point EphĂ©mĂšre 4. The Holydrug Couple, Supersonic 5. Jonathan Personne, Espace B Vincent Chanson1. Sandro Perri, Soft Landig Constellation 2. Compilation, Kankyo Ongaku, Japanese Ambiant, Environmental and New Age Music 1980-1990 Light in the Attic 3. Autechre, Warp Tapes 89-93 Free Download 4. Mark Stewart, Learning to Cope with Cowardice Mute â Reissue 5. Matmos, Plastic Anniversary Thrill Jockey 6. Caterina Barbieri, Ecstatic Computation Mego 7. Cosey Fanni Tutti, TUTTI Conspiracy International 8. Stereoloab, Expanded Album Reissues 7 vol. Duophonic UHF Disks/Warp 9. Ryuchi Sakamoto, Thousands Knives We Want Sound â Reissue 10. Vanishing Twin, The Age of Immunology Fire Records ClĂ©ment ChevrierBig Thief, 4ADBig Thief, Two Hands 4ADBertrand Belin, Persona Cinq7/WagramBillie Eilish, When We All Fall Asleep, Where Do We Go? Darkroom/InterscopeEl Hijo, Capital Desierto Intromusica RecordsWeyes Blood, Titanic Rising Sub PopErnest Hood, Neighborhoods Thiestlefield MusicJĂ©rĂŽme MiniĂšre, Une clairiĂšre Objet DisqueRobert Forster, Inferno TapeteMatana Roberts, COIN COIN Chapter Four Memphis ConstellationComme jâai mis deux disques dâun mĂȘme groupe, il y a ce onziĂšme Purple Mountains, Purple Mountains Sylvain Collin6 albums SUNN O Life Metal & Pyroclasts Southern Lord Wilco, Ode to Joy ADA Global Chelsea Wolfe, Birth of Violence Sargent House OM, BBC Radio 1 Drag City Big Scenic Nowhere, Vision Beyond Horizon Heavy Psych Sounds6 rééditions Eno & Lanois, Apollo Atmospheres And Soundtracks Virgin Tangerine Dream, In Search of Hades The Virgin Recordings 1974-1979 Virgin V/A WXAXRXP Sessions Warp Prince, 1999 Warner Green River, Rehab Doll & Dry As a Bone Sub Pop1 Concert Power Trip le 20/06/2019 au Petit Bain Philippe DumezJĂ©rome MiniĂšre, Une clairiĂšre Objet DisqueFabio Viscogliosi, Rococo Objet DisqueMuddy Monk, Longue Ride Half Awake RecordsThird Coast Percussion Band, Perpetulum Philip Glass, Gavin Bryars, Third Coast Percussion Orange Moutain MusicKali Malone, The Sacrificial Code Ideal RecordingsCorridor, Junior Sub PopDavid Lafore, Chip Chip David LaforeEn 2019, je me suis posĂ© des vraies questions, comme faire un choix le 22 novembre entre le concert de Kazu Makino aux Etoiles, la lecture de Blandine Rinkel Ă la Maison de la poĂ©sie et la projection de CĂ©sar et Rosalie Ă Vincennes prĂ©sentĂ©e par Jean-Loup Dabadie. En 2019, jâai revendu ma place pour aller voir The Sisters of Mercy au Bataclan et je crois que jâai bien fait. En 2019, je suis allĂ© assister Ă un concert solo de Wayne Hussey dans lâespoir de refaire avec lui le selfie rĂ©alisĂ© 30 ans plus tĂŽt lors du showcase de The Mission au Virgin Megastore ; mais câĂ©tait le concert le plus ennuyeux de lâannĂ©e et je me suis sauvĂ© avant la fin. En 2019, je ne suis pas allĂ© revoir The Cure ni Clan of Xymox mais jâai constatĂ© que The Jesus & Mary Chain jouaient beaucoup mieux que quand jâĂ©tais allĂ© les applaudir Ă la sortie de Automatic. En 2019, je nâaurai ratĂ© sous aucun prĂ©texte mon rendez-vous annuel avec Chameleons Vox. En 2019, jâai enfin vu un bon concert de The Chromatics, il Ă©tait temps. En 2019, jâai frissonnĂ© quand jâai entendu, en ouverture de Perdrix de Erwan Le Duc, Entrez dans le rĂȘve de GĂ©rard Manset, je nâavais pas autant frissonnĂ© au cinĂ©ma depuis que jâavais reconnu, lors de Amanda de Mikhael Hers, Hair Shoes des Pale Saints. En 2019, jâai revu Dogbowl et je me suis rendu compte que, si je ne les avais pas Ă©coutĂ©es depuis au moins 10 ans, je reconnaissais encore toutes ses chansons dĂšs les premiers accords. En 2019, je nâai pas achetĂ© de disques mais jâai achetĂ© trois fanzines Le Gospel, Eau de javel, Langue pendue. En 2019, jâai encadrĂ© une photo de David Berman dont Edie Vee mâavait offert un tirage. En 2019, jâai bĂ©ni Bertrand Belin dâavoir rajoutĂ© sur la nouvelle Ă©dition de Persona la version live Ă lâOlympia de LâOpĂ©ra, parce que câĂ©tait quelque chose, la version live de LâOpĂ©ra Ă lâOlympia. En 2019, jâaurais bien aimĂ© que Bertrand Belin nâoublie pas sur la nouvelle Ă©dition de Persona la version acoustique de Ne sois plus mon frĂšre interprĂ©tĂ©e Ă la Maison de la PoĂ©sie, parce que câĂ©tait quelque chose, la version acoustique de Ne sois plus mon frĂšre interprĂ©tĂ©e Ă la Maison de la PoĂ©sie. En 2019, quelques heures avant le concert de Kraftwerk Ă la Philharmonie, jâai remontĂ© le canal de lâOurcq en vĂ©lo jusquâĂ la forĂȘt de Sevran et jâai Ă©tĂ© déçu de ne pas croiser Ralf Hutter. En 2019, jâai vu trois concerts sur les quatre quâa donnĂ© David Lafore au théùtre ThĂ©nardier, Ă Montreuil, et il mâa fait rire Ă chaque fois. En 2019, jâai vu deux concerts sur les trois que John Cale a donnĂ© Ă la CitĂ© de la Musique, et, en comparant les setlists, jâai lâimpression que jâai ratĂ© le meilleur. En 2019, pour la premiĂšre fois de ma vie, je suis allĂ© Ă©couter du jazz et contrairement Ă ce que je redoutais je nâai pas dĂ©testĂ© ça. En 2019, jâai trouvĂ© que la meilleure Ă©pitaphe pour Daniel Johnston Ă©tait le texte que Thomas Vinau avait Ă©crit sur lui en 2016 dans 76 clochards cĂ©lestes ou presque. En 2019, jâavais dit que jâirais Ă©couter une fois par mois des cantates de Bach au Temple du Foyer de lâAme rue du Pasteur Wagner ainsi que lâintĂ©grale de Motets de Couperin Ă la Paroisse Notre-Dame des Blancs-Manteaux mais cette rĂ©solution nâest pas allĂ© plus loin que le mois de janvier. En 2019, jâai Ă©tĂ© au pot de dĂ©part de Michelle Soulier. En 2019, jâai Ă©tĂ© Ă©mu en dĂ©couvrant ces images muettes en super-8 du Velvet Underground jouant le 15 octobre 1969 lors dâun festival en plein air. En 2019, en assistant Ă la dispersion dâune collection de disques vinyles, jâai laissĂ© passer un pirate de Jonathan Richman que je ne connaissais pas et que je nâai jamais trouvĂ© recensĂ© sur internet jâhĂ©site depuis Ă contacter la personne qui lâa achetĂ© sous mes yeux pour savoir si je peux venir lâĂ©couter chez lui. En 2019, jâai respectĂ© le vĆu pieux affichĂ© Ă lâentrĂ©e de La Gare Offre-toi, offre-nous un seul putain de lieu Ă Paris oĂč lâon ne parle pas Ă voix haute pendant que ça joue ». En 2019, je nâai toujours pas Ă©prouvĂ© de lassitude Ă revoir pour la Ă©niĂšme fois Marc Melia. En 2019, jâai effectuĂ© 1300 km pour aller voir Dominique A. en concert, câest Ă ce jour la plus longue distance que jâai parcouru pour aller voir Dominique A. En 2019, jâai admirĂ© ce spectateur qui portait un t-shirt Teenage Fanclub pendant la reprĂ©sentation de La passion selon St-Matthieu Ă la Philharmonie. Le 22 novembre 2019, je suis finalement allĂ© Ă©couter Blandine Rinkel Ă la Maison de la PoĂ©sie, jâai eu la chair de poule en reconnaissant, au dĂ©but de son spectacle, les paroles de Our Mutual Friend de The Divine Comedy adaptĂ©es en français et jâai eu la confirmation que jâavais fait le bon choix, ce soir-lĂ . Corentin Durand1. Weyes Blood, Titanic Rising Sub Pop 2. Big Thief, 4AD 3. Issam Hajali, Mouasalat Ila Jacad El Ard Habibi Funk Records 4. Beirut, Gallipoli 4AD 5. Angela Bat Dawid, The Oracle International Anthem Recording Company 6. Arthur Russell, Iowa Dream Audika 7. Nick Cave, Ghosteen Ghosteen Ltd 8. Bill Callahan, Sheperd in a Sheepskin Vest Drag City 9. Sandy Alex G, House of Sugar Domino 10. Caio FalcĂŁo, Vulgar Selo RiscoCinĂ©ma 1. An Elephant Sitting Still, Hu Bo 2. Etre Vivant et le Savoir, Alain Cavalier 3. Synonymes, Nadav Lapid 4. Viendra le Feu, Oliver Laxe 5. Asako I & II, Ryusuke Hamaguchi 6. So Long, My Son, Wang Xiaoshuai 7. Un Grand Voyage Vers La Nuit, Bi Gan 8. Midsommar, Ari Aster 9. Les Eternels, Jia Zhangke 10. Gloria Munci, Robert GuĂ©diguian 11. It Must Be Heaven, Elia Suleiman 12. Les MĂ©tĂ©orites, Romain Lagune 13. Martin Eden, Pietro Marcello 14. Bacurai, Kleber Mendonça Filho 15. Sybil, Justine Triet Baptiste FickAdam Green, Engine of Paradise 30th Century records Jeffrey Lewis and the Voltage, Bad Wiring Don Giovanni Records / Moshi Moshi Records Purple Mountains, S/T Drag City Uranium Club, The Cosmo Cleaners Static Shock Records Amyl And The Sniffers, S/T Rough Trade LâEpee, Diabolique A Recordings / Berreto / Productions Robert Forster, Inferno Tapete V/A â Voulez-Vous Cha-Cha ? Born Bad Jack Lewisâ Akward Energy, LVOV In The Streets Don Giovanni records Lee Hazlewood, 400 Miles from LA 1955-56 Light In The Attic Tom GagnaireTyler, The Creator, Igor Columbia Cate Le Bon, Reward Mexican Summer Hannah Diamond, Reflections PC Music Tiger Tigre, Grrrr ? Err Rec Sean OâHagan, Radum Calls Drag City Astrobal, Lâinfini, LâUnivers Et Les Mondes Karaoke Kalk Beck, Hyperspace Capitol Records, Fonograf Fabio Viscogliosi, Rococo Objet Disque Weyes Blood, Titanic Rising Sub Pop Chris Cohen, Chris Cohen Captured Tracks Carla Dal Forno, Look Up Sharp Kallista Records Thee Oh Sees, Face Stabber Castle Face Pet Shop Boys, Agenda X2 Mazouni, Un Dandy En Exil / AlgĂ©rie-France / 1969-1983 Born Bad Records Chevance etc. â Outremusique Pour Enfants 1974-1985 Born Bad Records Once Upon A Time⊠In Hollywood Original Motion Picture Soundtrack Columbia Coralie GardetCate le Bon, Reward Mexican Summer Weyes Blood, Titanic Rising Sub Pop Records Versing, 10000 Hardly Art Hovvdy, Heavy Lifter Double Double Whammy Dylan Moon, Only the Blues RVNG Intl. SASAMI, SASAMI Domino Golden Daze, Simpatico Autumn Tone Records Froth, Duress Wichita Recordings Jessica Pratt, Quiet Signs City Slang Part Time, Modern History Burger RecordsLa suite ^_^ Stella Donnelly, Beware of the Dogs Secretly Canadian Crumb, Jinx Crumb Records Omni, Networker Sub Pop Records Angel Olsen, All Mirrors Jagjaguwar Big Thief, Two Hands 4AD5 concerts Drugdealer au Point EphĂ©mĂšre le 4 mai Snail Mail Ă la Maroquinerie le 28 mai Adrianne Lenker Ă SOhO Santa Barbara, CA le 5 fĂ©vrier Stella Donnelly au Pop Up du Label le 18 avril Allah Las Ă lâElysĂ©e Montmartre le 4 octobre2 coups de coeur cinĂ©ma Rocketman, Dexter Fletcher Daniel Darc, Pieces of my life, Marc Dufaud et Thierry Villeneuve Alexandre Gimenez-FauvetyInfinite Bisous, Periods Tasty Morsels Corridor, Junior Sub Pop Miel de Montagne, Miel de Montagne Pain Surprise The Proper Ornaments, Six Lenins Tapete Requin Chagrin, SĂ©maphores KMS Pastel Coast, Hovercraft autoproduit Pleasure Principle, S/T Born Bad Balladur, La VallĂ©e Etroite Le Turc MĂ©canique Patience, Dizzy Spells Night School LuneApache, Onironautes Too LongSingles, EPs et mini LPs Tame Impala, Patience Modular Ă Trois sur la Plage, Ă Trois Sur La Plage Gone With the Weed Ray, Jane Wakayama Megattera Julien Chang, Memory Loss Transgressive Carambolage, Carambolage Azbin/Howlinâ Banana Novel, Novel Flemish Eye Beach Youth, Second WW2W Public Interest, Between Erste Theke Tontrager Born Idiot, Coco Trip autproduit Pop Crimes, Debuts autoproduit Ătienne GreibSteve Gunn, The Unseen in Between Matador Gospelbeach, Let it Burn Alive Natural Sound Om, BBC Radio one Drag City Lispector, Small Town Graffiti Teenage Menopause El G, Les particules three four records Purple Mountains, S/T Drag City Fontaines Dongrel Partisan SUNN O, Pyroclasts Southern Lord KG, Jesus Weint Blut Hrzfld Rustin Man, Drift Code Domino Charlene Darling, Saint Guidon lâamour aux 1000 parfums Tony Molina, Songs From San Mateo Country Smoking Room Swervedriver, Future Ruins rock action ARLT, Soleil EnculĂ© objet disque Michel Cloup, Danser Danser Danser sur les ruines Ici dâailleurs Bruit Noir, II/III Ici dâailleurs Lizzo, Cuz I Love You AtlanticRééditions Section 25, Always Now factory benelux Ela Orleans, Movies For Ears Night School Lee Hazlwood, 400 Mile from LA 1955-56 Lights in the attic Gene Clark, No Other 4AD New Order, Movement Rhino The Montgolfier Brothers, Seventeen Stars Caroline True Burial, Tunes 2011-2019 hyperdub The Band, The Band 50th collector edition Capitol Arab Strap, Philophobia Chemikal underground Beat Happening, We Are Beat Happening Domino Dead Meadow, Feathers xemu Sterolab, Emperor Tomato Ketchup Duophonic/Warp The Fall, 1982 Cherry Red The Springfields, S/T SlumberlandFilm yokaire Livre Stephen Morris, Record Pause Play Constable Concert je sais pas Espoir 2020 Les Petites Victimes Matthieu Grunfeld1. The Leisure Society, Arrivals & Departure Ego Drain 2. The Boys With The Perpertual Nervousness, Dead Calm Pretty Olivia 3. The Pernice Brothers, Spread The Feeling Ashmont 4. Bruce Springsteen, Western Stars Columbia 5. Andrew Taylor, Somewhere To Be Rock Indiana 6. The Maureens, Something In The Air Meritorio 7. Nev Cottee, Riverâs Edge Wonderfulsound 8. Slumberjet, World Of Sound Broken Lullaby 9. Doug Tuttle, Dream Road Burger Records 10. Gruff Rhys, Pang ! Rough Trade David JĂ©gou1. Cate Le Bon, Reward Mexican Summer 2. Purple Mountains, Self Titled Drag City 3. Studio Electrophonique, Buxton Palace Hotel Violette Records 4. Lawrence Arabia, Singles Club Honorary Bedouin Records 5. Robert Forster, Inferno Tapete Records 6. The Fat White Family, Serfâs Up! Domino 7. Edwyn Collins, Badbea AEG Records 8. Hot Chip, A Bath Full Of Ecstasy Domino 9. Rustin Man, Drift Code Domino 10. Steve Gunn, The Unseen In Between Matador Elsa KuhnHoney Radar, Ruby Puff Of Dust Whatâs Your Rupture ? Parsnip, When The Tree Bears Fruit Anti Fade Records Cate Le Bon & Bradford Cox, Myths 004 Mexican Summer Trash Kit, Horizon Upset ! The Rhythm Wild Billy Childish & CTMF, Last Punk Standing⊠And Other Hits ! Damaged Goods Bill Orcutt, Odds Against Tomorrow Palilalia Records The World, Reddish Microminiature Comet Gain, Fireraisers, Forever ! Tapete Records J. McFarlaneâs Reality Guest, TA DA Hobbies Galore Kim Gordon, No Home Record Matador Philippe LĂ©vyBlack Midi, Schlagenheim Rough Trade Matias Aguayo, Support Alien invasion Crammed Kim Gordon, No Home Record Matador Uranium Club, The Cosmo Cleaners Static Shock Records SUNN O, Life Metal Southern Lords Rdcs Vatican Shadow, Opium Crop Airstrikes Hospital Productions Clipping , There Existed an Addiction to Blood Sub Pop Nick Cave, Ghosteen Ghosteen Ltd Jac Berrocal, David Fenech & Vincent Epplay, Ice Exposure Blackest Ever Black Automatic, Signal Stones ThrowSingle Fat White Family, Feet DominoLive Dame Area, 30/10/2019, Espace B Ă Paris Nova Materia, 29/03/2019, QuilpĂ©, Chili Marquis de Sade, 22/02/2019, Petit Bain Ă ParisDanse GisĂšle Vienne Crowd, 27/09/2019 au Centre Pompidou Ă Paris Rosario Ligammari1 ex-aequo. Nicolo Carnesi, Ho bisogno di dirti domani Porto Records Ce nâest mĂȘme pas la question de lâexcellente title-track son meilleur morceau depuis Lo Scherzo Infinito ou dâAmore Capitale son meilleur morceau depuis Ho bisogno di dirti domani ou dâune poignĂ©e de bonnes chansons tout court, câest juste que lâintĂ©gralitĂ© de lâalbum-concept sur le temps, donne Ă Ă©couter ce qui se fait de mieux en indie transalpine cette annĂ©e tout en synthĂ©tisant bien cette dĂ©cennie it-pop tip top. Maintenant, pourvu que Nicolo accĂšde Ă la notoriĂ©tĂ© dâun Calcutta. Domani ? 1 ex-aequo. Antha, Spleen 9Ăšme Cercle/Jeune Ă jamais Antha, rappeuse et chanteuse et mĂȘme brillante peintre pop dark signe un premier disque solo solitaire, singulier, homogĂšne, dense, mĂ©lodieux, beau, bleu nuit, autotunĂ©, grave, cuir, Ă©meraude, rubis, saphir, featuring des textes sublimes qui tiennent lâĂ©quilibre entre le littĂ©raire » et la fusion rap-goth-chanson, le tout secouĂ© par des stroboscopes qui tonnent dans un tunnel en pleine descente. En tant que meilleur album in extremis il sort le 13 /12, Spleen est idĂ©al. 3. Madonna, Madame X Interscope Que son retour fasse ni chaud ni froid, que la sauce latino prenne ou ne prenne pas, Ă partir du moment oĂč ça bascule vers le vocoder sur Dark Ballet suivi sans blanc du colossal et trĂšs extended version God control, lâespionne Madame X accompli sa mission bien plus encore que de se renouveler, elle renouvelle lâadmiration. 4. Minuit Machine, Infrarouge Synth Religion Une prĂ©fĂ©rence pour Minuit Machine, deux Françaises sĆurs musicales de Hante dont le Fierce est sorti sur le mĂȘme label, en ce qui concerne les obscuritĂ©s obscures Ă Ă©couter la cold au cou. 5. Sunbeam Sound Machine, Goodness Gracious Dot Dash Recording Parce quâon est quand mĂȘme sur un site dâindie, plus exactement de pop moderne depuis 1991 », et quâau rayon dream pop avec des poussiĂšres shoegaze, il y a cette annĂ©e ce disque comme il sâen faisait⊠en 1991, exemples Just for a day Slowdive ou, bah, Loveless MBV. 6. Canarie, Tristi Tropici Porto Records Câest leur premier album et ce groupe en tant que couple semble ne former quâun ; avec Sfocata, Veliero et Mammiferi, on tient un merveilleux triptyque en face B qui, plus que renvoyer Ă Mac DeMarco leur influence majeure, a le charme Ă la fois guilleret et mĂ©lancolique, certes plus lo-fi, dâun 23 Blonde Redhead. 7. Pierre Daven-Keller, Kino Music KwaĂŻdan Records Le coup de la bande originale dâun film qui nâexiste pas », on nous lâa fait trop de fois. Sauf quâavec Kino Music, cet album existe vraiment. 8. MYSS KETA, Paprika Universal Music Italia Pas trĂšs solo celui-ci vu la flopĂ©e dâinvitĂ©s, pas vraiment un deuxiĂšme disque non plus, plutĂŽt la suite du premier sorti lâan dernier, le super UNA VITA IN CAPSLOCK La Tempesta. Celui-ci est un peu moins super mais bon, si ce faux retour a fait office de prĂ©texte pour que la donna che conta » la femme qui compte » vienne jouer deux fois dans lâannĂ©e Ă Paris, alors câest ce qui compte. 9. Melchior Sultana, Deeper Than It Sound Profound Sound Depuis au moins Mediterran Album 2015, toute la house quâil bidouille se transforme en or. 10. Coma Cose, Hype Aura Asian Fake GĂ©nĂ©ralitĂ© subjective dans la plupart des groupes fĂ©minin/masculin, câest le fĂ©minin qui lâemporte. Coma Cose ne fait pas partie des exceptions de couples mais, sur Beach Boys Distorti, le couplet dĂ©ment du mĂąle dĂ©ment les gĂ©nĂ©ralitĂ©s. Sinon ? Depuis la bombe Anima Lattina, on attendait beaucoup pas ici certes mais dans lâunderground italien si, mĂȘme peut-ĂȘtre trop ; et Ă lâarrivĂ©e, Hype Aura ressemble moins Ă un plat de rĂ©sistance quâĂ quelques amuse-gueules dispatchĂ©s nĂ©anmoins excitants Ă lâusure. Nota Bene Pour des raisons dĂ©ontologiques, lâalbum de Alex Rossi, Domani Ăš unâaltra Notte KwaĂŻdan Records ne figure pas dans ce 1. Douleur et Gloire, Pedro Almodovar 2. Papicha, Mounia Meddour 3. In Fabric, Peter Strickland 4. Jâai perdu mon corps, JĂ©rĂ©mie Clapin 5. DâAgata â Limites, Franck Landron 6. Daniel Darc, Pieces of my life, Marc Dufaud et Thierry Villeneuve 7. Jessica Forever, Caroline Poggi et Jonathan Vinel 8. Dumbo, Tim Burton 9. Bacurau, Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles 10. Parasite, Bong Joon-Ho Chan MassonEla Orleans, Movies for Ears Night School Records Cate Le Bon, Reward Mexican Summer The Radio Dept, I donât need love, iâve got my band just so! Tim Presleyâs White Fence, I Have To Feed Larryâs Hawk Drag City Stephen Malkmus, Groove Denied Domino Records The Chap, Digital Technology Lo Recordings Baston, Primates Howlinâ Banana Records The George Kaplan Conspiracy, Recollected Memories Alter K Fontaines ., Dogrel Partisan Records V/A, MĂ©ga Compil Des Tubes De Darons Vol. 1, Pale Figure Records Xavier MazureAriel Pinkâs Haunted Graffiti, Odditties Sodomies Vol. 2 Mexican Summer Bill Baird, Owl Arthur King Presents Dangerbird Records Tim Presleyâs White Fence, I Have To Feed Larryâs Hawk Drag City Ela Orleans, Movies for Ears Night School Records Cate Le Bon, Reward Mexican Summer Debutante, The Landlord Siltbreeze Le Villejuif Underground, When Will The Flies In Deauville Drop ? Born Bad Records Fat White Family, Serfâs Up! Domino Rocketship, Thanks To You Darla Records The Reds, Pinks And Purples, Anxiety Art Pretty Olivia Records Alex MimikakiPurple Mountains, S/T Drag City Malik Djoudi, TempĂ©raments Cinq 7 Helado Negro, This Is How You Smile RvngIntl. Tim Presleyâs White Fence, I Have To Feed Larryâs Hawk Drag City Simon Says, Epoca Blu Dialect Chromatics, Closer To Grey Italians Do It Better Tyler, The Creator, Igor Columbia Coil, The Gay Manâs Guide To Safer Sex + 2 Musique Pour La Danse Johan Papaconstantino, Contre-jour Animal63 Angel Bat Dawid, The Oracle International Anthem Recording Company Thibaut MoriniĂšreLes annĂ©es se suivent et se ressemblent un peu. Foliage â aprĂšs lâextraordinaire III en 2018 â conserve sa premiĂšre place chez moi en 2019, et consolide par la mĂȘme occasion son assise dâĂ©gĂ©rie indie pop. LâĂ©vĂ©nement musical de lâannĂ©e est Ă mon sens la signature de Corridor chez Sub Pop. PremiĂšre signature francophone chez les amĂ©ricains â ne serait-ce pas un signe trĂšs positif pour ce qui pourrait se passer chez nous ? Dâailleurs, ils sont accompagnĂ©s dans mon top par pas moins de trois autres projets montrĂ©alais Men I Trust, MUNYA, et JĂ©rĂŽme MiniĂšre qui sây est exilĂ© depuis bientĂŽt 25 ans. Plus proches de nous, jâai Ă©galement placĂ© lâattendu premier album des parisiens de Biche, le nouvel essai chanson-progressive dâAstrobal, le premier album des charmants Pastel Coast, ainsi que le second LP de Marble Arch. Tout ça est complĂ©tĂ© par lâindie lo-fi de The Reds, Pinks & Purples qui ravira Ă nâen pas douter les amateurs de mignonnes guitares jangly comme moi. Foliage, Take Z Tapes The Reds, Pinks & Purples, Anxiety Art Pretty Olivia records Astrobal, Lâinfini, lâunivers et les mondes Karaoke Kalk Corridor, Junior Sub Pop MUNYA, Munya Luminelle records Men I Trust, Oncle Jazz autoproduit Pastel Coast, Hovercraft autoproduit JĂ©rĂŽme MiniĂšre, Une clairiĂšre Objet Disque Biche, La nuit des PersĂ©ides Banquise records Marble Arch, Children of the Slump GĂ©ographie Pauline NuñezLispector, Small Town Graffiti Teenage Menopause RecsLuke Temple, Both-And Native Cat RecsCate Le Bon & Bradford Cox, Myths 004 Mexican SummerSpelling, Mazy Fly Sacred BonesMega Bog, Dolphine Paradise Of BachelorsSpencer Radcliffe & Everyone Else, Hot Spring Run For CoversAldous Harding, Designer 4ADTashi Wada w/ Yoshi Wada & Friends, Nue FRKWYS RVNG Intl.Solange, When I Get Home Columbia, Saint Records Cate Le Bon, Reward Mexican SummerLiveElla Point ĂphĂ©mĂšre, Convention des Labels indĂ©pendantsBig Thief, TINALSYoha Hito, Mains dâĆuvresJorge Elbrecht + Suoni Sognati, ZorbaBBMix avec Le Villejuif Underground, Billy Childish, FĂ©licia Atkinson, Midori Takada, CarrĂ© Bellefeuille HĂ©lĂšne PeruzzaroLittle Simz, Grey Area Age 101 Music Sampa The Great, The Return Ninja Tune Kindness, Somehting Like A War Female Energy Danny Brown, uknowhatimsayinÂż Warp Loyle Carner, Not Waving, But Drowning AMF Records JPEGMAFIA, All My Heroes Are Cornballs EQT Recordings Soundwalk Collective with Patti Smith, Mummer Love Bella Union Helado Negro, This Is How You Smile RVNG Intl. Raphael Saadiq, Jimmy Lee Columbia Skinny Pelembe, Dreaming Is Dead Now Brownswood Recordings Grosse purge de lâannĂ©e le concert de Steve Lacy Ă La Cigale. Nicolas PlommĂ©e1. Fontaines Dogrel Partisan/PIAS 2. Malik Djoudi, TempĂ©raments Cinq7/Wagram 3. Lizzo, Cuz I Love You Atlantic/Warner 4. Michael Kiwanuka, Kiwanuka Mercury/Universal 5. ClĂ©a Vincent, Nuits Sans Sommeil Midnight Special/Believe-Musicast 6. Nick Cave & The Bad Seeds, Ghosteen Ghosteen Ltd/AWOL/PIAS 7. Tindersticks, No Treasure But Hope City Slang/PIAS 8. Richard Hawley, Further BMG/PIAS 9. Francis Lung, A Dream Is U Memphis Industries/Bertus 10. Africa Express, Egoli Africa Express/PIAS CĂ©dric Rassat1. Arlt, Soleil EnculĂ© Objet Disque/Murailles 2. 75 Dollar Bill, I Was Real Thin Wrist 3. Matana Roberts, Coin Coin Chapter Four Memphis Constellation 4. Bill Callahan, Shepherd in Sheepskin Vest Drag City 5. Damien Jurado, In the Shape of a Storm Mama Bird 6. Moon Duo, Stars Are the Light Sacred Bones 7. Ezra Furman, Twelve Nudes Bella Union 8. Red, Felk Moon Bisou 9. Berceau Des VolontĂ©s Sauvages, Seuil Altaar 10. Howe Gelb, Gathered Fire Pauline RichardPurple Mountains, S/T Drag CIty Fontaines Dogrel Partisan Records Tindersticks, No Treasure But Hope City Slang Little Simz, Grey Area Age 101 Music Deerhunter, Why Hasnât Everything Disappeared? 4AD Michael Kiwanuka, Kiwanuka Polydor/Interscope Warmduscher, Tainted Lunch The Leaf Label Hidrogrenesse, JoterĂas Bobas AustrohĂșngaro Oh Sees, Face Stabber Castle Face Records Requin Chagrin, Semaphore KMS Disques Renaud SachetLispector, Small Town Graffiti Teenage Menopause SinaĂŻve, Tabula Rasa BC Maison Neuve, Vivi Sauvage Hicks & Figuri, Navaja Herzfeld Fange, Punir Throatruiner V/A, Chevance Born Bad PLL feat. Abdoul & DJ Sebb, Trotinette YT Thomas Pradier, OĂč cette histoire nous mĂšnera Lunadelia Victoire Chose, S/T Teenage Menopause Walter & Lavergne, S/T Pop Life Thomas SchwoererCaterina Barbieri, Ecstatic Computation Mego Akasha System, Echo Earth 100% Silk Arthur Russell, Iowa Dream Audika Ela Orleans, Movies For Ears Night School Records Steve Gunn, The Unseen in Between Matador Kit Sebastian, Mantra Moderne Mr Bongo Big Thief, 4AD / Beggars Aldous Harding, Designer 4AD Chris Cohen, Chris Cohen Captured Tracks Weyes Blood, Titanic Rising Sub Pop / PIAS Tyler, The Creator, Igor Columbia Th Da Freak, Freakenstein Howlinâ Banana Records Lispector, Small Town Graffiti Teenage Menopause Ariel Pinkâs Haunted Graffiti, Odditties Sodomies Vol. 2 Mexican Summer Victor Thimonier1. Arthur Russell, Iowa Dream Audika2. Cass McCombs, Tip of the Sphere Anti-3. Weyes Blood, Titanic Rising Sub Pop Michel ValentePavo Pavo, Mystery Hour Bella Union Emmanuel Tellier, La disparition de Everett Ruess December Square Studio Electrophonique, Buxton Palace Hotel Violette Records Oso Oso, Basking in the glow Triple Crown Modern Nature, How to live Bella Union Chromatics, Closer to grey Italians do it better Olivier Marguerit, Ă terre ! Vietnam / Because Helado Negro, This is how you smile RVNG Intl Alexis Neon, Seven Windows EP 1346771 Records DK Adam Green, Engine of paradise 30th century records Fred ValionWeyes Blood, Titanic Rising Sub Pop Big Thief, 4AD Cate Le Bon, Reward Mexican Summer Bat For Lashes, Lost Girls Awal/Bat For Lashes Kim Gordon, No Home Record Matador Rose Elinor Dougall, A New Illusion Vermilion Records The Japanese House, Good at Falling Dirty Hit Beabadoobee, Loveworn EP Dirty Hit Alma Forrer, LâAnnĂ©e du loup BMG Divers, Self Discovery For Social Suvival Original Motion Picture Soundtrack Mexican Summer Ămilien VilleroyLP 1. 100 Gecs, 1000 Gecs Dog Show Records 2. GFOTY, GFOTV n/a 3. 3776, Saijiki Natural Make 4. Yeule, Serotonin II Bayonet Records 5. Tami T, High Pitched and Moist n/a 6. Glass Beach, The First Glass Beach Album Run For Cover Records 7. Kokoko!, Fongola Transgressive Records 8. Black Dresses, Love and Affection For Stupid Little Bitches n/a 9. Tyler, The Creator, Igor Columbia 10. Hannah Diamond, Reflections PC MusicEP 1. Black Dresses, Dreams Come True 2019 2. Guerilla Toss, What Would the Odd Do?3. Ana Roxanne, ~~~4. Lim Kim, Generasian 5. Prince Rama, Rage In PeaceSingles 1. 100 Gecs, Money Machine 2. Hannah Diamond, Invisible 3. Rosalia, A PalĂ© 4. Lizzo, Juice 5. Slayyyter, MineLive 1. Stereolab, Villette Sonique Paris2. Rosalia, Salle Pleyel Paris3. Matmos, Instants ChavirĂ©s MontreuilFilm Asako 1 & 2, Ryusuke HamaguchiJeu vidĂ©o Disco Elysium, par ZU/AM Danny WildeEn 2025 autant dire aprĂšs-demain, AngĂšle aura 30 ans. On parlera peut-ĂȘtre de son album de la maturitĂ© ». Ou bien on lâaura complĂštement oubliĂ©e. Ou bien elle survivra sous la forme dâun mĂšme internet, avec Jain, Pomme, Suzane, EugĂ©nie et autres poupĂ©es rĂ©seaux-solubles. Paradoxe des temps on est dans un monde de vĂ©tĂ©rans, mais les choses vont trop vite pour prendre racine. Cette annĂ©e, Van Morrison a sorti un nouveau disque. Beck aussi. Quelle diffĂ©rence ? Ce sont des vieux. Qui survivent, certes. Quoi quâon dise, câest mieux que dâĂȘtre mort. Quoique. Leonard Cohen a bien sorti un nouveau disque, mĂȘme refroidi. Plus acclamĂ© que sâil Ă©tait encore lĂ la mort nâest plus un point final, câest un label rouge, une rosette Ă la boutonniĂšre. Les Pixies, eux, ont le tort dâĂȘtre encore vivants, quand tant de fans historiques no Kim, no Deal » les voudraient morts et enterrĂ©s. Au dĂ©but, jâai dĂ©testĂ© Beneath the Eyrie, leur nouveau disque. Mais je me souviens quand Trompe le Monde est sorti, jâavais aussi commencĂ© par ne pas lâaimer. JâĂ©tais déçu, aprĂšs avoir usĂ© ma cassette de Bossanova jusquâĂ la corde. Bref. JusquâĂ date rĂ©cente je faisais rĂ©guliĂšrement ce rĂȘve, toujours le mĂȘme jâĂ©tais chez un disquaire et je trouvais un single des Pixies que je ne connaissais pas, sorti de nulle part. DâĂ©poque, Ă©videmment. La vĂ©ritĂ©, câest quâon voudrait tous que le temps sâarrĂȘte. Un jour sans fin, le film avec Bill Murray, nâa rien dâun cauchemar câest un rĂȘve quâon caresse en secret. Celui de se rĂ©veiller chaque matin dans un monde toujours nouveau, oĂč lâon dĂ©couvrirait pour la premiĂšre fois notre groupe prĂ©fĂ©rĂ©, oĂč lâon ressentirait sans fin la mĂȘme excitation neuve, inentamĂ©e. Le mĂȘme dĂ©sir. Bref, jâai fini par aimer ce disque des Pixies, avec ses qualitĂ©s et ses dĂ©fauts. Il existe. Sur le solo de Ready for love, Joey Santiago fait nâimporte quoi on ne comprend rien, sans doute lui non plus. Câest Ă moitiĂ© foireux. Quâest-ce qui lui a pris ? Heureusement il se rattrape sur Los surfers muertos aucune note Ă cĂŽtĂ©, et Paz vaut bien Kim. Sur Long rider, ils refont carrĂ©ment Velouria, comme si câĂ©tait possible. Bien sĂ»r. La perfection nâest pas de ce monde, mais les miracles parfois. Je me souviens que Lloyd Cole disait des Pixies un coup gĂ©niaux, un coup merdiques ». Oui, ça a toujours Ă©tĂ© ça. Et ce sera encore ça, tant quâon sera en Pixies, Beneath the Eyrie Infectious / BMG Concert Giorgio Moroder, 22/05 au Grand Rex Ă Paris Film Un jeu brutal, de Jean-Claude Brisseau DVD/Blu-ray, chez Carlotta Livre Nous autres, de Jean-Pierre Montal Ă©ditions Pierre-Guillaume de Roux Fanzine Langue Pendue, de Renaud Sachet.
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| áź ŐȘÎż á·ÎżÎ» | áĐ”ÏÎżŃ áĐșŃÎż ŃŃŃŐ«ÏĐ”Ö ŐČĐŸŐŠŃŐŒ | ĐáĐžÎŒŃжДĐČŃ áÖ ĐșŐš аĐčΞ |
| Đ Ï ĐłĐ»Ï ÏŐšŐȘ | Đ€á ŃŃÖÏαзÖáŠ Ń ĐŸŃŃпДгДÏа | ĐĐ·ĐČĐŸ ÎŒŐžÖÎœĐ°á”Ő„Ï |
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Media in category "World War I posters of France" The following 127 files are in this category, out of 127 total. "Pour La Liberte du Monde" Statue of Liberty art in 1917 detail, from- Statueoflibertyd cropped.jpg 2,173 Ă 3,247; MB 111-SC-7151 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7152 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7153 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7154 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7156 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7157 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7158 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7159 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7160 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7161 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7162 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7163 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7164 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7165 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7167 - NARA - 55175156 journĂ©e du poilu.jpg 2,908 Ă 4,668; MB 111-SC-7167 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7168 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7170 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7172 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7173 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7187 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7190 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7192 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7193 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7194 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7195 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7196 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7197 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7207 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7208 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7209 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7210 - NARA - 55175240 grande matinĂ©e de bienfaisance.jpg 3,319 Ă 4,574; MB 111-SC-7210 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7211 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7212 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7213 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7215 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7216 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7217 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7218 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7219 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 111-SC-7222 - NARA - 55175262 1916 cropped.jpg 4,646 Ă 2,553; MB 111-SC-7222 - NARA - 9,183 Ă 6,305; MB 15 octobre 640 Ă 901; 300 KB 698 Ă 1,024; 202 KB 5 Sammlung Eybl Frankreich. Lucian Jonas 1880-1947. Grand MatineĂ© de Bienfaisance GroĂe WohltĂ€tigkeitsmatinĂ©e zugunsten der Witwen und Waisen. 1917. 120 x 80 cm. 590.jpg 9,223 Ă 14,182; MB A nurse holding a young child - 633 Ă 846; 73 KB A. Galland, les BlessĂ©s au travail - 3,268 Ă 2,504; MB Affiche "Chemins de fer du Nord"- Archives nationales- 4,839 Ă 7,246; MB Affiche 2,550 Ă 3,486; MB Affiche 1 guerre mondiale 1.jpg 1,356 Ă 1,962; 935 KB Affiche RĂ©publique française. Grand quartier gĂ©nĂ©ral des ArmĂ©es. Avis aux populations- Archives nationales- 4,928 Ă 3,680; MB Affiche Mes chers concitoyens »- Archives nationales- 2,321 Ă 1,727; 822 KB Affiches composĂ©es par les enfants de France, 854 Ă 1,252; MB American Fund for French Wounded 566 Ă 800; 63 KB Charles TochĂ© - On les 2,552 Ă 3,260; MB Collection de publicitĂ©s Dubonnet pendant la guerre 1914-1918 976 Ă 640; 367 KB Collection de publicitĂ©s Dubonnet pendant la guerre 1914-1918 1,002 Ă 640; 449 KB ComitĂ© de lâor Amiens Louis Abel-Truchet.jpg 2,275 Ă 3,000; MB Debout! Nos morts pour la patrie . . . voici la France! 1,024 Ă 692; 133 KB DĂ©claration du Gouvernement Ă la Chambre des dĂ©putĂ©s et au SĂ©nat, lue par RenĂ© Viviani- Archives nationales- 3,282 Ă 4,668; MB 200 Ă 312; 147 KB Exposition de guerre au bĂ©nĂ©fice des orphelins toulousains de la guerre Auguste Auglay.jpg 1,499 Ă 2,259; 840 KB Gare dâĂpinal - 1,650 Ă 1,210; 499 KB Havre Le - MĂ©diathĂšque de l'architecture et du patrimoine - 441 Ă 600; 75 KB Havre Le - MĂ©diathĂšque de l'architecture et du patrimoine - 436 Ă 600; 85 KB Henri Dangon, affiche Salon des armĂ©es 2,781 Ă 4,096; MB JournĂ©e de l'ArmĂ©e d'Afrique 2,269 Ă 3,479; MB JournĂ©e de Paris. 14 Juillet 1915 au profit des oeuvres de guerre de l' 2,525 Ă 3,783; MB JournĂ©e de Paris. 14 Juillet 1916. Au profit des oeuvres de guerre de l'HĂŽtel de 2,550 Ă 3,832; MB JournĂ©e des prisonniers de guerre de Vaucluse Jules Flour.jpg 2,171 Ă 3,000; MB JournĂ©e du FinistĂšre 1915 ThĂ©ophile Deyrolle.jpg 1,995 Ă 2,949; MB JournĂ©e du poilu 1,650 Ă 2,274; 275 KB JournĂ©es de lâHĂ©rault 1916 Adolphe LĂ©on Willette.jpg 2,253 Ă 3,000; MB JournĂ©es de Seine et Marne 1917 Adolphe LĂ©on Willette.jpg 1,820 Ă 2,720; MB L' 640 Ă 997; 358 KB La journĂ©e du poilu 2,696 Ă 3,936; MB Le coq gaulois vainqueur de l'aigle 2,112 Ă 2,816; MB Le Retour au foyer Maurice Neumont.jpg 1,498 Ă 2,147; 689 KB Le salut au pinard. Dessin de R. Serrey. 1917..jpg 604 Ă 640; 168 KB Les oreilles ennemies 666 Ă 466; 100 KB Lucien 640 Ă 841; 428 KB Mobilisation GĂ©nĂ©rale 3,367 Ă 4,457; MB OhĂ©! Les braves gens . . . Versez votre or nous versons bien notre sang . . . 702 Ă 1,024; 163 KB On Ne Passe Pas 1,021 Ă 1,402; 513 KB On se boit une bouteille de 640 Ă 1,009; 293 KB Ordre de Mobilisation gĂ©nĂ©rale 2 aoĂ»t 1914 cropped for wikisource.jpg 7,543 Ă 8,500; MB Ordre de Mobilisation gĂ©nĂ©rale 2 aoĂ»t 8,105 Ă 10,225; MB Panneau scolaire contre l' 773 Ă 640; 248 KB Panonceau de la Ligue antiallemande 1915.jpg 384 Ă 733; 191 KB Plantez des pommes de terre 2,244 Ă 3,425; MB Proclamation a la population de LunĂ©ville. Les troupes allemandes se sont emparĂ©es de la Ville de LunĂ©ville. 12504367554.jpg 1,138 Ă 2,000; MB Relations of France and the United States art detail, from- American Fund for French Wounded cropped.jpg 453 Ă 638; 45 KB Revanche Carte 474 Ă 640; 105 KB Saint-Denis avis aoĂ»t 2,448 Ă 3,264; MB Soldat, La Patrie Compte Sur 918 Ă 1,243; 936 KB Statue of Liberty art in 1917 detail, from- Statueoflibertyd cropped.jpg 1,305 Ă 1,635; MB 2,440 Ă 3,766; MB 2,440 Ă 3,778; 570 KB ThĂ©ophile Alexandre Steinlen 25 Juin 1916 - JournĂ©e 3,754 Ă 5,657; MB Un dernier effort et on l' 2,126 Ă 3,000; MB Vin aux 640 Ă 931; 333 KB Visions de Guerre, rue Edouard VII bd des Capucines. Grands dioramas des Allies..., les batailles, les ruines. La Vie dans les tranchĂ©es... Panorama naval par L. Tinayre , destruction du 2,133 Ă 1,744; 844 KB W2280-Affiche14-18 Conseils 2,780 Ă 3,724; MB W2281-Affiche14-18 Mobilisation14 2,609 Ă 3,371; MB W2282-Affiche14-18 Mobilisation14 2,803 Ă 3,723; MB W2283-Affiche14-18 Precautions 2,828 Ă 3,915; 5 MB W2284-Affiche14-18 Precautions 2,715 Ă 3,875; MB W2285-Affiche14-18 Silence 3,914 Ă 2,902; MB W2286-Affiche14-18 Tombola 2,693 Ă 3,750; MB W2287-Affiche14-18 Tribuns 2,931 Ă 4,033; MB W2288-Affiche14-18 Versez 2,981 Ă 4,145; MB W2289-Affiche14-18 PoiluType 0 3,866 Ă 2,885; MB W2290-Affiche14-18 PoiluType 1 GrandChef 2,113 Ă 3,163; MB W2291-Affiche14-18 PoiluType 2 VieuxGarcon 2,113 Ă 3,168; MB W2292-Affiche14-18 PoiluType 3 Parigot 2,113 Ă 3,168; MB W2293-Affiche14-18 PoiluType 4 Vicomte 2,112 Ă 3,168; MB W2294-Affiche14-18 PoiluType 5 PereFamille 2,113 Ă 3,168; MB W2295-Affiche14-18 PoiluType 6 VieuxBrave 2,113 Ă 3,168; MB W2296-Affiche14-18 PoiluType 7 Breton 2,113 Ă 3,168; MB W2297-Affiche14-18 PoiluType 8 Socialo 2,113 Ă 3,168; MB W2298-Affiche14-18 PoiluType 9 Rigouillard 2,113 Ă 3,168; MB W2299-Affiche14-18 PoiluType 10 Commis 2,113 Ă 3,168; MB W2300-Affiche14-18 PoiluType 11 JeanPierre 2,113 Ă 3,163; MB W2301-Affiche14-18 PoiluType 12 Vicaire 2,113 Ă 3,168; MB Ă la Gloire de Jean Corentin CarrĂ© Victor ProuvĂ©.jpg 1,499 Ă 1,893; 707 KB
Lyon- Musée de la Mine : la mine radieuse du puits Couriot Musée de la Mine : la mine radieuse du puits Couriot - C'est sous terre que se cache une partie du patrimoine et de l'Histoire stéphanoise. Fermé en 1973, le dernier puits d'extraction miniÚre de la ville a laissé place au Musée de la Mine. Le puits Couriot, classé Monument historique, constitue un site